L'hebdo

Les financiers à l’amende

Chères toutes et chers tous,

La semaine prochaine et jusqu'à la mi-novembre, nous bousculons notre format classique pour passer en édition spéciale COP26. Nous espérons que cela vous plaira.

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L’appétit des financiers pour les fossiles ne cesse de grossir et c’est le climat qui trinque. 


COP26 : les cases à cocher pour pouvoir parler de « succès »

La 26è conférence de l’ONU (COP26) sur le climat, qui débute dimanche à Glasgow (Royaume-Uni), doit donner chair à l'Accord de Paris de 2015. Tour d’horizon de ce qui permettrait d’en faire une réussite.

Cinq ans (plus une année blanche en raison du Covid) après la COP21 de Paris, les leaders devront avant tout montrer qu'ils tiennent leur promesse de maintenir le réchauffement climatique « nettement en-dessous de 2°C » par rapport à l'ère pré-industrielle, objectif de l’Accord de Paris. L'outil principal pour s'en assurer porte le nom de Contributions déterminées au niveau national (ou NDCs), sorte de feuilles de route climatiques que les pays doivent réactualiser au moins tous les cinq ans. Or celles-ci constituent, en l'état, « un aller simple vers le désastre » selon le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. Dans un bilan paru mardi, l'organisation constate que seuls 121 des 191 signataires ont mis à jour leur NDC, plaçant la planète sur une trajectoire de +2,7°C d’ici la fin du siècle.

Les nouvelles NDCs qui seront présentées, notamment par les plus gros émetteurs, seront scrutées de près, alors que le suspens est toujours total du côté de l'Inde, la Turquie ou l'Arabie Saoudite. Dès ce week-end, les regards seront tournés vers Milan (Italie) où se tient le sommet du G20. Les 20 pays les plus riches totalisent à eux seuls 80% des émissions de gaz à effet de serre. Les annonces de mesures ambitieuses mettraient la COP sur de bons rails. Mais l'agenda est pollué par les tensions entre les Etats-Unis et la Chine, ainsi que les crises conjuguées du Covid et de l'énergie (Vert).

Alok Sharma, président britannique de la COP26 © Stefan Guidi / AFP

Autre sujet crucial : la mobilisation de financements publics et privés pour aider les pays du sud à s'adapter au changement climatique. Ces derniers arrivent à la COP écœurés par le manque de solidarité internationale, alors que de nombreuses délégations ont eu toutes les peines du monde à présenter un schéma vaccinal complet. Dans ce contexte, le transfert de 100 milliards de dollars annuels entre 2020 et 2025 promis il y a plus de dix ans est « une promesse totémique, un enjeu de confiance », a averti le président de la COP26 Alok Sharma lors de son allocution à l'Unesco le 12 octobre. Les dernières évaluations montrent que l'objectif ne sera atteint qu'en 2023.

Enfin, les négociateur·rice·s auront pour mandat de discuter des points techniques mais cruciaux de l'Accord de Paris comme la création d'un marché mondial du carbone, qui permettrait aux pays de s'échanger des quotas d'émissions de CO2, ou l'application d'un cadre de transparence renforcé pour mieux vérifier la réalité des engagements nationaux.

· L'enquête publique concernant le projet de centre de stockage de déchets radioactifs Cigéo à Bure (Meuse) s'est achevée samedi dernier. Si ses conclusions, attendues d'ici 30 jours, sont favorables, le projet sera déclaré d'utilité publique. Pour la clôture de l'enquête, des militant·e·s anti-Cigéo se sont réuni·e·s pour dénoncer le projet et le manque de transparence de la consultation publique menée. - France 3 Grand Est

· Mardi, le gouvernement australien a annoncé qu'il viserait la neutralité carbone en 2050 (ABC news) – c'est-à-dire qu'à cette date, les dernières émissions de CO2 devront être compensées. Mais le premier ministre Scott Morrison s'est refusé à inscrire cet objectif dans la loi et compte essentiellement sur l'achat de droits à polluer pour y parvenir. Parmi les premiers producteurs de charbon au monde, l'Australie fait toujours figure de cancre mondial du climat, comme Vert l'avait raconté

