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Le projet de loi d’accélération du nucléaire arrive dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale

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Le chantier peut déput­er. Le texte vise à faciliter l’autorisation de nou­veaux réac­teurs, mais il com­porte aus­si plusieurs mesures pour con­forter l’hégémonie du nucléaire dans le mix élec­trique. Et ce, avant même le débat par­lemen­taire sur la pro­gram­ma­tion pluri­an­nuelle de l’énergie, qui doit fix­er les ori­en­ta­tions du pays en la matière.

Après le Sénat en jan­vi­er, l’Assemblée nationale entame aujourd’hui l’examen, en séance plénière, du pro­jet de loi dédié à l’accélération du nucléaire. Présen­té comme l’autre ver­sant de la loi sur l’accélération des éner­gies renou­ve­lables (pro­mul­guée ce week-end), le texte com­prend plusieurs dis­po­si­tions tech­niques des­tinées à rac­cour­cir les procé­dures, comme le fait de juger les recours con­tentieux directe­ment au Con­seil d’État. Le but affiché du gou­verne­ment est d’autoriser les nou­veaux pro­jets de réac­teurs en moins de cinq ans.

Ajoutées en cours de route, d’autres mesures cristallisent l’attention. Amendé par le Sénat, le texte prévoit désor­mais de sup­primer l’objectif de réduire la part du nucléaire à 50 % de la pro­duc­tion élec­trique française et d’éliminer le pla­fond de 63 gigawatts de puis­sance pour le parc nucléaire instal­lé. Datant de la loi de tran­si­tion énergé­tique de 2015, ces mesures visaient à réduire l’hégémonie de l’atome dans le mix élec­trique. Env­i­ron 70 % de l’électricité con­som­mée en France vient du nucléaire aujourd’hui, ce qui peut con­stituer une source de vul­néra­bil­ité lorsque le parc ren­con­tre des prob­lèmes de disponi­bil­ité, comme c’est le cas actuelle­ment.

Le présent pro­jet de loi devait seule­ment accélér­er les procé­dures. Or, avec ces nou­velles mesures, il prend de l’a­vance sur la nou­velle pro­gram­ma­tion pluri­an­nuelle de l’én­ergie (PPE), qui doit fix­er les ori­en­ta­tions du pays en la matière, après un débat par­lemen­taire qui se tien­dra au sec­ond semes­tre.

En out­re, les par­lemen­taires et le gou­verne­ment se sont entendu·es pour dur­cir les peines pour toute per­son­ne ou asso­ci­a­tion qui ten­terait de s’introduire dans une cen­trale. Il est ain­si prévu de dou­bler les peines pécu­ni­aires et de tripler la peine d’emprisonnement, pas­sant d’un an à trois ans. Un aver­tisse­ment à peine masqué aux militant·es de Green­peace qui, en octo­bre 2017, avaient tiré des feux d’artifice depuis l’intérieur de la cen­trale de Cat­tenom (Moselle) pour en dénon­cer les failles de sécu­rité.

La propo­si­tion qui soulève le plus de protes­ta­tions est sans con­teste le pro­jet de réforme sur­prise de la sûreté nucléaire : le gou­verne­ment pro­jette désor­mais de dis­soudre l’Institut de radio­pro­tec­tion et de sûreté nucléaire (IRSN) dans l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), faisant crain­dre une mise au pas du secteur. La réforme, quoique majeure, s’est invitée dans le pro­jet de loi il y a 15 jours, via deux amende­ments gou­verne­men­taux. Elle n’a fait l’objet ni d’un diag­nos­tic ini­tial, ni d’une étude d’impacts ; de quoi scan­dalis­er une bonne par­tie des expert·es et jusque dans les rangs de la majorité.