5,78 milliards d’êtres humains possèdent un téléphone portable, soit près de 70% de la population mondiale, selon le Global digital report 2025 de l’agence We Are Social et de l’éditeur de logiciels Meltwater.
Cet article est issu de la série Label Vert, une collaboration entre Vert et
Que Choisir.
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Parmi les appareils détenus, 87% sont des smartphones, c’est-à-dire des téléphones dotés de fonctionnalités proches de celles d’un ordinateur et d’un appareil photo numérique.
C’est quoi le problème ?
Ces bijoux technologiques ont des impacts environnementaux considérables, dont plus des trois quarts sont liés à leur fabrication. Comme le rappelle l’Agence de la transition écologique (Ademe), cette empreinte est principalement due à l’extraction des matières premières – nos smartphones contiennent jusqu’à 50 métaux différents.
L’exploitation minière, concentrée en Afrique, en Asie et en Amérique du Sud, entraîne la destruction des écosystèmes : pour quelques grammes de minerais, il faut parfois excaver jusqu’à 200 kilogrammes (kg) de matière. À cela s’ajoutent les pollutions des sols, de l’air et de l’eau, ainsi que des émissions de gaz à effet de serre et de particules fines (PM25) pendant la fabrication.

L’impact social est lui aussi considérable. L’exploitation des «minerais des conflits» (tungstène, coltan, étain et or) alimente des guerres civiles dans la région africaine des Grands Lacs, notamment en République démocratique du Congo (RDC). Dans ce pays, près de 40 000 enfants travaillent dans les mines de cobalt, selon le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef). Enfin, l’ONG Electronics watch dénonce régulièrement de graves atteintes au droit du travail sur les chaînes d’approvisionnement de produits électroniques.
Ce qu’en disent les experts
Dans ces conditions, impossible de trouver un téléphone 100% écologique et éthique. «En revanche, il est possible d’éco-concevoir les smartphones, pour faire en sorte qu’ils durent le plus longtemps possible», explique Frédéric Bordage, expert en numérique responsable et fondateur de l’association Green IT. Un smartphone écoresponsable doit d’abord être facilement démontable et réparable. Pour cela, il faut se référer à son indice de réparabilité.
Lancé en 2021, cet outil attribue une note sur dix aux appareils électroniques, selon plusieurs critères : démontabilité, facilité de réparation, disponibilité et prix des pièces détachées. «Pour qu’un appareil soit réellement réparable, sa note doit être supérieure à huit sur dix», estime Frédéric Bordage.
L’autre point essentiel concerne la durée de vie des mises à jour des systèmes d’exploitation, dont les plus connus sont Android et IOS. Si un téléphone n’est plus mis à jour, il finit par dysfonctionner et doit être remplacé prématurément. Longtemps, les grandes marques ont favorisé l’obsolescence programmée en réduisant volontairement la durée d’utilisation des téléphones afin d’accélérer l’achat d’un modèle plus récent : les mises à jour n’étaient ainsi plus disponibles après deux ou trois ans. Les choses évoluent : des mises à jour sont désormais proposées pendant sept à huit ans pour les modèles haut de gamme, notamment grâce à la législation européenne. Depuis juin 2025, un règlement impose des mises à jour du système d’exploitation pendant au moins cinq ans pour tous les nouveaux smartphones, à compter du dernier jour de commercialisation.
Enfin, certains téléphones contiennent des éléments recyclés (plastiques, alliages, coques de protection, verre). «Des marques comme Samsung ou Apple communiquent beaucoup sur cet élément. Cependant, il est difficile de faire un vrai suivi de leurs annonces, car elles ne sont pas toujours transparentes sur leur chaîne de production», nuance Clément Gareau, responsable éditorial guide d’achat chez Frandroid, média de référence sur l’actualité tech.
Fairphone, un vrai bon élève
Alors, vers quel modèle se tourner pour un achat écoresponsable ? «Dans le monde de la téléphonie, Fairphone est clairement au-dessus du lot», assure Frédéric Bordage. Les smartphones de la marque néerlandaise fondée en 2013 affichent de bons résultats sur l’ensemble des critères évoqués ci-dessus : utilisation de nombreux matériaux recyclés ; mises à jour logiciel pendant huit ans ; et surtout grande réparabilité.
