L'hebdo

Ils nous (méga) bassinent !

Chères toutes et chers tous,

Après l'échec de la COP26, quelle place pour la justice climatique au XXIème siècle ? Jeudi 25 novembre, nous tenterons de répondre à cette vaste question lors d'un débat qui se tiendra à la médiathèque Marguerite Yourcenar, dans le 15 arrondissement de Paris. Nous aurons le plaisir de nous entretenir avec Marine Calmet, présidente de Wild legal, une ONG qui veut redonner des droits à la nature ; Fanny Petitbon, responsable du plaidoyer à l'ONG Care France qui a suivi les négociations de la COP26 et Marie Cohuet, désobéissante et activiste pour Alternatiba, infiltrée au défilé Louis Vuitton en octobre dernier. Nous vous attendons nombreuses et nombreux à cette rencontre « en présentiel » ! Vous trouverez toutes les informations ici.

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Alors que l'action pour le climat est toujours aussi timide, on continue de détruire forêts, mangroves et autres zones humides.


Dans les Deux-Sèvres, les « méga-bassines » deviennent le symbole à détruire de l’agriculture industrielle

Depuis plusieurs semaines, les opposants à la construction de 16 futures « méga-bassines » - aberrations écologiques destinées à irriguer les terres agricoles - ont réussi leur pari de porter ce conflit à l’échelle nationale.

Sur un bassin versant de la Sèvre niortaise, artère majeure du Marais Poitevin, la Coopérative de l’eau 79 entend construire 16 nouvelles « réserves de substitutions ». En moyenne, celles-ci seront grandes comme dix terrains de football et creusées dans le sol jusqu’à 15 mètres de profondeur. Grâce à un système de pompage des nappes phréatiques, 12,7 millions de m3 d’eau y seront stockés au cours de l’année. En tout, 93 nouvelles bassines doivent voir le jour sur l’ensemble de l’ex-région Poitou-Charentes.

Pour ses défenseurs, ce modèle est le seul à pouvoir « sécuriser les approvisionnements en eau des exploitants agricoles » alors que se multiplient les sécheresses. De leur côté, les opposant·e·s dénoncent une politique « d’accaparement d’un bien commun au service d’une minorité d’agriculteurs », en particulier les producteurs de maïs, monoculture dominante dans la région. Cette captation d'eau entre en concurrence avec la biodiversité locale et avec les agriculteurs : « je vois nettement l’assèchement quand ils ont pompé la nappe en hiver », dénonce Etienne Gautreau, agriculteur bio. Certain·e·s n'hésitent plus à parler d'une « guerre de l'eau ».

Lors de la manifestation du 6 novembre, des militant·e·s ont mis le feu à une bassine. © Enzo Dubesset / Vert

Le 6 novembre dernier, près de 3 000 militants (moitié moins, selon la préfecture) ont convergé de toute la France vers Mauzé-sur-le-Mignon, petit bourg rural du sud des Deux-Sèvres. Répondant à l'appel de quatre organisations – la Confédération paysanne, le collectif local Bassines non Merci, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) et les Soulèvements de la terre - elles et ils y ont clamé leur opposition aux « méga-bassines ».

Un cortège familial et festif s’est élancé tranquillement dans le village, mais les échauffourées avec les forces de l’ordre ne se sont pas fait attendre. Des manifestant·e·s se sont retrouvé·e·s sur le site d'une bassine en état de marche. Sous le regard impuissant des gendarmes, dont trois d’entre eux ont été blessés, l’ouvrage a été débâché, tagué et en partie incendié. Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne s'est réjoui d’une « pleine et éclatante victoire » avant d’appeler à « l’abandon de l’ensemble des projets de méga-bassines ». Au même moment, le syndicat agricole majoritaire (FNSEA), et d'autres organisaient une contre-manifestation au bord d'une autre bassine, en chantier.

Le 27 mai dernier, 9 des 16 bassines ont été jugées illégales par le tribunal administratif de Poitiers, en raison de leur taille excessive. Estimant que l’ensemble des projets devraient être condamnés, les collectifs d’opposants ont fait appel de cette décision et le mouvement grossit depuis lors.

