L'étude

«Une menace croissante» : avec le réchauffement climatique, Paris et sa région souffriront de sécheresses sévères dès 2050

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Le moral dans les chauds secs. Les épisodes de sécheresse sont une menace grandissante en Île-de-France et pourront coûter jusqu’à 2,5 milliards d’euros à l’horizon 2100. C’est ce que révèle un rapport de l’organisation des pays riches, paru ce lundi.

Pas de restrictions d’eau en région parisienne dans les prochaines décennies, mais des épisodes de sécheresse intenses qui causeront 2,5 milliards d’euros de pertes agricoles et industrielles. C’est ce qu’indique l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans un rapport de 200 pages sur le sujet, paru ce lundi.

Ce club des pays riches appelle à renforcer la prévention des risques face à ce qu’il qualifie de «menace croissante pour les habitants», en particulier à partir de 2050.

Les personnes qui vivent dans les grandes villes sont particulièrement vulnérables au manque d’eau. L’imperméabilisation des sols réduit la capacité des nappes souterraines à se recharger, tandis que la hausse des températures aggrave le phénomène des îlots de chaleur, ces dômes d’air plus chaud qui recouvrent les villes. En 2024, Barcelone avait «échappé de peu à une pénurie d’eau», mais avait dû imposer des restrictions de consommation «très strictes» à sa population après trois ans de sécheresse, observe Jo Tyndall, directrice Environnement de l’OCDE.

Le réchauffement climatique accroît la probabilité de sécheresses sévères à Paris. © Olivie Strauss/Unsplash

Ces tendances sont amplifiées par le réchauffement climatique, qui assèche les sols plus rapidement, fait chuter le niveau des nappes phréatiques à des seuils critiques et favorise l’alternance d’épisodes de sécheresse prolongée et de pluies torrentielles.

La durée des sécheresses a déjà augmenté de 4% en moyenne et l’Île-de-France a enregistré une baisse de l’humidité des sols de 5% entre les périodes 1961-90 et 1981-2010, selon Météo-France.

Des restrictions dans l’agriculture et l’industrie

Longtemps perçue comme bien pourvue en ressources hydriques, la région parisienne a subi une augmentation des températures moyennes de 2 degrés depuis 1990 et le réchauffement climatique accroît la probabilité de sécheresses sévères dans le secteur.

En cas de sécheresse aussi grave qu’en 1921 (l’année la plus sèche du 20ème siècle à Paris), des restrictions d’irrigation, de navigation et d’usage de l’eau dans l’industrie pourraient être imposées «pendant plus de 150 jours» pour préserver l’approvisionnement des habitant·es en eau potable, ont calculé les auteur·ices du rapport. Le développement de la région parisienne, qui concentre déjà 19% de la population et un tiers de la production économique de la France, accentuera encore davantage les besoins en eau, donc le risque de sécheresse.

Irrigation par aspersion

Les terres agricoles, qui occupent 50% de la superficie de l’Île-de-France, ont vu leurs besoins en eau «plus que doubler depuis 2012» et ceux-ci devraient encore «s’accroître de 45% d’ici 2050», préviennent les auteur·ices, qui anticipent aussi le développement de la production de froid via l’eau de la Seine pour les besoins de climatisation.

Dans et autour la capitale, les prélèvements d’eau servent à l’alimentation en eau potable (57%), à l’industrie (20%), à la production d’énergie (13%), aux canaux (7%) et à l’irrigation (3%).

Jusqu’à présent, la région s’est montrée résiliente grâce à un «solide réseau d’infrastructures fluviales», notamment quatre lacs réservoirs qui «jouent un rôle crucial dans le maintien des niveaux d’eau et garantissent l’approvisionnement en eau potable et en eau à usage industriel, agricole et énergétique lorsque les ressources se raréfient».

Mais selon l’OCDE, un épisode de sécheresse majeur pourrait «gravement perturber les activités économiques» et engendrer jusqu’à 2,5 milliards d’euros de pertes de production agricole et manufacturière à horizon 2100.

Les lacs réservoirs pour réguler l’accès à l’eau

Ce à quoi s’ajoutent des risques de dégâts sur l’habitat liés au retrait-gonflement des argiles (mouvements des sols argileux qui fragilisent et fissurent les habitations) sous l’effet de la sécheresse. En France, l’agglomération parisienne est l’un des territoires les plus exposés à ce phénomène. 76% de la région est située dans des zones à risque «moyen» ou «élevé» face au retrait-gonflement des argiles. Cela a déjà entraîné des coûts moyens de 62 millions d’euros par an entre 1995 et 2016, rappelle le rapport.

De potentiels conflits d’usage avec des agriculteur·ices d’autres régions sont aussi à craindre, si ces collectivités étaient mises à contribution pour approvisionner Paris et sa grande banlieue en eau potable.

«Nous savons que nous allons être plus exposés, mais nous n’avons pas quantifié la vulnérabilité des activités ou des populations», précise Sophie Lavaud, rédactrice du rapport.

Elle l’explique par «la confiance placée par les autorités dans les lacs réservoirs, qui alimentent les fleuves à hauteur de 70% lors des périodes d’étiage [lorsqu’un cours d’eau est à son niveau le plus bas, NDLR]».

Les auteur·ices préconisent de réduire les prélèvements d’eau, même si elles et ils reconnaissent que la marge de manœuvre est faible — la région étant déjà bonne élève.

Les expert·es recommandent aussi «une solide évaluation des risques» de sécheresse à l’aune du changement climatique pour mettre en place une stratégie après 2030. Ou encore d’allouer la ressource en eau en fonction des besoins de chaque usager.

Aujourd’hui, les usagers peuvent procéder à des prélèvements illimités, sauf en cas de sécheresse, s’ils démontrent «que la ressource ou les écosystèmes n’en pâtiront pas». Le rapport appelle enfin à développer la réutilisation des eaux industrielles ou la collecte des eaux de pluie.

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