· Mardi encore, EDF comparaissait devant la justice française pour non-conformité à ses obligations de vigilance. La filiale mexicaine de l’entreprise est accusée d’avoir influencé l’opinion de membres d’une communauté autochtone de l’État de Oaxaca, au sud du pays, afin d’obtenir la construction d’un grand projet éolien. Dans une tribune du Monde, quatre eurodéputé·e·s français·es demandent à l’État de prendre position pour s’assurer qu’EDF, détenue à 83% par la France, ne se cache pas « derrière l’impératif de la transition pour outrepasser les droits humains ». - Le Monde

· Jeudi, la Chine a enfin mis à jour ses objectifs climatiques en publiant sa nouvelle contribution déterminée au niveau national (NDC). Le pays prévoit d’atteindre son pic d’émissions avant 2030, puis la neutralité carbone pour 2060. La Chine s’engage à réduire son intensité carbone (ses émissions de CO2 rapportées à son PIB) de plus de 65% d’ici 2030, par rapport à 2005. Des engagements qui étaient très attendus, à trois jours du début de la COP26, car la Chine est responsable de plus d’un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre. - Le Monde (AFP)

· Jeudi encore, l’association de défense des animaux L214 a mis au jour de « graves carences » dans un abattoir Bigard à Cuiseaux (Saône-et-Loire). Un enquêteur de L214 est parvenu à se faire embaucher dans les services vétérinaires de l’abattoir sans expérience ni formation. Il y a constaté de nombreuses infractions et des manquements dans le contrôle des règles sanitaires. Dans un communiqué, le ministère de l’Agriculture explique avoir « ordonné une enquête approfondie des pratiques de cet abattoir » après des « non-conformités manifestes ». - Le Huffington Post

 © Vincent Plagniol / Les Amis de la Terre

Désobéissance fossile. Mardi, une vingtaine d’activistes d’Alternatiba Paris et des Amis de la Terre ont paralysé le Climate Finance Day pendant plus de deux heures. À l’issue du discours du ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, des militant·e·s se sont versé de la mélasse sur la tête pour dénoncer les investissements des entreprises dans les hydrocarbures tandis qu’une trentaine de petites alarmes installées par les ONG retentissaient dans la salle. Leur objectif : « que l’État réagisse enfin au financement croissant des énergies fossiles par les acteurs privés », a indiqué à Vert Lorette Philippot, porte-parole des Amis de la Terre. Dix militant·e·s ont finalement été placé·e·s en garde à vue pendant 24 heures et ont écopé d'un rappel à la loi pour avoir dégradé la moquette de la salle. Reportage au Climate Finance Day à lire sur le site de Vert.

· C'est odieux. La concentration de dioxyde de carbone (CO2) dans l'atmosphère a atteint 413,2 parties par million (ppm) en 2020, un nouveau recorda annoncé l'Organisation météorologique mondiale (OMM) lundi. Il y a désormais 149% de plus de CO2 dans l'atmosphère qu'à l'ère préindustrielle (milieu des années 1800) où ce chiffre était de 278 ppm. Une telle teneur a déjà été atteinte il y a 3 à 5 millions d’années : « la température était alors de 2 à 3 °C plus élevée et le niveau de la mer excédait de 10 à 20 mètres le niveau actuel », a alerté Petteri Taalas, secrétaire général de l'OMM.

· Le compte n’y est pas. Les États doivent multiplier leurs efforts par sept pour espérer contenir le réchauffement climatique à 1,5°C d’ici à 2100, a alerté l’ONU mardi dans un rapport. S’ils étaient atteints, les nouveaux objectifs climatiques déposés par les États en amont de la COP26 mettraient le monde sur la voie d’un réchauffement d’au moins 2,7°C d’ici 2100. « Nous sommes très loin de là où nous devrions être », alerte Anne Ohloff, l'une des autrices de l’étude. - Libération (AFP)

· On touche les fonds. Seuls 0,5% des actifs placés dans des fonds d’investissement mondiaux sont alignés avec les objectifs de l’Accord de Paris sur le climatselon une étude publiée mercredi par le Carbon disclosure project (CDP). L’association a scanné les portefeuilles d’investissement de 16 500 fonds, ce qui représente 27  000 milliards de dollars. 62% des actifs analysés correspondent à une hausse de +2,75 degrés d’ici à 2100.

