L'hebdo

L’avion « vert » a du carbone dans l’aile

Certains espèrent encore qu'il nous permettra de voler sans compter, mais il semblerait que l'avion "vert" soit un mirage. 


Voici l'actu qu'il ne fallait pas rater cette semaine. 

Surprise : l’« avion vert » ne permettra pas (du tout) de respecter l’accord de Paris

Le progrès technique ne suffira pas : pour espérer contenir le réchauffement sous les 2°C, le trafic aérien devra décroître, révèle une étude du Shift project et de Supaéro Décarbo. 

Peut-on avoir les avions sans le CO2 des avions ? En 2018, le GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) avait calculé que l'humanité ne pourrait plus émettre que 844 gigatonnes (milliards de tonnes) de CO2 d'ici 2050 afin de contenir le réchauffement à moins de 2°C. Partant de ce chiffre, le think tank du Shift projet et le collectif Supaéro Décarbo ont attribué un « budget carbone » au secteur, au prorata de ses émissions en 2018 (2,56% du total mondial). Celui-ci ne devra pas dépasser 21,6 Gt de CO2 d'ici 2050.

Estimant que le trafic aérien retrouvera son niveau d'avant la pandémie dès 2024, puis qu'il connaîtra une croissance de 4% par an, les auteur•rice•s de l'étude ont approfondi plusieurs scénarios. Dans le plus optimiste, « la flotte mondiale se renouvelle en 15 ans (contre une moyenne actuelle de 25 ans), la production de carburants alternatifs est maximale (au-delà de toutes les projections actuelles) et elle est destinée en priorité au transport aérien », indique le rapport. Même dans ce scénario de rêve, le budget carbone est consommé en 2041. Une seconde projection, plus « raisonnable », prédit un dépassement dès 2038.

« Aucune trajectoire réaliste ne peut conduire à l’objectif sans réduire la croissance du trafic », tranche le rapport. Une solution réclamée de longue date par les ONG et, plus récemment, par la Convention citoyenne pour le climat. Parmi les mesures à mettre en place rapidement en France : supprimer le système de « miles » qui encourage à voler, ainsi que les vols courts réalisables en moins de 4h30 en train, et limiter l'aviation d'affaires, alors que 50% des déplacements sont effectués par les 1% les plus riches.

On se refait le fil de cette folle semaine : 

• A l'issue d'une ultime session consacrée à l'analyse des contre-propositions de l'exécutif, le mandat des 150 membres de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) s'est achevé, dimanche, sur une série de notes sévères pour le gouvernement. - Vert

• Lundi, les autorités espagnoles ont ordonné l'abattage de 864 bovins épuisés par deux mois d'errance en mer Méditerranée. Un autre cargo transportant 1700 bêtes est également de retour sur les côtes espagnoles. - Vert

• Mercredi, des représentant•e•s des peuples autochtones d’Amazonie et des ONG françaises et américaines ont assigné le groupe Casino en justice, l'accusant de contribuer à la déforestation, à l'esclavage et à l'accaparement de terres autochtones au Brésil et en Colombie. - Notre affaire à tous

• Jeudi, des « faucheurs » d'OGM ont détruit des centaines de sacs de semences entreposés sur le site d'une coopérative agricole à Castelnaudary (Aude). Elles et ils s'insurgent contre la commercialisation de ces graines de colza et de tournesol génétiquement modifiées obtenues par transgénèse. - AFP

2 430

En France, 2 430 espèces animales et végétales sont menacées d’extinction, d’après un bilan des treize années d’existence de la « liste rouge » nationale de l'Union internationale de conservation de la nature (UICN). Soit 17% des 13 842 espèces passées au crible en métropole et dans les outre-mers. Plus d'informations sur le site de Vert

© Denis Meyer / Greenpeace

Le seul véritable avion vert. Vendredi, neuf activistes de Greenpeace se sont introduit•e•s au sein de l’aéroport Charles de Gaulle pour repeindre un avion en vert. Les militant•e•s voulaient dénoncer le greenwashing du gouvernement concernant le secteur aérien. Comme Vert le racontait (voir plus haut) l'exécutif n’a de cesse de mettre en avant l’avion « vert » comme solution à l'avenir du secteur aéronautique, malgré les démentis de la communauté scientifique. - Récit de l'action sur le site de Greenpeace

Cette semaine encore, nous avons appris tout un tas de choses. Par exemple : 

L'empreinte carbone des entreprises du CAC40 met le monde sur la voie d'un scénario de réchauffement climatique à +3,5°C en 2100. Quatre d’entre elles - BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole et Total - ont une empreinte carbone supérieure à celle de la France. - Oxfam

• Les nouveaux engagements climatiques des Etats ne devraient faire baisser les émissions de CO2 que de 1% d'ici 2030, contre les - 45% attendus, alerte l'ONU. - Vert

• Les émissions de CO2 du secteur de l'énergie, qui représentent 85% des rejets mondiaux, sont déjà reparties à la hausse dès la fin 2020, malgré la pandémie. - Vert

• Le Gulf stream, ce courant marin de l'Atlantique qui régule les températures, connaît un important ralentissement et le réchauffement climatique pourrait en être la cause. - Vert

• S'ils colorent le pays d'un joli teint sépia, les nuages de sable qui survolent régulièrement la France depuis plusieurs semaines charrient avec eux de nombreux polluants et pathogènes. - Vert

• Près de 30% de la nourriture produite dans le monde n'est jamais consommée, dénonce l'ONU ; une aberration sociale et écologique. - Vert

Le plein de bonnes nouvelles et de bonnes idées pour ne pas désespérer :

• Le « débat préhistorique » autour des menus végétariens servis dans les écoles primaires de Lyon permet de faire une mise au point salutaire sur nos prétendus « besoins » en viande. Spoiler : on peut très bien vivre sans. - Vert

• Suivant la méthode Miyawaki, la ville de Mulhouse (Haut-Rhin) s'est lancée dans la plantation d'une forêt dense et aux essences variées qui ne sera pas exploitée pendant au moins trente ans. - Vert

• Au Kenya, pour lutter contre les conséquences de la déforestation illégale, des gardes posent des milliers de « bombes à graines » qui feront les forêts de demain. - Vert

• Des citoyen•ne•s militent pour conserver un accès à la nature, alors que se resserrent les contraintes liées à la pandémie. - Vert

Regonflé•e•s par cette bolée de bonnes nouvelles, vous voici prêt•e•s à vous remonter les manches. Littéralement, puisque cette semaine, on fait venir le soleil avec une recette d'autobronzant

Par sincérité, par humanité et parce que chaque gramme de beauté en vaut la peine ; dans son essai politico-poétique « Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce », Corinne Morel Darleux propose de lutter encore face à la catastrophe qui vient. Chronique à lire sur le site de Vert

Les punks du vin !

Le monde du vin est bousculé par les vins naturels « comme le rock a pu l’être par le punk en son temps », explique Bruno Sauvard dans son documentaire « Wine Calling : le vin se lève ! ». Le réalisateur, qui a suivi huit de ces rebelles dans leur vignoble d'Occitanie pendant toute une saison, retranscrit avec brio leur passion, leur énergie et leur bonheur contagieux ; le tout sur fond de musique rock !

Wine calling : le vin se lève !, Bruno Sauvard, 2018, disponible en accès payant sur Viméo