Ces derniers mois, on ne peut pas dire que le Sénat a été à la pointe de l’urgence écologique. De la volonté de supprimer l’Agence bio à celle de réintroduire des pesticides «tueurs d’abeilles», la chambre haute du parlement – dominée par la droite –, s’est surtout illustrée par des propositions en rupture avec la transition écologique.
Pourtant, c’est bien au palais du Luxembourg, ce lundi 12 mai, que les sénateur·ices Grégory Blanc (Divers gauche), Christine Lavarde (Les Républicains) et Simon Uzenat (Parti socialiste) ont annoncé la création d’un groupe de suivi transpartisan sur le traitement médiatique des enjeux environnementaux, en partenariat avec l’ONG Quota Climat.

«Nous avons décidé de sonner la mobilisation générale au Sénat sur l’enjeu de l’information climatique, a déclaré Grégory Blanc, sénateur du Maine-et-Loire qui siège avec le groupe écologiste. La transition écologique est moins traitée dans les médias, et la façon dont elle l’est porte à caution puisque nous avons une offensive lourde des climatosceptiques.»
Pour Christine Lavarde, sénatrice LR des Hauts-de-Seine, l’écologie n’est ni un sujet de gauche ni un sujet de droite, mais un sujet de société : «C’est important de montrer un front uni sur la question du climat. 90% des Français accordent du crédit aux rapports du Giec [Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, NDLR] mais, quand on regarde le traitement médiatique, on voit que le climatoscepticisme est mis en avant.»
Une diminution de 5,3% à 3,7% de l’écologie à l’antenne entre 2023 et 2024
Avec cette annonce, les sénateur·ices veulent emboîter le pas à leurs collègues de l’Assemblée nationale : le 13 novembre dernier – également à l’initiative de l’association Quota Climat –, un groupe transpartisan de député·es avait déposé une proposition de loi pour améliorer le traitement médiatique de l’urgence écologique. Cette dernière prévoit notamment de renforcer le rôle de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) et d’inclure des volumes horaires dédiés aux enjeux climatiques dans les conventions que les médias signent avec le régulateur de l’audiovisuel.
L’initiative portée au Sénat n’en est pas à ce niveau d’aboutissement. «Ce matin, c’est l’étape un de l’action», a tempéré Grégory Blanc, qui évoque un nouveau temps de réflexion au mois de juillet.
Eva Morel, secrétaire générale de Quota Climat, a assuré que «la couverture des sujets écologiques baisse à mesure que la température monte et que les émissions de gaz à effet de serre s’accumulent». De fait, le temps d’antenne dévolu aux sujets environnementaux a diminué : de 5,3%, il est passé à 3,7% entre 2023 et 2024 dans les médias audiovisuels, selon l’Observatoire des médias sur l’écologie. «C’est très problématique, a-t-elle poursuivi. Couplé avec une désinformation climatique en hausse, cela crée une perte de repères qui empêche de mettre en mouvement les responsables politiques, les entreprises et les citoyens.»
Pour la première fois, l’été dernier, une chaîne de télévision – CNews – a été sanctionnée à hauteur de 20 000 euros d’amende pour climatoscepticisme. Selon Grégory Blanc : «Il faut mettre les climatosceptiques le plus loin possible du débat politique.»
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