Une porte d’entrée éclaboussée de peinture noire, des pleurs et une plainte à la police. Claire Nouvian, fondatrice et directrice générale de l’association de défense des océans Bloom, a annoncé dans une vidéo publiée ce mercredi sur son compte Instagram avoir subi une effraction à son domicile parisien. «Ils se sont attaqués à notre domicile privé, une ligne rouge a été franchie», a réagi auprès de Vert la militante écologiste, qui va demander son placement sous protection policière pour assurer sa sécurité et celle de sa famille.
Selon l’activiste, plusieurs individus ont pénétré dans son immeuble dans la nuit de mardi à mercredi, malgré deux codes de sécurité. «Je ne sais pas si tout le monde réalise la gravité de ces actes. Si des limites ne sont pas posées immédiatement, jusqu’où iront-ils la prochaine fois ?», a-t-elle questionné dans un texte qui accompagne la vidéo des dégradations sur sa porte d’entrée.
Contacté par Vert, le parquet de Paris précise ce jeudi en fin de journée qu’«une enquête du chef de dégradations a été confiée au commissariat du 12ème arrondissement suite aux faits constatés et dénoncés par Mme Nouvian. Les constatations ont été réalisées et les investigations se poursuivent.»
Tag d’Extinction rebellion et accusations «loufoques»
Les auteurs de ces actes n’ont pas été identifiés. Un message laissé à l’entrée du domicile de Claire Nouvian laisse supposer, d’après elle, que l’action est liée à son combat contre la destruction marine.
Selon Frédéric Le Manach, directeur scientifique de Bloom, le tract retrouvé sur la porte est truffé de propos «totalement infondés et loufoques» concernant des «conflits d’intérêt avec le milieu pétrolier». «C’est la théorie des marchands de doute : ils ne peuvent pas nous attaquer sur les faits, donc ils vont créer de fausses informations en espérant que ça prenne», analyse le chercheur, qui rappelle que son association milite par exemple pour un traité de non-prolifération des énergies fossiles.
Plus étonnant encore : un tag au pochoir retrouvé devant le domicile de Claire Nouvian mentionne l’association écologiste Extinction rebellion (XR). Contactée par Vert, cette dernière dément formellement toute revendication de cette action : «Ce n’est vraiment pas lié à Extinction rebellion, nous sommes en soutien avec Bloom», martèle l’un de ses porte-parole.
«L’unique objectif de cette campagne est d’instiller le doute dans les réseaux militants, politiques, scientifiques et médiatiques proches de nous pour qu’ils prennent leurs distances» vis-à-vis de Bloom, dénonce Frédéric Le Manach, qui estime aussi qu’il y a eu une «usurpation d’identité de XR».
Un climat de pression à quelques jours du sommet de Nice
«Ce déchaînement de violence n’est pas un hasard, estime Claire Nouvian sur son compte Instagram. Les lobbies de la pêche industrielle essaient de me faire taire car la conférence cruciale de l’ONU sur l’océan démarre dans cinq jours à Nice.»
Dans le cadre de ce grand sommet qui s’ouvrira le 9 juin (notre article), Bloom milite pour l’interdiction des méthodes de pêche dévastatrices (comme le chalutage de fond, qui consiste à racler les fonds marins) au sein des aires marines protégées. Si la France protège plus de 30% de son espace maritime, seulement 1,6% bénéficie d’une protection stricte (un statut qui interdit la plupart des activités de pêche), selon des travaux scientifiques.
«Depuis trois semaines, on voit une accélération de la pression physique et psychologique, on ne sait pas de quoi demain sera fait», souffle Frédéric Le Manach. Le 20 mai dernier, au cinéma Max Linder à Paris, la présentation de la dernière enquête de l’ONG sur la pêche industrielle (notre article) avait été interrompue par la diffusion d’un chant «Claire Nouvian ment», via une enceinte cachée sous des sièges. Vert avait assisté à la scène.
Les jours précédents, des autocollants visant Bloom et sa directrice générale avaient été collés à l’Académie du climat, relayés sur Instagram par un mystérieux compte qui promettait de mettre fin… au «greenwashing». L’association espère l’ouverture d’une enquête judiciaire pour faire la lumière sur ces incidents.