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La nouvelle vie de François de Rugy, de ministre polémique à youtubeur anti-écolos : la chronique de Théo Mouraby sur France inter

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Vrai ou désinfo ? Cette semaine, le journaliste de Vert spécialiste de la désinformation climatique s’est intéressé à l’étrange reconversion de François de Rugy : du ministère de la transition écologique à la désinformation sur Youtube. Comment en est-il arrivé là ? Cliquez ici pour (ré)écouter cette chronique diffusée sur France inter, mercredi 18 juin.

Mathieu Vidard : Théo, vous êtes venu nous parler de votre enquête sur François de Rugy. De quoi s’agit-il ?

Oui Mathieu. Pour ceux qui ne s’en souviennent plus très bien, François de Rugy était le ministre de l’écologie d’Emmanuel Macron en 2019. C’est lui qui avait été obligé de démissionner après la fameuse «affaire des homards». Souvenez-vous, Mediapart avait révélé que François de Rugy organisait des dîners fastueux – notamment à base de crustacés – payés avec de l’argent public.

Eh bien, six ans plus tard, à Vert, nous avons eu des nouvelles de l’ancien ministre. Il a aujourd’hui une chaîne Youtube pour, je cite : «Lutter contre la désinformation en matière d’écologie». Et là, Mathieu, vous allez me dire : «Où est le problème ?» Le problème, c’est que c’est l’ancien ministre lui-même qui relaie des fausses informations.

Je vous donne un exemple avec sa dernière émission sur l’acétamipride – vous savez, ce pesticide accusé de tuer les abeilles, dont on a beaucoup parlé dernièrement avec la loi Duplomb, qui veut le réintroduire en France. François de Rugy prétend que l’insecticide n’est pas dangereux «ni pour les abeilles, ni pour la santé humaine». Mais si vous avez lu les articles de Vert sur ce dossier, notamment ceux de mon collègue Esteban Grépinet, vous savez que c’est faux.

L’acétamipride est un insecticide donc, par définition, il tue des insectes – et notamment les abeilles. Et, avant même de les tuer, il peut leur faire perdre la mémoire ou les rendre incapables de voler, ce qui complique sérieusement leurs chances de survie. Des études récentes ont même conduit l’Efsa – l’autorité qui rend des avis sur les risques des pesticides dans l’Union européenne – à reconnaître des «incertitudes majeures» sur la santé humaine. Soit l’inverse de ce que dit François de Rugy

Y a-t-il d’autres contenus problématiques sur sa chaîne ?

Il a aussi fait deux vidéos contre la loi qui vise à interdire les PFAS, votée en février dernier. Les PFAS, ce sont ces «polluants éternels» qui s’infiltrent partout, y compris dans nos corps, et qui peuvent provoquer des cancers et des maladies. Eh bien… François de Rugy est contre leur interdiction. Et il relaie les arguments des industriels, pourtant largement contredits par la recherche scientifique sur le sujet.

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Enfin, il invite sur son plateau des profils controversés sur l’écologie comme la journaliste du Point Géraldine Woessner. Alors, nous avons contacté François de Rugy, et lui dément toute désinformation. Il dit appuyer ses propos sur des études scientifiques.

Mais alors, comment un ancien ministre de la transition écologique en est-il arrivé là ?

Pour essayer de le comprendre, j’ai contacté des personnes qui travaillaient avec lui lorsqu’il était au gouvernement. J’ai eu une ancienne collaboratrice qui était très surprise quand je lui ai raconté ça. Ses anciens alliés écologistes – chez qui il a débuté et où il n’a pas vraiment laissé une bonne image –, un peu moins.

Franck Nicolon, par exemple, un élu écolo avec qui il a milité chez les Verts dès la fin des années 1990, l’explique par le fait que François de Rugy souhaite être proche du pouvoir et gouverner. C’est ça, selon lui, qui l’aurait conduit à faire ce virage à droite.

Et, justement, au mois de mars, il a été nommé à un poste de vice-président au conseil régional des Pays de la Loire, gouverné par la droite… et il a déjà déclaré son soutien à Édouard Philippe pour l’élection présidentielle de 2027.