La quotidienne

Vous n’avez plus la Base

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Il semblerait que nos efforts n'aient pas été vains.

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- Loup Espargilière, rédacteur en chef de Vert


Un haut lieu de l'écologie ferme ses portes, qui aura contribué à rendre la mobilisation pour le climat si forte.


Fermeture de la Base : à Paris, une page se tourne pour le mouvement pour le climat

Vous n’avez (plus) la base. Après trois ans d’existence, le bar associatif, espace de co-working et tiers-lieu militant la Base ferme ses portes cette semaine. Reportage dans ce lieu qui aura vu éclore et grandir le mouvement pour le climat et la justice sociale à Paris.

Des cartons empilés à droite à gauche, des portants couverts de t-shirts sérigraphiés en attente de preneurs, des tables de bar entassées sous des panneaux de slogans de manifestations qui habillent les murs… c’est une drôle d’ambiance qui habite le bar de la Base, haut lieu parisien de la mobilisation pour le climat et la justice sociale, en ce mercredi 22 juin. Ce vendredi, après trois années d’existence, la Base ferme officiellement ses portes.

Ce tiers-lieu aux multiples fonctions est né en 2019, poussé par l’essor du mouvement Alternatiba Paris. Située dans le 10ème arrondissement de la capitale, à deux pas de la place de la République, la Base est installée dans un immeuble grisâtre, dont les murs intérieurs ont été recouverts de fresques et de multiples banderoles de manifestations, et qui a été rempli d’objets de récupération. Un lieu unique, à la fois festif, militant, créatif et professionnel.

Concerts, conférences, soirées électorales et furieuses fiestas ; à part lors de certaines parenthèses - comme celle du premier confinement, une multitude d’événements a été organisé presque chaque jour pendant trois ans dans le bar du rez-de-chaussée. « C’est une porte d’entrée super accessible, et le fait de montrer qu’on se bat dans la joie et la fête parce qu’on aime la vie, et pas parce qu’on se dit qu’on va tous crever dans dix ans, ça aide à mobiliser les gens », raconte « Babeth », chargée de logistique à la Base.

Des souvenirs des grandes mobilisations organisées à la Base ont longtemps orné les coursives des bureaux. © Anna Sardin / Vert

Les étages accueillent un espace de co-working et des bureaux peuplés par plusieurs organisations. Parmi elles, l’association Notre Affaire à Tous, qui a obtenu la condamnation de l’État pour inaction climatique (notre article), les agences de conseil Greenlex et Partie prenante, ou encore le mouvement Faire un monde équitable. C’est aussi dans ces bureaux que Vert a pris son envol au cours des derniers mois.

Pour beaucoup, la Base a été espace de synergie essentiel pour faire avancer la cause de l’écologie et de la justice sociale. C’est ici qu’ont été organisées certaines des plus grandes mobilisations récentes du mouvement pour le climat. Parmi celles-ci, dont l’énorme opération « Bloquons la République des pollueurs » en 2019, les marches « Look up » (Vert) ou « pour le futur » organisées au printemps 2022, avant la présidentielle (notre reportage).

Une page se tourne, pour Élodie Nace, coordinatrice d’Alternatiba Paris. « Il y a bien sûr de la tristesse et de la nostalgie, mais aussi beaucoup de reconnaissance et de gratitude vis-à-vis de tout ce qu’on a réussi à faire, que ce soit du travail de fond, de réflexion et de “production d’intelligence”, mais aussi la dimension de rassemblement, de célébration qui a entouré nos luttes. »

Dans le bar bien encombré en vue du déménagement officiel, Babeth a du mal à se faire à l'idée que la Base ferme ses portes de manière définitive. © Anna Sardin / Vert

Au rez-de-chaussée, Babeth supervise le tri du bar d’une main de maîtresse, entre les choses à jeter, à donner, et celles qui suivront les différentes organisations dans leurs futures aventures. Elle est arrivée à la Base peu après son ouverture. Celle qui a aménagé, géré, encombré et désencombré chaque recoin du bâtiment a du mal à contenir son émotion. En plus de faciliter l’organisation du mouvement climat, la Base a permis de « donner un point de repères social et émotionnel ultra-important, estime-t-elle, car on mène des luttes qui sont dures. Et le fait d’avoir un lieu de convivialité, d’amitié où tu peux te rassembler et partager ton vécu, ça donne beaucoup de force pour continuer l’engagement ».

Si les au revoir à la Base sont amers, les organisations résidentes ont bon espoir de trouver rapidement un nouveau point de chute pour continuer de faire converger les luttes écologistes et sociales.

