Les militant·es pour le climat savent désormais se satisfaire de peu. Jeudi, les ministres de l’économie et des finances des 27 États de l’Union européenne ne sont pas parvenu·es à trouver un accord sur la proposition de révision de la directive sur la taxation de l’énergie (Energy taxation directive, ou «ETD»).
L’ETD, en vigueur depuis 2003, fixe des niveaux minimums de taxation pour les produits énergétiques – carburants, combustibles et électricité. Et elle en exempte totalement le kérosène (le carburant des avions) à l’échelle européenne. La proposition de révision de l’ETD, portée par la présidence danoise du Conseil, risquait d’entériner pendant une décennie encore – et sans modification possible – les avantages fiscaux dont bénéficient les secteurs polluants de l’aviation et du transport maritime. Faute d’accord jeudi, le sort de ces exonérations n’est pas gravé dans le marbre pour les dix prochaines années. Un maigre motif de réjouissance pour les écologistes, alors qu’elles restent tout de même en vigueur pour le moment.

Cette révision nécessitait l’accord de l’unanimité des États pour être approuvée. Mais, comme le rapporte le média spécialisé Contexte, «en proposant de nouveaux assouplissements de dernière minute pour accommoder des pays qui […] réclament le régime le plus accommodant possible pour les énergies fossiles, Copenhague s’est aliéné le soutien d’autres États prônant un régime de taxation plus en ligne avec les considérations climatiques».
«Le danger est évité», a salué l’association de protection des océans Bloom : «S’il avait été adopté, le texte proposé par la présidence danoise aurait prolongé d’au moins une décennie les privilèges fiscaux accordés aux secteurs les plus polluants et compromis les objectifs climatiques et fiscaux de l’Europe.»
10,7 milliards d’euros de manque à gagner
En pleine 30ème conférence mondiale (COP30) sur le climat à Belém (Brésil) et dix ans après l’Accord de Paris, l’association appelle les États membres de l’UE à poursuivre des négociations plus ambitieuses à ce sujet.
Dans un courrier adressé le 18 octobre au représentant permanent hongrois Bálint Ódor et au commissaire désigné au climat, le Néerlandais Wopke Hoekstra, plusieurs associations – dont Bloom – avaient pointé le coût budgétaire de ces exonérations (notre article).
Pour la seule année 2022, leur absence a représenté un manque à gagner de 10,7 milliards d’euros pour les États membres, selon leurs estimations. «Avec cet argent, on pourrait financer des nouvelles technologies plus propres, accélérer l’électrification de la route. Mais aussi soutenir le développement de carburants de synthèse, plus durables !», avait expliqué à Vert Jérome du Boucher, spécialiste des enjeux liés au secteur de l’aviation au sein de l’ONG Transport & Environment.
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