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Hausse des prix de l’énergie : un défi social et climatique

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Watt the f**k ! Avec le rebond de l’ac­tiv­ité économique, les marchés de l’én­ergie sont en sur­chauffe. Pile, cela favorise la baisse des con­som­ma­tions et la tran­si­tion vers les éner­gies renou­ve­lables. Face, les plus pré­caires auront impéra­tive­ment besoin d’aide pour pay­er leurs fac­tures.

Sur la bourse européenne de l’én­ergie, les indices s’af­fo­lent. Depuis le début de l’an­née, le prix du gaz s’est envolé de 300% et l’élec­tric­ité de presque 100%. De mémoire de trad­er, on n’avait jamais vu ça ! Les ingré­di­ents de ce cock­tail explosif sont nom­breux mais le plus piquant est sans con­teste le covid-19. En met­tant l’é­conomie mon­di­ale à l’ar­rêt, le virus a fait dégringol­er la demande de gaz, plom­bant les prix et donc la pro­duc­tion. Et c’est exacte­ment l’in­verse qui se réalise aujour­d’hui alors que l’ac­tiv­ité économique rebon­dit plus vite que la pro­duc­tion. Les prix du gaz qui explosent ont mécanique­ment un impact sur les prix de l’élec­tric­ité car celui-ci est aus­si util­isé pour pro­duire de l’élec­tric­ité dans de nom­breux pays d’Eu­rope.

Mais un deux­ième ingré­di­ent a créé la sur­prise ces dernières semaines : l’aug­men­ta­tion ful­gu­rante du prix du CO2 sur le marché européen du car­bone. Dans ce sys­tème érigé en 2005 par l’Union européenne, quelque 500 entre­pris­es par­mi les plus pol­lu­antes d’Eu­rope s’échangent des droits à pol­luer pour respecter leurs oblig­a­tions envi­ron­nemen­tales (les plus vertueuses ven­dant leurs quo­tas à celles qui dépassent leurs objec­tifs). Or, la présen­ta­tion, en juil­let dernier, des nou­velles mesures cli­ma­tiques pro­posées dans le cadre du paquet européen « fit for 55 » (Vert) a fait bondir le prix de la tonne de CO2, de 25 euros fin 2020 à 60 euros aujour­d’hui. La pro­duc­tion d’én­ergie fos­sile, telle que le gaz, s’en trou­ve forte­ment renchérie.

Une cen­trale au gaz en Rhé­nanie-du-Nord-West­phalie © pxfu­el

Si elle se pro­longe, cette logique de prix fort peut accélér­er la tran­si­tion écologique en cours. L’én­ergie chère encour­age les baiss­es de con­som­ma­tion. Dans le cas des entre­pris­es notam­ment, la mise en œuvre de travaux par­fois coû­teux des­tinés à réduire les con­som­ma­tions se révèle plus intéres­sante si l’én­ergie économisée est coû­teuse. D’autre part, la hausse du prix du CO2 favorise la pro­duc­tion d’én­er­gies renou­ve­lables.

Mais sans inter­ven­tion de l’É­tat, cette hausse des prix de l’én­ergie peut s’avér­er sociale­ment explo­sive car elle pénalis­era les ménages les plus mod­estes. En France, le tarif régle­men­té du gaz fixé par l’É­tat a déjà aug­men­té à trois repris­es depuis juil­let dernier, de 10% puis 5% et enfin 8,7%. Le tarif régle­men­té de l’élec­tric­ité, qui évoluera en début d’an­née prochaine, devrait lui aus­si aug­menter, d’au moins 10% selon les experts. Le gou­verne­ment a décidé la semaine dernière de dis­tribuer un chèque énergie de 100 euros pour aider les 5,8 mil­lions de foy­ers les plus mod­estes à pay­er leur fac­ture. Mais la hausse des prix de l’én­ergie devrait aus­si se réper­cuter sur l’ensem­ble des biens de con­som­ma­tion et il fau­dra prob­a­ble­ment d’autres mesures pour accom­pa­g­n­er les plus mod­estes.