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Cinq fois où l’écologie a gagné en 2024 (1/5) : la fin du Boulevard intercommunal du Parisis, «le plus vieux projet routier de France»

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Less béton. Dans le Val-d’Oise, les opposant·es au tronçon routier du Boulevard intercommunal du Parisis (Bip) ont obtenu la fin du projet après quinze ans de mobilisation.

Plusieurs victoires écolos, comme la récente libération du militant anti-chasse à la baleine Paul Watson ou la suspension par la Norvège de ses projets d’extraction minière sous-marine, ont rythmé l’année 2024. Mais celle-ci a aussi été marquée par le succès de plusieurs luttes locales contre des projets polluants ou destructeurs pour l’environnement. Vert revient sur cinq fois où les mobilisations locales ont payé.

Avant son abandon, le Bip était «probablement le plus vieux projet routier de France», attaque d’emblée Audrey Boehly, membre du collectif Vivre sans Bip et habitante du Val-d’Oise. Le projet du Boulevard intercommunal du Parisis – aussi appelé Avenue du Parisis – remontait en effet à 1939. Porté par le département du Val-d’Oise, il avait pour objectif de relier les autoroutes A1 à A15, au nord de Paris. Une partie était déjà construite : sur les 21 kilomètres nécessaires pour relier les deux tronçons autoroutiers, il manquait une portion de onze kilomètres de deux fois deux voies à tracer.

Les opposant·es au projet, soutenu·es par une majorité d’élu·es des collectivités concernées, dénonçaient un projet «archaïque» et «obsolète». Premier problème : le tronçon allait artificialiser une centaine d’hectares d’espaces naturels réservés pour le projet depuis des décennies – depuis devenue une trame verte «exceptionnelle». Second enjeu : le Bip devait traverser six communes du Val d’Oise (Garges-lès-Gonesse, Sarcelles, Deuil-la-Barre, etc), dont quatre fermement opposées au projet, et occasionner des impacts importants, en termes de pollution et de bruit notamment, sur les riverain·es et les quelque 10 000 enfants d’une quarantaine d’écoles avoisinantes.

En rouge, le tracé du Bip entre Soisy-sous-Montmorency à gauche et Garges-lès-Gonesse à droite, et, en bleu, des écoles situées à proximité. © Collectif Vivre sans Bip

Plusieurs victoires juridiques

Si cette lutte a un long historique, elle s’est particulièrement structurée dans les années 2010, après la création du collectif Vivre sans Bip en 2009. Les opposant·es au projet ont remporté trois victoires juridiques contre la Déclaration d’utilité publique (DUP) du tronçon, validée en 2016, repoussant les travaux pendant des années. Mais le vent a tourné en 2022 avec le pourvoi en cassation du département du Val-d’Oise pour contester ces décisions. En mai 2024, le Conseil d’État est revenu sur l’annulation de la DUP, ouvrant la voie à la poursuite du Bip.

C’est à ce moment-là que les habitant·es engagé·es ont accru leur mobilisation citoyenne pour obtenir un abandon politique plutôt que juridique. La stratégie a fini par payer puisque le département a acté la fin du tronçon quelques mois plus tard, en septembre 2024. «Le projet initial de l’Avenue du Parisis, tel qu’il fut imaginé il y a bientôt quinze ans, nécessite aujourd’hui d’être repensé. Nos territoires bougent. Les modes de déplacement changent. Les consciences aussi.», a annoncé la présidente du Conseil départemental du Val-d’Oise, Marie-Christine Cavecchi, dans un communiqué daté du 25 septembre. L’élue ajoute alors qu’elle ne demandera pas au préfet de valider la DUP du tronçon, enterrant de fait le projet.

Une lutte ultra locale

«On s’attendait à une victoire d’ici l’été 2025, mais pas aussi vite. De toute façon, la majorité des habitants et des élus du territoire étaient contre…», savoure Audrey Boehly. Pour elle, le succès de cette lutte tient à un ensemble de raisons. Tout d’abord, la mobilisation est restée ancrée dans l’ultra local avec le soutien de plus de cent associations de quartier, sportives, de parents d’élèves, etc. Le mouvement a su demeurer inclusif et basé sur les préoccupations de la vie quotidienne comme la santé, les enfants, la proximité d’espaces verts, le bruit, etc, plutôt que sur des considérations politiciennes. Enfin, les opposant·es sont parvenu·es à se rendre incontournable sur le territoire. «Notre stratégie était d’être partout, tout le temps, dans les marchés, dans les forums des associations, dans les conseils municipaux. Par exemple, on a forcé tous les élus à se positionner sur le sujet pendant les législatives de juillet 2024», raconte la porte-parole du collectif.

Seule ombre au tableau : lors de l’abandon du projet en septembre, le département a précisé qu’il proposerait «de nouveaux aménagements» sur le foncier initialement réservé au projet. Le collectif poursuit désormais sa mobilisation pour obtenir le classement définitif de la trame verte : «Il faut éviter de futurs projets parasites à droite et à gauche, martèle Audrey Boehly. Cette trame verte, c’est un trésor en Île-de-France».


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