Revirement

«C’est une victoire cruciale» : la Norvège suspend ses projets controversés d’extraction minière sous-marine

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Mine de rien. Le gouvernement norvégien renonce à délivrer des permis de prospection minière sous-marine dans ses eaux arctiques. Une décision reçue comme une victoire pour les défenseur·ses de l’environnement, même si, comme le précise le premier ministre, «c’est un report», pas un renoncement.

«C’est une victoire cruciale pour le combat contre l’extraction minière sous-marine, s’est félicité dimanche le chef de file de Greenpeace Norvège, Frode Pleym. Cela devrait être le coup de grâce pour cette industrie destructrice.» La Norvège ne délivrera pas, comme elle le prévoyait en dépit des critiques venues de toutes parts, de permis de prospection minière sous-marine dans ses eaux arctiques en 2025.

Le premier ministre norvégien Jonas Gahr Store souligne que cette décision ne signe pas la fin des projets nationaux d’extraction de minéraux. ©Wikimedia Commons

Le petit parti de la Gauche socialiste a annoncé dimanche avoir arraché cette concession dans le cadre de négociations avec le gouvernement de centre-gauche, minoritaire au Parlement, pour l’aider à faire adopter son projet de budget 2025. «Nous avons arrêté les projets d’extraction de minéraux dans les fonds sous-marins», a déclaré Kirsti Bergsto, cheffe de la Gauche socialiste, lors d’une conférence de presse. Le parti précise que cette suspension vaut pour 2024 et 2025.

Le premier ministre travailliste Jonas Gahr Store a souligné que cette décision ne signait pas la fin des projets nationaux d’extraction de minéraux jugés essentiels pour se passer des hydrocarbures – dont le pays est par ailleurs un gros producteur – dans le cadre de la transition énergétique. «C’est un report, on doit pouvoir accepter ça», a-t-il déclaré à la chaîne TV2.

280 000 km2 devaient être prospectés

Malgré les objections de scientifiques, d’ONG et d’autres États, la Norvège comptait attribuer ses premiers permis d’exploration minière sous-marine l’an prochain, ce qui aurait pu en faire l’un des premiers pays au monde à exploiter les fonds sous-marins.

En janvier, le Parlement avait donné son feu vert à l’ouverture d’une partie des fonds sous-marins à la prospection minière, sur 280 000 kilomètres carrés, soit plus que la superficie totale du Royaume-Uni.

Le ministère de l’énergie avait ensuite désigné des aires propices, représentant 38% de cette surface, en mer de Norvège et en mer du Groenland, pour un premier cycle d’attribution de licences prévu en 2025.

WWF maintient sa procédure judiciaire

Cette ouverture progressive des fonds sous-marins à l’exploration minière, réversible et assortie de garde-fous selon le gouvernement, avait suscité l’opposition d’ONG, d’institutions internationales telles que le Parlement européen, de scientifiques ou encore de multinationales.

Jeudi s’est ouvert à Oslo le procès intenté à l’État par la branche norvégienne du Fonds mondial pour la nature (WWF), qui réclamait une suspension de ce processus d’ouverture dans l’attente d’études d’impact. «WWF est très heureux qu’il n’y ait pas de cycle de concessions (…) en 2024-2025», a réagi la présidente de WWF Norvège, Karoline Andaur. Elle a en revanche exclu l’arrêt de la procédure judiciaire. «On a encore besoin que les tribunaux tranchent (la question de savoir) si la décision d’ouverture (des fonds sous-marins) a été prise sur des bases légales», a-t-elle souligné.

Contacté par l’Agence France-Presse (AFP), le ministère de l’énergie a refusé tout commentaire, renvoyant vers les partis à l’origine du compromis budgétaire. Selon de nombreuses ONG, l’ouverture des fonds sous-marins aux activités minières fait planer une menace supplémentaire sur un écosystème méconnu et déjà fragilisé par le réchauffement climatique.

Destruction d’habitats, pollution, risque de fuites chimiques

Parmi les possibles dangers, la destruction directe d’habitats et d’organismes des fonds marins, la pollution sonore et lumineuse, le risque de fuites chimiques provenant des machines ainsi que le déplacement accidentel d’espèces.

Les autorités norvégiennes font valoir de leur côté l’importance de ne pas dépendre de pays comme la Chine pour la fourniture en minéraux essentiels à la transition énergétique et assurent que la prospection permettrait de recueillir les connaissances qui font actuellement défaut.

Selon Oslo, le plateau continental du pays recèle très probablement d’importants gisements de minéraux, comme le cuivre, le cobalt, le zinc et des terres rares. Des minéraux qui entrent dans la composition de batteries électriques, de turbines d’éoliennes, d’ordinateurs et de téléphones portables.


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