La quotidienne

Petits soldats de sans-plomb

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L'actualité nous rappelle avec fracas qu'il faut apprendre à se passer des fossiles, pour la paix et pour le climat.


Déchets nucléaires : ils disent qu'ils voient pas le rapport

Avis de déchets. Jeudi, des parlementaires ont adopté leur rapport d'évaluation sur le plan national de gestion des matières et déchets radioactifs. Problème : ce plan n'est jamais paru de tout le quinquennat. Une « défaillance démocratique grave » pour les élu·es.

Chaque année, les 56 réacteurs nucléaires français génèrent environ 25 000 mètres cubes (m3) de déchets ultimes, ainsi que plusieurs milliers de tonnes de matières (censées être réutilisables) à la radioactivité variable (Vert). Dans son dernier inventaire, l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) recensait ainsi plus de 1,7 million de m3 de déchets ultimes et plus de 350 000 tonnes de matières radioactives sur le territoire français.

Afin de les gérer de façon durable et transparente, le gouvernement doit régulièrement mettre à jour sa stratégie, appelée plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR). Il la soumet ensuite à l'évaluation des député·es et sénateur·ices rassemblé·es au sein de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) pour en garantir le contrôle démocratique. Enfin, ça, c'est la théorie. Ou plutôt la loi.

Dans les faits, la France ne dispose plus de plan depuis la fin 2018. La mouture couvrant la période 2019-2021 n'est jamais parue et celle pour 2021-2025 se fait toujours attendre. Alors que le quinquennat touche à sa fin, « les membres de l’Opecst sont assez outrés que le contrôle parlementaire n’ait pas pu avoir lieu », a expliqué, jeudi 3 mars, la députée (sans étiquette) Emilie Cariou, rapporteuse du rapport. Les parlementaires ont dû se contenter d'une version « tombée du camion » et « obtenue par des voies pas du tout officielles ».

Les déchets sont stockés dans différents sites en fonction de leur radioactivité et de leur durée de vie. Ici, un colis de déchets de faible et moyenne activité (FMA) est déchargé au centre de stockage des déchets de l’Aube © Andra

Cette version, dévoilée par Contexte, pose d'autres problèmes encore. Plusieurs chantiers y restent sans solution, ou sont reportés à plus tard. Par exemple, le gouvernement s'abstient de décider du sort de 324 000 tonnes d'uranium appauvri (sous-produit de l'enrichissement d'uranium), qui sont aujourd'hui sans usage.

Autre sujet de préoccupation : l'arrivée à saturation des piscines d’entreposage de combustibles usés à La Hague (Manche). Celle-ci pourrait intervenir avant 2030 alors que le projet de nouvelle piscine aboutira en 2034 au plus tôt, a prévenu EDF (Reporterre).

Surtout, ce plan de 97 pages ne comprend aucune estimation financière - ou presque. Par exemple, il est prévu de « communiquer autour du coût du projet Cigéo » une fois l’autorisation de création délivrée, c’est-à-dire pas avant 2025. Or, ce projet pharaonique de stockage définitif des déchets les plus dangereux à Bure (Meuse) est vivement contesté, de même que son chiffrage financier : « un arrêté fixe le coût du projet à 25 milliards d’euros. Mais précédemment, l’Andra avait évalué ce coût à 34,5 milliards d’euros et le cabinet d’audit PwC entre 39,1 et 43,6 milliards d’euros »expliquait récemment Emilie Cariou à Vert.

· Samedi, les organisateur·rices de la Primaire populaire ont choisi d’apporter leur soutien au candidat insoumis à la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon. Une décision qui intervient après le retrait de la campagne - faute de parrainages suffisants - de Christiane Taubira, arrivée en tête de ce scrutin le 30 janvier dernier. Jean-Luc Mélenchon, qui avait refusé de participer, avait fini troisième derrière Yannick Jadot. - France info