Emmanuel Macron en plein discours lors du Congrès mondial de la nature de l'UICN (Union international pour la conservation de la nature), à Marseille, en septembre 2021. © Ludovic Marin / AFP

Le président est sur liste rouge. De discours en sommets, Emmanuel Macron se présente volontiers en champion de la biodiversité. Chasse, pesticides, bétonisation... Hélas, le bilan de son quinquennat finissant raconte une toute autre histoire. Pour vous aider à y voir plus clair, nous avons décrypté l'impact de son mandat sur le vivant

· Qui part à la chasse... Pour la deuxième fois en trois mois, le Conseil d'État a suspendu lundi les arrêtés ministériels qui autorisaient certaines méthodes traditionnelles de chasse des oiseaux. Après la première annulation en août, le gouvernement a promulgué des textes quasiment identiques la semaine dernière, aussitôt retoqués. Selon la Ligue de protection des oiseaux, ces chasses traditionnelles pourraient tuer plus de 110 000 volatiles. - Vert

· C’était trop bette. Arrêté en 2019 faute de clients et d’investissements, le « train des primeurs » qui alimente le marché de Rungis depuis le sud du Midi a enfin repris du service, le week-end dernier. Les cinq liaisons hebdomadaires devraient éviter le passage de 26 000 camions sur les routes qui relient Perpignan à Paris. Le fret ferroviaire ne représente plus que 9% du transport de marchandises mais le gouvernement s’est engagé à atteindre 18% d’ici 2030. - Vert

· Pour que le train décolle. Un tiers des liaisons aériennes les plus fréquentées en Europe pourraient aisément être remplacées par des trajets en trainselon une étude commandée par Greenpeace. L’ONG appelle les États et les institutions européennes à supprimer les lignes lorsque le même trajet est faisable en moins de six heures de train. Une proposition qui permettrait selon ses calculs d’économiser 3,5 millions de tonnes d’équivalent CO2 par an. - Vert

Ophélie Damblé, guérillera verte au nom de Ta mère nature

Prenons-en de la graine. Connue sur les réseaux sociaux sous le pseudonyme de Ta mère nature, Ophélie Damblé a lancé sa chaîne YouTube il y a quatre ans, au moment où elle quittait son travail de publiciste pour se former à l'agriculture. Après avoir vécu dans des écolieux partout en France, elle est revenue à la ville pour y retrouver une plus grande diversité humaine et y amener la nature. Elle raconte à Vert ses influences punks et féministes et sa « guérilla green » qui veut réensauvager la ville. Portrait d'une agricultrice urbaine pleine de volonté et d'autodérision à lire sur vert.eco.

Ophélie Damblé © Juliette Quef / Vert

D’ivoire et de sang

Sang façon.

Dans D’Ivoire et de sang, roman de l’Indo-américaine Tania James, trois voix – l’éléphant, le braconnier et la cinéaste – font résonner la lutte à mort pour l’ivoire dans une langue simple et imagée.

2050, le Far west à Paris

Et un, et deux, et trois degrés. Sur la base des dernières prévisions du Giec (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat), les équipes d’Envoyé Spécial ont tenté d’imaginer à quoi pourrait ressembler la vie en France en 2050. Restrictions d’eau, mer impropre à la baignade à cause d’espèces invasives, nuits à plus de 30 degrés : le reportage est entrecoupé de pastilles vidéos qui anticipent ce que sera la France à 50 degrés. Pour ne pas nous plonger dans l’éco-anxiété, Envoyé spécial explore également les manières dont nos corps et nos vies pourront s’adapter à ce nouveau climat.

© Envoyé spécial

+ Mathilde Doiezie, Loup Espargilière, Anne-Claire Poirier et Juliette Quef ont contribué à ce numéro