Le dernier modèle, le Fairphone 6, a même reçu une note de réparabilité de dix sur dix par le site Ifixit, dédié à la réparation des objets électroniques. Concernant l’origine des composants et des minerais présents dans le téléphone, la marque néerlandaise fait de vrais efforts de transparence et recourt à des exploitants de mines artisanales plutôt qu’industrielles. Toutefois, comme l’expliquait Que Choisir dans une enquête sur Fairphone, seule une grosse moitié de ses composants étaient éthiques en 2021.

Du côté de la performance, le Fairphone 6 marque un tournant. Si les anciens modèles restaient en dessous des autres smartphones à prix équivalent, cette nouvelle version comble son retard. «Le Fairphone 6 affiche une bonne qualité de fabrication et l’écran n’est pas sensible aux rayures. Le smartphone passe le test de chute avec seulement quelques égratignures, notamment dans les coins. Après l’essai de résistance à l’eau de pluie, le smartphone fonctionne immédiatement. L’utilisation tactile de l’écran est excellente avec une très bonne réactivité», résume Vincent Erpelding, testeur chez Que Choisir. Le test de Que Choisir du Fairphone 6 met en avant la qualité d’affichage, la qualité audio et la photo, ainsi qu’un bon rapport puissance/prix (599 euros). Seuls quelques points faibles subsistent : la qualité vidéo et l’autonomie.
Les alternatives
D’autres marques s’engagent aussi sur la voie de l’écoresponsabilité. La société allemande Shift, fondée en 2014, mise sur la réparabilité totale de ses appareils, entièrement démontables. Il n’existe toutefois pas de tests de performance pour ces produits, encore peu vendus en France. La marque française Crosscall mise de son côté sur la robustesse de ses téléphones, plutôt destinés aux professionnel·les et conçus pour résister à des chocs importants. Ils sont également réparables (indice de réparabilité de 8,8 pour le modèle Core-M4) et disposent d’une garantie de cinq ans. «En termes de durée de vie des téléphones, Apple propose également de bons produits. Il faut juste savoir qu’on ne pourra pas réparer les appareils tout seul, même si on est bidouilleur», ajoute Clément Gareau.
Enfin, les téléphones reconditionnés constituent une option écologique et économique indéniable : comme le souligne l’Ademe, ils peuvent avoir jusqu’à huit fois moins d’impacts négatifs sur l’environnement que leurs équivalents neufs et coûtent jusqu’à 75% moins cher. Toutefois, comme nous le rappelions dans notre article sur les téléphones reconditionnés, attention à ne pas en faire un prétexte à la surconsommation. Mieux vaut garder longtemps un appareil conçu pour durer que changer trop fréquemment de smartphone, même reconditionné.
Autre point négatif, le reconditionné fait encore beaucoup de déçu·es : écran de mauvaise qualité, batterie défectueuse, état non conforme à la description, anomalies logicielles… Pour s’y retrouver, Que Choisir a évalué les différents vendeurs de téléphones reconditionnés. L’association Green It milite de son côté pour la création d’un «contrôle technique» pour les équipements numériques de seconde main : «Sur la même idée que les contrôles techniques réalisés sur les véhicules, cela créerait un contrat de confiance avec le consommateur. Nous avons poussé l’idée auprès des pouvoirs publics, mais ils ne s’en sont malheureusement pas saisis», regrette Frédéric Bordage.
Que faire en tant que consommateur ?
Si la responsabilité environnementale incombe avant tout aux constructeurs, les consommateur·ices ont aussi un rôle à jouer, en conservant leur téléphone le plus longtemps possible. «Un smartphone durable, c’est aussi celui que l’utilisateur respecte», souligne Frédéric Bordage. L’expert recommande donc d’équiper son appareil d’une coque ou d’un étui rabattable, et de coller sur l’écran une vitre de protection.
Bien que le prix de la réparation puisse être un frein, celle-ci est à privilégier en cas de casse, avant d’envisager l’achat d’un produit neuf ou reconditionné.
Enfin, attention à ne pas laisser dormir les anciens modèles dans les tiroirs. Selon le baromètre du numérique 2025 du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc), 52% des utilisateur·ices conservent leur ancien smartphone au lieu de le recycler ou de l’envoyer dans les circuits du reconditionné. Autant d’appareils qui pourraient connaître une seconde vie.
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