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Crédit d’impôt, bonus écologique, friches industrielles : le projet d’Emmanuel Macron pour réindustrialiser la France

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Défrich­er l’industrie. Jeu­di, Emmanuel Macron a dévoilé les grandes lignes du futur pro­jet de loi «indus­trie verte», sa feuille de route pour réin­dus­tri­alis­er le pays.

Des indus­triels, des syn­di­cats, des asso­ci­a­tions, des élu·es et une flopée de min­istres étaient réuni·es à l’Élysée, ce jeu­di, pour écouter le chef de l’État présen­ter sa stratégie d’accélération de la réin­dus­tri­al­i­sa­tion de la France. Quelques mois après avoir fustigé le plan améri­cain de décar­bon­a­tion (l’Infla­tion reduc­tion act) et ses mesures de pro­tec­tion­nisme «super agres­sives» pour l’Europe (notre arti­cle), Emmanuel Macron a finale­ment décidé de s’en inspir­er. «Cela ne veut pas dire que l’on va faire du pro­tec­tion­nisme», s’est-il défendu. «Mais on ne va pas utilis­er l’argent du con­tribuable français pour accélér­er l’industrialisation non européenne» en sub­ven­tion­nant, par exem­ple, des véhicules élec­triques pro­duits en Chine.

Tout comme aux États-Unis, un nou­veau «crédit d’impôt indus­trie verte» vien­dra favoris­er la pro­duc­tion de bat­ter­ies, pan­neaux solaires, éoli­ennes ou pom­pes à chaleur. De quoi «déclencher 20 mil­liards d’investissements sur le ter­ri­toire nation­al d’ici 2030», estime le prési­dent. Une sim­pli­fi­ca­tion des procé­dures d’implantation d’industries devrait divis­er par deux les délais actuels — et ain­si ne pas dépass­er neuf mois entre la déci­sion d’installation et le début des travaux.

Un mil­liard d’euros seront alloués à la dépol­lu­tion de frich­es indus­trielles pour les ren­dre «prêtes à l’emploi». L’accent sera mis sur la for­ma­tion aux métiers de l’industrie : 700 mil­lions d’euros seront déblo­qués dans l’année pour dévelop­per l’offre de for­ma­tions dans le secteur, à tous les niveaux de diplôme.

Enfin, le plan «indus­trie verte» com­prend une refonte du «bonus écologique» d’ici la fin de l’année. Cette enveloppe de 5 000 euros, accordée aux ménages pour l’achat d’un véhicule élec­trique, sera désor­mais con­di­tion­née à son empreinte car­bone, com­prenant sa fab­ri­ca­tion. Les véhicules pro­duits en Europe et a for­tiori en France, où le mix énergé­tique est moins car­boné qu’en Chine ou aux États-Unis, seront favorisés. Jusqu’à présent, ce bonus avan­tageait les voitures chi­nois­es, moins chères que les pro­duc­tions européennes.

Le pro­jet de loi sera offi­cielle­ment présen­té en Con­seil des min­istres mar­di 16 mai, et arrivera au Par­lement en juin.

«Une pause réglementaire européenne»

Alors qu’il présen­tait son plan, Emmanuel Macron a égale­ment appelé à une «une pause régle­men­taire européenne» sur les normes envi­ron­nemen­tales. Selon lui, l’Europe est déjà bien assez vertueuse au regard des États-Unis ou de la Chine. Le «risque», a‑t-il ajouté : «être les mieux-dis­ant en ter­mes de régle­men­ta­tion et les moins-dis­ant en ter­mes de finance­ment».

Sa sor­tie a lais­sé per­plexe de nom­breux obser­va­teurs, dont l’avocat spé­cial­isé Arnaud Gosse­ment : le prési­dent a‑t-il voulu dire qu’il fal­lait un cadre juridique plus sta­ble pour dévelop­per l’industrie, ou comme son prédécesseur Nico­las Sarkozy en son temps, que l’environnement, ça com­mençait à bien faire ?

Une source de l’Élysée a pré­cisé à l’AFP qu’Emmanuel Macron n’avait demandé ni sus­pen­sion, ni mora­toire, ni abro­ga­tion «des normes actuelles en cours de dis­cus­sion», mais voulait «exé­cuter les déci­sions déjà pris­es avant de faire de nou­veaux change­ments». Au lende­main de la déci­sion du Con­seil d’État qui a exhorté le gou­verne­ment a amélior­er sa poli­tique pour le cli­mat (Vert), le prési­dent devra rapi­de­ment expli­quer le fond de sa pen­sée.