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« L’Affaire du siècle » : la justice ordonne à l’État de réparer son inaction climatique

Affaire classée. Après la condamnation historique de l’État pour son inaction dans la lutte climatique en février dernier, le tribunal administratif lui donne désormais jusqu'à la fin 2022 pour réparer ce préjudice.
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« Quand on a lancé cette action, on était très loin d’imaginer que la justice pourrait aller si loin dans sa décision », s’enthousiasme Cécilia Rinaudo, coordinatrice générale de l’association Notre Affaire à Tous et porte-parole de l’Affaire du Siècle, auprès de Vert. Jeudi matin, le tribunal administratif de Paris a enjoint au gouvernement de « réparer les conséquences de sa carence en matière de lutte contre le changement climatique », peut-on lire dans le jugement.

En février dernier, l’État a été condamné une première fois pour n’avoir pas respecté ses objectifs de réduction des gaz à effet de serre entre 2015 et 2018, comme le racontait Vert. Cette condamnation était le fruit d’une procédure inédite lancée en 2019 par quatre ONG (Greenpeace, Oxfam, Notre Affaire à Tous et la Fondation Nicolas Hulot), baptisée l’« Affaire du Siècle ». En parallèle d’une vaste pétition qui a recueilli 2,3 millions de signatures, les associations avaient alors saisi la justice pour contraindre l’État à agir contre la crise climatique. 

Le tribunal administratif laisse désormais à l’Etat jusqu’à la fin 2022 pour rattraper les 15 millions de tonnes de CO2 émises en trop entre 2015 et 2018 par rapport à ses propres objectifs, contenus dans la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC). La nature des mesures reste à « la libre appréciation du gouvernement », soulignent les juges dans un communiqué. Mais celui-ci devra apporter la preuve que des politiques efficaces ont été mises en œuvre et qu’elles ont bien permis de rattraper le retard accumulé. 

Les associations réclamaient une contrepartie financière de 78 millions d’euros par semestre de retard – un montant calculé selon la valeur Quinet, qui définit le coût social d’une tonne de carbone évitée – si le gouvernement ne pouvait justifier la réparation du préjudice écologique. Dans son jugement du 14 octobre 2021, le tribunal administratif précise qu’« à ce stade, il n’assortit pas cette injonction d’une astreinte ». Une décision prévisible, selon Cécilia Rinaudo qui explique que les astreintes dites « préventives » sont rarement prononcées. « Mais si l’État n’a pas fait sa part au 31 décembre 2022, nous redemanderons une astreinte et nous sommes assez confiant·e·s sur le fait de pouvoir l’obtenir », indique-t-elle encore à Vert.

Pour les ONG de l’« Affaire du Siècle », ce jugement constitue une jurisprudence essentielle pour l’avenir de la lutte climatique. « L’État est désormais pris dans un double étau juridique : d’un côté, celui de respecter ses engagements climatiques, et de l’autre, celui de réparer tout manquement ou écart de route », détaille Cécilia Rinaudo. Des conséquences qui concernent ce gouvernement mais aussi tous ceux à venir.

Cette décision historique pourrait venir inspirer les citoyen·ne·s d’autres pays à intenter des actions en justice, estime la coordinatrice de Notre Affaire à Tous. Elle précise que depuis 2019, nombre de collectifs étrangers ont contacté l’organisation, intéressés par l’écho médiatique inédit de l’initiative. Au cours des derniers mois, les gouvernements allemand, belge et néerlandais ont été condamnés dans des affaires similaires (Vert).

Maintenant que la justice leur a donné raison à deux reprises, les organisations de l’« Affaire du Siècle » espèrent peser sur la campagne présidentielle. Elles comptent pousser l’ensemble des candidat·e·s à présenter des feuilles de route détaillées pour tenir les engagements climatiques de la France. L’objectif : évaluer en amont la crédibilité environnementale de chaque prétendant·e à l’Élysée.