Décryptage

Contamination du chocolat au cadmium : pourquoi le bio est-il plus touché ?

Pas bio à voir. Une enquête du magazine UFC-Que Choisir révèle que de nombreuses tablettes de chocolat bio contiennent plus de cadmium – un métal toxique – que leurs équivalents conventionnels. On vous explique.
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Voilà plusieurs mois que les accros au chocolat le savent : leur douceur favorite figure parmi les aliments les plus contaminés par le cadmium – un métal lourd, toxique pour l’organisme (associé à des risques rénaux, des troubles de la reproduction, et une fragilité osseuse pouvant entraîner de l’ostéoporose) que l’on retrouve aussi dans les abats, les coquillages… mais également dans des produits céréaliers très consommés par les enfants (pain, pâtes, céréales, etc.).

Le cadmium, présent notamment dans les engrais phosphatés utilisés en agriculture, est absorbé par les plantes cultivées sur des sols contaminés. Résultat : il se retrouve dans notre alimentation, parfois à des niveaux préoccupants.

Dans une enquête publiée ce jeudi, le magazine UFC-Que Choisir révèle que, paradoxalement, le chocolat issu de l’agriculture biologique est bien plus concerné par cette contamination que le chocolat «conventionnel».

L’association de consommateur·ices a passé au crible une quarantaine de produits contenant du chocolat, des tablettes Nestlé aux céréales Chocapic. En tête du classement des produits les plus contaminés : la tablette «Ethiquable Pérou 70%», qui contient à elle seule 35% de la dose maximale quotidienne de cadmium fixée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (ANSES) pour 20 grammes de chocolat consommés. Elle est suivie par la tablette bio «Kaoka noir 70% de cacao», puis par «Alter Eco 75% du Pérou». Sur les dix tablettes qui contiennent le plus de cadmium, neuf sont bio.

Même tendance côté biscuits : les «Bjorg fourrés au chocolat noir» atteignent 8% de la dose maximale journalière, contre 3% pour les «Prince» ou les «Kinder». Et pour les céréales, les «Bjorg granola au chocolat bio» affichent aussi un taux plus élevé de cadmium que les «Trésor» de Kellogg’s (8% contre 3%).

À première vue, cela peut sembler paradoxal. Le chocolat bio, souvent issu de filières plus éthiques – qui respectent notamment davantage l’environnement – serait plus mauvais pour la santé ? Une étude parue en 2014 dans le British Journal of Nutrition indiquait pourtant que les aliments bio contenaient en moyenne 48% moins de cadmium que les aliments conventionnels. Et pour cause : l’agriculture biologique interdit l’usage d’engrais phosphatés riches en ce métal.

Une question… de géographie

«Les fèves de cacao bio viennent principalement d’Amérique latine, où, dans certaines zones de production, les sols sont naturellement riches en cadmium», explique Charles Pernin, délégué général du Synabio (le syndicat national des entreprises agroalimentaires bio), à l’UFC.

Comme le rappelait également Vert dans un précédent article, cette contamination peut aussi venir des sols eux-mêmes – indépendamment des pratiques agricoles. C’est notamment le cas des sols volcaniques que l’on trouve en Équateur, au Pérou ou encore en Colombie, et qui sont particulièrement riches en ce métal lourd. Contrairement au cacao conventionnel, qui vient principalement de Côte d’Ivoire, le cacao bio est souvent originaire de ces pays-là (Pérou, Équateur, République dominicaine…).

Doit-on, dans ce contexte, abandonner le chocolat bio ? «Il ne faut pas oublier les avantages de ce label par rapport à la culture conventionnelle du cacao, qui emploie des engrais et des additifs de synthèse», réagit Charles Pernin auprès de l’UFC. Par ailleurs, «le cacao bio est aussi souvent issu de filières équitables».

Privilégier le chocolat éthique

En France, la majeure partie du cacao que nous consommons ne répond pas à des exigences sociales et environnementales. Les grands producteurs (Nestlé, Mars, Ferrero) achètent généralement du cacao à prix très bas auprès de planteurs ivoiriens (la Côte d’Ivoire est le principal pays producteur à l’échelle mondiale) qui vivent sous le seuil de pauvreté, avec moins de 1,20 dollar par jour selon la Banque Mondiale. Dans le pays, 80% des forêts ont été rasées en soixante ans, et la culture de cacao contribue largement à cette déforestation.

Lorsque la tablette de chocolat est certifiée bio, ce label s’accompagne souvent du label «commerce équitable» : cela signifie que le produit répond à certaines normes environnementales (aucun produit chimique n’a été utilisé dans les champs de cacao), mais aussi sociales : le label garantit une juste rémunération des producteur·ices.

L’idéal, si l’on souhaite concilier santé individuelle d’un côté et protection de l’environnement, des travailleur·ses agricoles et des populations locales de l’autre, c’est ainsi de «privilégier le chocolat bio dont les fèves ne sont pas importées d’Amérique latine, mais plutôt d’Afrique de l’Ouest, ou d’Asie du Sud-Est», explique la Présidente de l’UFC Que Choisir Amandine Stevenin, jointe par Vert. Elle cite en exemple la tablette de chocolat bio Naturalia, «qui elle, est plus de deux fois moins chargée en cadmium que la tablette “Éthiquable” du Pérou.»

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