À tension. Jeudi, des activistes opposés à la construction d’une ligne à très haute tension entre le sud de la France et l’Espagne ont été expulsés d’un bois qu’ils occupaient pour bloquer le chantier. Les riverain·es demandent au Réseau de transport d’électricité de revoir le tracé de la connexion.
«Ils ont démoli la cabane et jeté les provisions», raconte Vag à Vert. Il fait partie des cinq «Écureuils» – ces militant·es perché·es dans les arbres pour bloquer le chantier de la ligne à très haute tension (THT) entre Bordeaux à Bilbao (Espagne) – qui ont été évacués jeudi. Il est venu aider le collectif d’habitant·es des Landes qui protestent contre ce projet depuis 2021.

Portée par Réseau de transport d’électricité (RTE) et Red Eléctrica (l’équivalent espagnol), cette interconnexion à plus de trois milliards d’euros s’étendra sur 400 kilomètres. Les câbles seront enterrés, sous la terre ferme et sous l’océan.
Début janvier, les Écureuils se sont d’abord perchés devant la mairie de Capbreton, puis dans les pins de la commune de Soorts-Hossegor (Landes), située sur le tracé de la ligne de 400 000 volts. Elles et ils ont construit une plateforme et occupaient le bois pour ralentir les travaux, sur le modèle des actions de protestation contre l’autoroute A69. Ce vendredi, il ne reste qu’un militant perché à cinq mètres de hauteur. La police a délogé les autres sur ordre de la préfecture.

«Nous ne sommes pas contre le projet, mais contre ce tracé», explique Sophie, membre du collectif Stop THT 40. À la suite de deux enquêtes publiques où les habitant·es ne se sont pas senti·es entendu·es, les opposant·es dénoncent «un déni de démocratie». Sur 2 000 avis récoltés, seuls deux étaient favorables au chantier. Les deux commissaires enquêteurs ont quand même donné un avis favorable.
Forages dans des dunes fragiles, sur le trait de côte ; ligne enterrée à 1,50 mètre sous des plages fréquentées et des habitations : les contestataires redoutent l’impact environnemental et sanitaire du projet. «On est là pour les arbres, mais pas seulement», défend Vag. «Chaque fin d’année, on dépose religieusement notre sapin de Noël sur les dunes pour les protéger et freiner l’érosion, et là, on apprend que RTE va forer des trous de 15 mètres de diamètre dedans !», renchérit Sophie, de Stop THT 40.
Le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) a rendu un avis défavorable au tracé actuel en août 2022. Au sein du collectif, des habitant·es militent pour que soit évaluée une alternative à celui-ci. Il s’agirait de longer l’autoroute A63 jusqu’à la frontière espagnole, plutôt que de forer dans les dunes. «Il passerait par une zone déjà artificialisée, il y aurait donc moins d’impact écologique», explique Vag.

Impossible, selon RTE. Selon l’entreprise, la ligne aurait alors dû passer par des ponts, présents sur l’axe entre Hendaye et Bilbao et les difficultés techniques auraient été trop nombreuses. Elle ajoute que cette ligne, d’une puissance inédite, ne présente «aucun risque pour la santé». Et rappelle que l’objectif est d’augmenter «la sécurité, la stabilité et la qualité de l’approvisionnement en électricité dans les deux pays».
Pas de quoi rassurer le collectif, qui a déposé quatre recours en justice, pas encore examinés. «Ils vont tous azimuts, et travaillent jour et nuit. Même si une décision de justice nous est favorable, les dégâts auront été conséquents», déplore Sophie pour qui il est malgré tout «encore temps d’agir».
La préfecture des Landes assure que «les travaux se poursuivront dans un cadre légal, tenant compte du caractère d’intérêt public majeur de ce chantier, qui contribue à la sécurité et à la transition énergétiques.»