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Un portrait de famille des luttes locales contre les grands projets « inutiles et imposés »

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La terre des dures luttes. Plusieurs asso­ci­a­tions vien­nent de pub­li­er un vaste état des lieux des mobil­i­sa­tions locales con­tre les dizaines de pro­jets d’amé­nage­ment néfastes pour l’en­vi­ron­nement, actuelle­ment déployés en France.

D’an­née en année, la con­tes­ta­tion enfle con­tre les « grands pro­jets inutiles et imposés » (GPII), comme les appel­lent leurs opposant·e·s. Sou­vent à voca­tion indus­trielle ou com­mer­ciale, ils par­ticipent à l’ar­ti­fi­cial­i­sa­tion des sols, à la destruc­tion de la bio­di­ver­sité et au boule­verse­ment du cli­mat.

Parcs de loisirs, éle­vages indus­triels, cen­tres com­mer­ci­aux, entre­pôts Ama­zon… Dans une carte inter­ac­tive régulière­ment mise à jour depuis 2020, Reporterre recense quelque 370 luttes locales con­tre de tels pro­jets. Le soci­o­logue Kevin Vach­er du Groupe de dif­fu­sion, de recherche et de veille citoyenne (GDRV) et les asso­ci­a­tions Ter­res de luttes, Notre affaire à tous et ZEA ont mené des dizaines d’en­tre­tiens et étudié de près 68 de ces mobil­i­sa­tions. Il en ressort un vaste état des lieux pub­lié ce mer­cre­di.

La carte inter­ac­tive des luttes con­tre les GPII créée par Reporterre, Le mou­ve­ment et Partager c’est sym­pa. Cliquez sur la carte pour y accéder.

Les entre­tiens font appa­raître que les pro­jets con­testés sont avant tout à des fins com­mer­ciales ou de loisirs (32%), voués à exploiter et détru­ire les sols et les ressources naturelles (15%), généra­teurs de pol­lu­tions (14%), liés à l’ur­ban­i­sa­tion (12%) ou aux trans­ports (12%).

Par­mi les prin­ci­pales raisons qui poussent les citoyen·ne·s à s’en­gager con­tre ces GPII, l’é­tude note l’ar­ti­fi­cial­i­sa­tion des sols, les pol­lu­tions et autres nui­sances directes pour les habitant·e·s, des préoc­cu­pa­tions écol­o­gistes générales (le sen­ti­ment d’ap­par­te­nance à un com­bat plus large), ou un attache­ment au pat­ri­moine.

Les por­teurs de pro­jets que sont l’E­tat, les col­lec­tiv­ités ou les entre­pris­es privées sont les prin­ci­pales entités visées par les col­lec­tifs. Les per­son­nes inter­rogées dénon­cent cer­taines straté­gies récur­rentes : le fait accom­pli – les travaux démar­rent sans que les autori­sa­tions aient été délivrées, l’opac­ité de l’in­for­ma­tion délivrée au grand pub­lic, ou le lance­ment de procé­dures judi­ci­aires coû­teuses en temps et en énergie. De leur côté, les opposant·e·s plébisci­tent la médi­ati­sa­tion des luttes (médias et réseaux soci­aux), l’in­ter­pel­la­tion des élu·e·s, la sen­si­bil­i­sa­tion des riverain·e·s, les actions en jus­tice et la désobéis­sance civile.

« Si les caus­es locales peu­vent être nation­al­isées lors de grands rassem­ble­ments ou de cam­pagnes médi­a­tiques, il n’émerge (pour l’instant) pas de cause en soi nationale au sein de cet espace de mobil­i­sa­tion et à par­tir des luttes locales elles-mêmes », notent les auteur·rice·s. Toute­fois, ce por­trait de famille des­sine un mou­ve­ment social « décen­tral­isé » « qui s’ig­nore de moins en moins » et « pro­pose un con­tre-dis­cours écol­o­giste, démoc­ra­tique, social et économique cohérent ».