Le Rassemblement national (RN) a douché les espoirs de François Bayrou, le 25 août, juste après que le premier ministre a annoncé solliciter un vote de confiance – prévu le 8 septembre à l’Assemblée nationale – pour faire passer son projet de budget pour 2026. En cause : un «désaccord total avec les orientations» budgétaires, a réexpliqué mardi 2 septembre le président du parti, Jordan Bardella, après avoir été reçu à Matignon avec la cheffe de file des député·es RN, Marine Le Pen.
La formation d’extrême droite – qui pousse pour une dissolution et de nouvelles élections législatives – se prépare déjà pour l’après. Depuis plusieurs jours, les cadres lepénistes ont ressorti leur «contre-budget», rédigé en octobre dernier, pour se présenter en alternative crédible à la crise politique. «Il y a un gros travail à faire sur l’immigration – sur les aides sociales accordées aux immigrés –, il y a aussi la question des agences de l’État, la contribution de la France à l’Union européenne et le coût des énergies intermittentes», c’est-à-dire renouvelables, a énuméré mardi la vice-présidente du parti Edwige Diaz, sur la chaîne du groupe Sud Ouest TV7.
Une grande victime : l’écologie
Dans son contre-budget, le Rassemblement national espère 13,7 milliards d’euros d’économies. En plus des cibles habituelles du parti d’extrême droite comme l’immigration, l’Union européenne ou la culture, l’écologie est la grande victime de ce plan. Il prévoit :
❌ La suppression des agences environnementales publiques, considérées comme «inutiles et coûteuses» par Jordan Bardella sur son compte Instagram mercredi. Sont visées ici l’Office français de la biodiversité (OFB) et l’Agence de la transition écologique (Ademe). Déjà ciblées à plusieurs reprises par la droite et l’extrême droite, Vert avait rappelé en juin leur rôle crucial pour l’écologie.
☀️ Arrêter de financer les énergies renouvelables comme le solaire et l’éolien. «Il est urgent de supprimer les subventions aux énergies intermittentes et inefficaces comme les éoliennes pour soutenir l’atome», estime aussi Jordan Bardella. Fin juin, dans un moment de flottement à l’Assemblée nationale – que Vert vous avait raconté –, le parti d’extrême droite avait fait adopter un moratoire (une suspension d’activité) sur les énergies renouvelables. Il a depuis été retoqué par le Sénat. Le parti prévoit aussi le doublement de la taxe sur l’éolien en mer (30 millions d’euros espérés par le RN).
🛢️Le RN assume un soutien coûteux aux énergies fossiles, et de compter sur le gaz, le charbon et le pétrole tant que de nouvelles centrales nucléaires n’auront pas pris le relai – soit au plus tôt en 2038.
🚲 La suppression du plan vélo. Lancé en 2018 et renouvelé en 2022, ce plan vise à développer des infrastructures cyclables pour faire de la France «une nation du vélo».
🚘 La suppression du malus automobile, la taxe sur l’achat des véhicules les plus polluants.
🍃 La baisse du Fonds vert pour la transition écologique des collectivités (moins 500 millions d’euros).
👫 La réduction de 110 millions d’euros des subventions aux associations qui œuvrent dans le champ de «l’écologie, du développement et de la mobilité durables», selon le RN.
Des calculs «hypothétiques»
Parmi les pistes d’économies proposées par le Rassemblement national, certaines semblent difficilement applicables. Le RN prévoit de récupérer six milliards d’euros en mettant fin à l’obligation de rachat d’énergies renouvelables par EDF à un tarif préférentiel. Un calcul hypothétique, selon Le Monde, «puisque ces contrats entre EDF et les fournisseurs – grandes entreprises d’éoliennes ou particuliers – engagent l’opérateur public pour 20 ans», ces engagements ne peuvent donc pas être rompus du jour au lendemain, détaille le quotidien.
Autre piste d’économies sujette à caution : les supposés «gaspillages faramineux» des agences de l’État. Dans un entretien à Libération, le patron de l’Ademe, Sylvain Waserman, se défendait en révélant qu’un rapport de l’Inspection générale des finances de 2024 avait conclu que l’agence était bien gérée et qu’il n’y avait pas lieu de changer de modèle. «Le Rassemblement national propose de cesser de financer la transition écologique avec de l’argent public. Au moins, ça a le mérite de la clarté», avait-il ajouté.
Ce ne serait pas la première fois que le parti à la flamme fait de mauvais calculs. En mai, Vert avait montré que l’extrême droite et la droite agitaient un faux chiffre pour démontrer le coût démesuré des énergies renouvelables : «300 milliards d’euros». En réalité, le montant se situe plutôt entre 31 et 50 milliards d’euros de subventions aux énergies renouvelables d’ici à 2060, selon l’hypothèse la plus probable.
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