Label Vert

Comment choisir des chaussures de running plus écologiques ? Matières «biosourcées», label B Corp… on vous aide à y voir plus clair

Running gage. Les ventes de chaussures de running explosent, mais l’industrie n’a pas encore pris le tournant écologique. Quelle paire choisir et vers quelles marques se tourner ? On fait le point.
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La course à pied a conquis le cœur des Français·es. L’année dernière, l’Observatoire du running de l’Union Sport Cycle (USC) comptabilisait 12,4 millions de coureur·ses dans l’Hexagone, ce qui fait du running le quatrième sport le plus pratiqué en France.

Cet article est issu de la série Label Vert, une collaboration entre Vert et Que Choisir.
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Label Vert - une collaboration

Une popularité qui s’explique en partie par le peu de matériel nécessaire, l’investissement se résumant souvent à l’achat de chaussures. Toujours selon l’Observatoire du running, neuf millions de paires ont été vendues en 2024, pour un panier moyen de 131 euros. Un business juteux : le marché du running était estimé à 1,2 milliard d’euros l’année dernière en France, d’après l’USC.

C’est quoi le problème ?

Cet engouement sportif n’est pas sans conséquence pour la planète. Comme tout produit, les chaussures de sport ont un impact carbone. Selon l’Agence de la transition écologique (Ademe), celui-ci s’élève à 20,1 kilogrammes (kg) d’équivalent dioxyde de carbone (CO2) par paire sur l’ensemble de son cycle de vie. À l’échelle mondiale, l’empreinte carbone annuelle du secteur atteignait déjà 174 millions de tonnes de CO2 en 2012, selon une étude du Massachusetts Institute of Technology (MIT), la plus complète à ce jour.

C’est surtout pendant la fabrication que les émissions sont les plus fortes. «Le type d’énergie utilisé dans l’usine de production a un impact considérable sur l’empreinte carbone d’une chaussure. Si l’entreprise utilise des énergies renouvelables ou dispose plus globalement d’une politique RSE [Responsabilité sociétale des entreprises, NDLR], c’est évidemment mieux», explique Emily Spiesser, du service consommation responsable de l’Ademe. Problème, la majorité des chaussures proviennent de Chine, d’Inde, du Vietnam et de Thaïlande, des pays encore fortement dépendants du charbon, une énergie fossile très émettrice.

Qui a la paire de chaussures la plus écolo ? Pas toujours facile de s’y retrouver… © Adobe Stock

Une partie de l’empreinte environnementale est aussi liée aux matières utilisées pour la fabrication, pour 67% issues de la pétrochimie (nylon, polyester, polyuréthane, EVA, TPU). Par ailleurs, l’accumulation de matières – jusqu’à 26 différentes pour certains modèles – et l’utilisation de colles rendent impossible le recyclage des baskets.

En outre, plusieurs marques leaders du secteur, comme Nike, Adidas ou encore le français Decathlon, ont été accusées ces dernières années de travailler avec des sous-traitants ne respectant pas les droits humains : travail forcé (notamment de la minorité musulmane ouïgoure en Chine), salaires dérisoires, cadences infernales et non paiement de salaires. Adidas nie ses liens avec les sous-traitants impliqués, et Nike comme Decathon assurent respecter les normes internationales du travail fixées par l’Organisation internationale du travail (OIT).

Des chaussures écologiques, c’est possible ?

Depuis quelques années, on assiste à un boom des matières végétales, animales ou à base de champignons – dites biosourcées –, utilisées pour remplacer, en partie, celles issues des hydrocarbures. Une solution intéressante à développer, mais pas miraculeuse, nuance Emily Spiesser : «Biosourcé veut dire issu de la biomasse, maïs, fibres de bois… Ces matières permettent de réduire l’empreinte carbone d’un produit, mais elles ne sont pas forcément plus vertueuses pour l’environnement. Il faut regarder leur impact global, sur la biodiversité, l’eau, etc.» Pour être respectueuses de l’environnement, les matières biosourcées doivent être solides et résister à l’usure, provenir de forêts gérées durablement et nécessiter une quantité d’eau limitée pour leur production.

Certains modèles de chaussures intègrent aussi des matières recyclées. Un point positif pour l’experte de l’Ademe, même en petite quantité : «En utilisant moins de matière vierge pour confectionner le produit, on fait de réelles économies d’énergie. Et cela permet la réduction globale des déchets.» Enfin, Emily Spiesser conseille de se tourner vers des baskets légères et minimalistes, utilisant peu de matières différentes : «Cela signifie moins de matériaux de base, un poids moins important pour le transport et un meilleur recyclage en fin de vie.»

Quelles marques font des efforts ?

Les marques sont nombreuses à afficher leur engagement environnemental, mais ces déclarations sont difficiles à vérifier. Pour y voir plus clair, il peut être intéressant de se tourner vers les labels. Certifiées B Corp, les marques Circle Sportswear, Veja et Allbirds doivent répondre à des normes strictes de performance sociale et environnementale, de responsabilité et de transparence. Plutôt confidentielles, ces marques proposent des modèles de running pour foulée neutre, à des prix un peu plus élevés que la moyenne (entre 140 et 180 euros).

D’autres enseignes plus populaires dans la communauté ont décroché le label Bluesign : Asics, Adidas, Brooks et Salomon. Celui-ci garantit l’absence de substances toxiques et impose des critères contraignants en matière de consommation d’énergie et d’eau. À noter que, pour l’Ademe, le seul label vraiment ambitieux pour les chaussures est l’Ecolabel européen, qu’aucune marque de running n’a encore obtenu.

Attention enfin au marketing agressif, qui pousse à la surconsommation : «Certaines marques sortent une nouvelle version de leurs modèles phares chaque année, avec des changements très mineurs. Les vraies innovations technologiques arrivent plutôt tous les quatre à cinq ans», souligne Kevin Le Gall, fondateur du site spécialisé Chaussure running lab.

Que faire en tant que consommateur·ice ?

En plus de privilégier des chaussures robustes, minimalistes et comportant des matières biosourcées et recyclées, Emily Spiesser recommande d’être attentif au mode d’envoi : «Quand on commande sur internet un produit qui vient de loin, il vaut mieux privilégier un envoi lent. Si c’est rapide, ça signifie souvent un acheminement en avion.»

Mais le geste le plus efficace reste de faire durer ses chaussures. L’empreinte carbone d’une paire tombe à 10,1 kg d’équivalent CO2 si elle est conservée deux ans. Un enjeu majeur, alors que les coureur·ses changent de baskets tous les 11 mois en moyenne. «La durée de vie d’une paire dépend de nombreux facteurs : utilisation, poids, foulée… Mais, en moyenne, on peut courir entre 500 et 1 000 kilomètres avant que l’amorti ne s’affaisse», estime Kevin Le Gall. Il recommande aussi de ne pas céder à toutes les modes : «En ce moment, les chaussures à plaque carbone sont très populaires, mais elles coûtent cher et durent beaucoup moins longtemps. Elles sont conçues pour la performance, donc pas adaptées à tous.»

Pour prolonger la durée de vie de nos souliers, quelques règles d’entretien s’appliquent : les conserver dans un endroit sec, à l’abri des températures extrêmes et les utiliser régulièrement.

Les paires usées se déposent dans les conteneurs à vêtements, où elles seront revalorisées ou jetées. Certaines peuvent même être raccommodées : le bonus réparation peut alors être mobilisé. Ce dispositif national mis en place depuis 2022 permet de déduire directement une partie du montant de la facture lors d’une réparation (textiles, chaussures, appareils du quotidien) chez un artisan agréé.

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