Plus de 50 chef·fes d’État sont réuni·es à Nice (Alpes-Maritimes) pour inaugurer la troisième conférence de l’ONU sur l’océan (Unoc), qui durera jusqu’au 13 juin. Alors que des avancées sont attendues sur un certain nombre de dossiers, plusieurs annonces ont d’ores et déjà été faites par Emmanuel Macron ce lundi matin.
Le traité sur la haute mer en bonne voie
Surprise dès le premier jour du sommet : le traité sur la haute mer, enjeu majeur de la conférence, va bien pouvoir entrer en vigueur. Adopté en 2023 par les Nations unies, ce texte vise à protéger pour la première fois les eaux internationales, situées au-delà des juridictions nationales et jusqu’ici dépourvues de réglementation concernant leur préservation. Pour qu’il soit définitivement adopté, au moins 60 États devaient ratifier le traité, mais seule une trentaine l’avait fait jusqu’à ce week-end.

L’Unoc devait être l’occasion d’avancer sur les ratifications du traité en vue d’une entrée en vigueur avant la fin de l’année. Finalement, Emmanuel Macron a annoncé lors du discours inaugural qu’une cinquantaine de ratifications avaient été déposées ces dernières heures, et qu’une quinzaine d’États s’étaient par ailleurs formellement engagés à rejoindre le texte. «Ce traité sur la haute mer sera bien mis en œuvre, c’est donc gagné», s’est félicité le président de la République sous de vifs applaudissements dans la salle.
«En deux ans, par cette mobilisation collective, nous aurons réussi à faire appliquer enfin ce traité qui va permettre de lutter efficacement contre la pêche illégale et de protéger les deux tiers des océans et la moitié de la planète», a rappelé Emmanuel Macron. C’est une première victoire politique pour la France, qui peut donc se targuer d’avoir finalisé un dossier de longue date dès le début des discussions. S’il est bien ratifié au cours des prochains jours, le traité devrait entrer en vigueur d’ici trois mois.
Le président français a également rappelé la «nécessité internationale» d’un moratoire sur l’extraction minière dans les fonds marins : «C’est de l’obscurantisme que de faire de l’exploitation avant d’avoir commencé l’exploration.» À ce jour, 33 États se sont prononcés pour une telle «pause de précaution», mais les États-Unis de Donald Trump ont annoncé en avril dernier vouloir «accélérer» l’exploration et l’extraction des minerais dans les grands fonds (notre article). «Les abysses ne sont pas à vendre, pas plus que le Groenland n’est à prendre», a ajouté le président dans un tacle à peine dissimulé au chef d’État américain.
Plus d’aires marines protégées, mais une «escroquerie environnementale» selon les ONG
En fin de discours, Emmanuel Macron a aussi rappelé qu’il fallait accélérer sur la protection de 30% des océans d’ici 2030, une promesse faite il y a trois ans par 196 États lors de la 15ème conférence mondiale (COP15) sur la biodiversité (notre article). Le compte n’en est pour l’instant qu’à 8% : «Cette semaine va permettre […] d’augmenter ces aires marines protégées à travers la planète», a martelé le chef de l’État, précisant qu’il attendait des annonces des délégations.
La France, qui revendique déjà 33% de protection de son territoire marin, a tenté de montrer l’exemple ce week-end en annonçant dépasser les 70% d’ici fin 2026. Le plan présenté dimanche par le ministère de la transition écologique prévoit également de placer plus de 10% des eaux françaises sous «protection forte» (4% en eaux métropolitaines), avec l’interdiction de plusieurs activités destructrices pour les fonds marins, à l’image du chalutage de fond (connu pour racler les sols). En revanche, le chalutage pélagique (qui capture de grandes masses de poissons dans la colonne d’eau) n’est pas concerné par cette interdiction.
Ces nouvelles annonces sont une «escroquerie environnementale» pour l’association de défense de l’océan Bloom, qui a révélé dès ce dimanche que la plupart des zones de «protection forte» en eaux métropolitaines interdisent déjà le chalutage de fond depuis plusieurs années, voire décennies. «Cela ne change rien, absolument rien à la situation existante», déplore Swann Bommier, responsable du plaidoyer de l’ONG.
La «protection forte» prônée par la France est régulièrement épinglée par les associations (notre article) car elle n’est pas alignée sur la «protection stricte» définie par les scientifiques et censée interdire la quasi-totalité des activités extractives. Que ce soit sur les zones de «protection forte» comme sur les aires marines protégées en général, l’ONG WWF estime que «ces sites ne sont protégés que de nom et les activités destructrices se poursuivent souvent sans contrôle.»