Un reportage à lire en intégralité sur vert.eco

· Lundi, des activistes d'Extinction rebellion se sont enchaîné·e·s à des arbres pour empêcher le lancement des travaux de la future retenue d'eau de la Clusaz (Haute-Savoie). Celle-ci doit permettre de stocker de quoi alimenter les canons pour continuer d'enneiger les pistes de ski malgré le réchauffement climatique. Le préfet doit encore décider de l'utilité publique – ou non – de ce projet. - France 3 Haute-Savoie

· Mardi matin, des militant·es de Greenpeace France ont bloqué un centre de stockage de déchets radioactifs d'où partent des convois d'uranium usé vers la Sibérie. Elles et ils cherchaient à perturber le chargement d'un train avec de l'uranium usé (ou uranium de retraitement), dont le contenu doit être envoyé en Russie après un transfert par Dunkerque. L'ONG dénonce la reprise de ces exportations, qui avaient été interrompues en 2010 à l'issue d'une campagne de mobilisation déjà menée par l'organisation. - Vert

· Mercredi, la commission européenne a dévoilé une proposition de règlement pour lutter contre la « déforestation importée » : la destruction de forêts provoquée par l'importation de produits destinés au marché européen. Un mécanisme de « devoir de vigilance » devrait permettre de n'autoriser sur le marché que des produits qui n'ont pas contribué à la destruction ou à la dégradation de forêts. Parmi eux : le bœuf, le bois, l’huile de palme, le soja, le café, le cacao, ainsi que des produits dérivés, comme le chocolat ou les meubles. Mais certains autres manquent à l'appel, dont le caoutchouc, les autres animaux à viande, le maïs, ou le sucre. Par ailleurs, il reste très difficile de s'assurer la traçabilité de nombreux produits en provenance de pays comme le Brésil, où les règles sont plus légères qu'en Europe. Le projet de règlement doit être examiné par le Parlement et le Conseil en janvier 2022. - Actu-environnement (abonnés)

· Jeudi, après un vote du Sénat, le Parlement français a définitivement adopté la proposition de loi de la majorité sur la maltraitance animale. Parmi ses dispositions : l'adoption d'un animal de compagnie nécessitera la signature d'un « certificat d'engagement et de connaissance des besoins spécifiques de l'espèce » ; la vente de chiots et chatons en animalerie sera interdite en 2024 ; les animaux ne pourront plus être présentés en vitrines ; les delphinariums ne pourront plus détenir de cétacés ; les animaux sauvages seront bannis des cirques d'ici sept ans. - Le Monde (AFP)

 © compte Twitter de Joe Biden

· C'est érable. Au Canada, l'État de Colombie-britannique est en état d'urgence depuis mercredi, après que des pluies-record ont provoqué inondations, crues et glissements de terrain. A certains endroits, en début de semaine, il est tombé en un jour l'équivalent d'un mois de précipitations. Un événement rarissime dont la probabilité est fortement accrue par la crise climatique. En outre, avec la surexploitation forestière et les incendies qui ont ravagé cet Etat de l'ouest du Canada, les sols sont moins capables de stocker l'eau et de retenir les sédiments, qui provoquent des glissements de terrain et le débordement des rivières en aval. - The Guardian (anglais)

· Il serait temps de broncher. La pollution aux particules fines a provoqué la mort prématurée de 307 000 personnes dans l'Union européenne en 2019, a dévoilé l'Agence européenne de l'environnement, lundi. Ce chiffre est en baisse de 10% par rapport à l'année précédente, ce que l'agence impute à des efforts pour améliorer la qualité de l'air. Ce niveau reste néanmoins très alarmant, alors que « 178 000 de ces décès auraient pu être évités si tous les États membres de l'UE respectaient les niveaux de qualité de l'air fixés » par l'Organisation mondiale de la Santé.