· Mardi, dans son rapport annuel sur l’application des lois, le Sénat a révélé que moins de 10% des mesures prévues par la loi dite « Climat Résilience », adoptée en juillet dernier, ont effectivement été mises en œuvre (14 sur les 142 adoptées). En comparaison, le taux global d’application des lois votées durant la période 2020-2021 s’élève à 57%. Selon le gouvernement, cette mise en place a été retardée par l’embouteillage administratif et le temps de la consultation. Cette loi avait déjà été largement critiquée pour son manque d’ambition, offrant « une baisse insuffisante des émissions de gaz à effet de serre », selon l’avis du Conseil National de la transition énergétique (CNTE). - Reporterre

· Deux semaines après un fiasco au Parlement européen (notre article), les eurodéputé·es se sont finalement accordé·es mercredi sur la réforme du marché du carbone dans le cadre du Pacte vert (ou Green deal), qui vise à réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990. Les parlementaires ont voté la fin progressive, entre 2027 et 2032, des droits à polluer pour les industriels européens, ainsi que l’instauration d’une taxe carbone aux frontières. Cette dernière doit permettre d’empêcher la concurrence déloyale de la part de fabricants extra-européens de produits aux normes moins rigoureuses en matière de climat. Les eurodéputé·es ont aussi adopté la création d’un fonds social pour le climat, qui visera à accompagner les plus vulnérables dans la transition écologique. Plusieurs ONG écologistes ont déploré le manque d’ambition du texte, raconte Le Monde.

· Depuis ce jeudi, les réservations sont obligatoires pour accéder à deux des calanques proches de Marseille (Bouches-du-Rhône). Cette mesure, dont l’objectif est de protéger le littoral fragile des dégradations causées par la surfréquentation estivale, est inédite au sein du Parc national des Calanques. Annoncées de longue date, ces restrictions permettront de limiter le nombre de visiteur·ses à 400 personnes par jour, contre 2 500 touristes au plus fort de la fréquentation ces dernières années. - Sud-Ouest

2,3 milliards

Les humains qui valaient 2,3 milliards. La France devrait investir 2,3 milliards d’euros par an pour mener à bien le chantier indispensable de l’adaptation au changement climatique afin de préserver la société et les écosystèmes des pires effets de la crise. C’est la préconisation faite par l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) dans un vaste rapport publié ce jeudi. Ses auteur·rices regrettent que les nombreuses initiatives déjà à l’œuvre « ne soient pas du tout à la hauteur des enjeux » pour adapter efficacement le pays aux canicules, incendies et inondations et que subsistent « de nombreux angles morts ». Pour rattraper ce retard, l’institut a listé et chiffré 18 mesures budgétaires nationales qui pourraient être déployées immédiatement, comme la création d’un fonds d’aide à la recomposition du littoral ou la prise en charge du surcoût lié aux constructions adaptées aux chaleurs futures dans les établissements publics par exemple. - Le Monde (abonné·es)

La non-violence, un chemin de lutte révolutionnaire

Œil pour œil. Dans Manifeste pour la non-violence, la militante d’Alternatiba et d’ANV-COP21 Pauline Boyer et le coordinateur de l’association Non-violence XXI Johann Naessens plaident pour des luttes radicales, efficaces et profondément justes.

Faut-il répondre à la violence d’un « capitalisme triomphant » par celle de l’action ? Les auteur·ices de cet essai proposent l’exact opposé. Entre une agressivité qui prolongerait le système « oppressif » en place et un pacifisme qui nierait tout conflit, tous deux défendent une troisième voie pour combattre l’injustice : celle de la non-violence. Expérimentée par les peuples amérindiens, mais aussi Gandhi, Henry David Thoreau, Hubertine Auclert, Martin Luther King et bien d’autres, son but est d’instaurer un rapport de force avec des adversaires sans leur nuire.

Guidée par une morale exigeante, la non-violence consiste aussi à sortir des logiques de domination au sein même de l’organisation et du fonctionnement des groupes militants pour faire exister, d’ores et déjà, « le monde qu’on veut ». « Plus qu’un mode d’action efficace, la non-violence est un projet de société, souhaitant remettre au centre de nos vies le respect des droits humains tout en repensant notre façon d’habiter le monde et d’interagir avec le vivant », écrivent les activistes.

Du Mali à la Serbie et du Pays Basque aux États-Unis, en passant par l’Inde, cet ouvrage limpide, accessible et très fourni nous plonge au cœur des réflexions stratégiques des mouvements pour l’accès à la terre, les droits des femmes ou encore la lutte contre la pauvreté. Il donnera peut-être aux lecteur·ices l’envie et la force de combattre de manière « révolutionnaire » et « pragmatique » et contribuer à faire advenir un monde plus respectueux des humains et du vivant.

Manifeste pour la non-violence, Pauline Boyer, Johann Naessens, Éditions Charles Léopold Meyer, avril 2022, 256p, 11€

La carte de France de l’exposition aux pesticides

Glyphomaps. Visualiser l’exposition aux pesticides dans chaque commune française : c’est ce que permet pour la première fois une carte interactive mise au point par Solagro. Pour ce faire, cette entreprise associative d'ingénierie et de conseil en transition environnementale s’est basée sur les données de fréquence des traitements phytosanitaires des sols. Rendue publique mercredi, elle permet également de connaitre l’étendue des surfaces agricoles sur le territoire métropolitain, la part de l’agriculture biologique ou encore le type de culture principale.

Cliquez pour accéder à la carte interactive © Solagro

+ Loup Espargilière, Juliette Quef et Anna Sardin ont contribué à ce numéro.