· Samedi encore, des activistes de Greenpeace ont investi le port de Montoir-de-Bretagne (Loire-Atlantique) pour protester contre l’arrivée du méthanier Boris Vilkitsky avec, à son bord, du gaz naturel liquéfié (GNL) en provenance de Russie. Ce méthane est issu du site de Yamal, situé dans l’Arctique, dont TotalEnergies est partenaire à hauteur de 20%. Alors que Moscou mène sa guerre contre l’Ukraine, « contrairement à plusieurs multinationales pétro-gazières (BP, Shell, Exxon, Equinor…), TotalEnergies a choisi de poursuivre ses activités en Russie », dénonce l’ONG. - Greenpeace

« Sorgho »

Soghoghogho ! Alors que vient de s'achever le Salon international de l’agriculture, qui aura encore prôné le tout-technologie (Vert) pour répondre aux nombreux défis de l’agriculture (Vert), voici une véritable solution à certains des maux qui nous menacent : le sorgho !

Sorgho © Larry Rana, United States Department of Agriculture

Méconnue en France, elle est la cinquième céréale la plus cultivée dans le monde ; originaire d’Afrique, elle ne demande que très peu d’eau, résiste à la chaleur et à la sécheresse, son système racinaire lui permet de lutter contre l’érosion des sols, elle connaît peu de ravageurs, nécessite peu de pesticides et elle convient à l’alimentation du bétail comme à celle des humains, dont les amateur·rices de sans-gluten. N’en jetez plus ! Si sa présence est encore modeste dans l'hexagone, le sorgho aiguise déjà les appétits de l’industrie. Pour tout savoir de cette céréale du futur dans un monde en surchauffe, retrouvez notre analyse sur vert.eco

Des centaines d’ONG réclament la fin des importations d'hydrocarbures russes

Argent fossile. Alors que les forces russes continuent de semer la terreur en Ukraine, des centaines d'organisations humanitaires et environnementales ont appelé, samedi, les dirigeants du monde en entier à stopper leurs importations de gaz et de pétrole en provenance de Russie.

« 40% du budget fédéral russe provient de la vente de pétrole et du gaz », rappellent-elles dans leur lettre ouverte, jugeant crucial de « ne pas sous-estimer le rôle des énergies fossiles dans la conduite du conflit […] Notre addiction aux énergies fossiles nourrit la machine de guerre de Poutine ». « Au nom de la paix », les ONG réclament l'arrêt des échanges commerciaux et des investissements dans les entreprises russes des énergies fossiles telles que Gazprom, Rosneft, LukOil, Russian Coal et d’autres.

Pour l'heure, les économies mondialisées restent paralysées par leur dépendance à la manne russe et les sanctions qui visent la Russie épargnent encore largement le secteur des énergies fossiles. En 2019, 41% des importations de gaz naturel de l’UE et 26,9 % des importations de pétrole brut provenaient de Russie, selon Eurostat (Vert). La France n'est pas en reste ; elle importe 17% de son gaz depuis la Russie. Le pétrolier tricolore TotalEnergies poursuit d'ailleurs ses activités dans le pays sans que le gouvernement ne lève un sourcil.

Plusieurs pays européens se mettent toutefois en branle, en particulier l'Allemagne dont la dépendance au gaz russe grimpe à plus de 50% (Vert). La Commission européenne examine actuellement un plan en dix points présenté la semaine dernière par l'Agence internationale de l'énergie pour se passer du méthane russe. Celui-ci repose sur la diversification des sources de gaz, ainsi que des investissements massifs dans la sobriété énergétique et les renouvelables. Il permettrait au continent de se passer d'un tiers de ses approvisionnements en gaz russe à court terme.

La bataille de l'Arctique

Arctic conquise. À l'heure où tous les yeux sont rivés sur la guerre en Ukraine, le podcast La Loupe du journal l'Express nous invite à découvrir un autre champ de bataille : l'Arctique. Pétrole, gaz, charbon, or, cuivre, nickel ou même terres rares... Dans cette région sensible qui borde le pôle Nord de la planète, une myriade de pays et d'acteurs internationaux s'activent pour s'emparer des précieuses ressources du sous-sol. La Russie y a ouvert des bases militaires et n'entend pas être stoppée dans sa politique extractrice. Les autres pays ne sont pas en reste. Bref, la conquête de l'Arctique a de beaux jours devant elle.

© La loupe

+ Loup Espargilière et Mathilde Doiezie ont contribué à ce numéro