· Ils touchent du bois. Dans l'Amazonie brésilienne, la déforestation atteint des sommets : 13 235 km2 de forêts ont été détruits entre août 2020 et juillet 2021, selon les dernières données divulguées, jeudi, par l'Institut national de recherche spatiale (INPE) du Brésil. C'est le chiffre le plus élevé depuis 2005-2006. La déforestation progresse pour la troisième année consécutive, depuis l'arrivée de Jair Bolsonaro au pouvoir en 2019.

CO2 « irrécupérable » en milliards de tonnes (gigatonnes ou Gt) par espace naturel. Cliquez pour afficher en grand. © Nature sustainability / Traduction par Vert

Les puits s'en vont. Des scientifiques ont cartographié certains immenses réservoirs de CO2, dont la régénération - s'ils étaient détruits - serait trop lente pour empêcher les pires effets de la crise climatique. Forêts anciennes, tourbières, mangroves... Comme le raconte leur étude, parue jeudi dans Nature sustainability, ils ont identifié des « espaces naturels que nous ne pouvons pas nous permettre de perdre en raison de leurs stocks de carbone irremplaçables ». Ces puits de carbone « irrécupérable » se situent dans les vastes régions forestières que sont le bassin du Congo, l'ouest de l'Amazonie, le nord de la côte Pacifique américaine, la Sibérie, ainsi qu'une partie de l'Océanie et de l'Asie du sud-est (Australie, Indonésie). Bonne nouvelle : l’ajout de seulement 5,4% de la surface terrestre parmi les aires protégées existantes permettrait de sécuriser 75% de ce carbone. Un article à lire sur vert.eco.

· Désobéissance civique. En fin de semaine dernière, le tribunal correctionnel de Bobigny a relaxé les sept activistes qui s’étaient introduit·e·s sur la piste de l’aéroport de Roissy pour protester contre son extension. La justice a estimé que cette action avait eu pour but « d'alerter » au sujet du réchauffement climatique. Cette décision représente un bond en avant, alors que des peines d'un à deux mois de prison avec sursis étaient requises.- Vert

· Bye bye. Dans une décision rendue lundi, le Conseil d'État donne six mois au gouvernement pour restreindre, voire interdire, l'usage des pesticides dans les zones classées Natura 2000. En 2009, une directive européenne a imposé aux États d’interdire ou de restreindre au maximum l’utilisation de pesticides de synthèse. Malgré le « refus implicite » des ministres, ces dernières années, à prendre les mesures d'application concrètes prévues, la France doit maintenant s'y conformer. - Vert

· La terre des dures luttes. Plusieurs associations viennent de publier une vaste analyse des mobilisations locales contre les dizaines de projets d'aménagement néfastes pour l'environnement, actuellement déployés en France. Selon ses auteur·rice·s, ce portrait de famille dessine un mouvement social « décentralisé »« qui s'ignore de moins en moins » et « propose un contre-discours écologiste, démocratique, social et économique cohérent ». - Vert

Pour la justice climatique

Comment répondre à l’urgence et infléchir les politiques néolibérales et extractivistes quand on n’est pas aux commandes ? Dans son essai Pour la Justice climatique, l’association altermondialiste Attac analyse les multiples stratégies adoptées par le mouvement mondial pour le climat afin de remporter des victoires. Une chronique à lire sur le site de Vert

Cash investigation : déchets, la grande illusion

Poubelles du tout. Alors que nos poubelles débordent et que la Banque mondiale prédit une augmentation de 70% de la masse de déchets d’ici 2050, l’équipe du magazine Cash investigation a enquêté sur la fin de vie de nos détritus. Incinération au prix d’émissions et de mâchefer toxiques, recyclage « total » des plastiques qui finissent en partie, malgré tout, à l’incinérateur ou dans des décharges, méthaniseurs industriels à l’origine de pollutions et d’accidents : le bilan de la prise en charge de nos déchets n’est pas très ragoûtant.

© Cash investigation

+ Mathilde Doiezie, Enzo Dubesset et Juliette Quef ont contribué à ce numéro