L'hebdo

COP model ?

Chères toutes et chers tous,

Pendant les deux prochaines semaines, Vert passe à l'heure émiratie pour vous faire vivre la COP28 comme si vous y étiez. Décryptage des décisions annoncées, coulisses des négociations et dessous de l'organisation du sommet à Dubaï : on vous raconte tout ! Alors que plusieurs voix appelaient au boycott de cette conférence organisée par un pays pétrolier, nous avons jugé essentiel de couvrir l'événement. Notre édito à lire juste ici


La COP28 a commencé sur les chapeaux de roue mais il en faudra encore beaucoup pour que le sommet soit dans les clous. 


COP28 : accord historique sur la réparation des pertes et dommages dans les pays vulnérables à la crise climatique

COP sur des roulettes. Dès l’entame de la 28ème conférence mondiale (COP28), les États ont validé la création d’un mécanisme de financement des destructions liées au climat, qui sera placé sous l’égide de la Banque mondiale.

«Ce qui se passe aujourd’hui, c’est l’aboutissement de 30 ans de lutte acharnée par les pays en développement qui criaient à l’aide», savoure Fanny Petitbon, responsable de plaidoyer pour l’ONG Care France et observatrice à Dubaï.

Dès l’ouverture de la COP28 ce jeudi, sous des applaudissements nourris, la présidence émiratie a obtenu un accord sur le financement des «pertes et dommages». Il s’agit des dégâts irréversibles causés par le dérèglement climatique : ils peuvent être dus à des événements extrêmes (cyclones, inondations, etc), ou à des processus de long terme (montée du niveau de la mer, sècheresses, etc).

Voilà des décennies que les pays les plus vulnérables au changement climatique (les États insulaires du Pacifique en tête) réclamaient une aide de la communauté internationale pour faire face à ces événements «dont ils ne sont pas responsables et contre lesquels ils n’ont pas les moyens de lutter», explique Fanny Petitbon. Si le sujet a tant peiné à se frayer un chemin dans les négociations internationales, c’est parce que les pays les plus riches ont longtemps refusé d’ouvrir la voie à la création d’un mécanisme qui impliquerait d’admettre leur responsabilité majeure dans la crise climatique.

Des délégué·es représentant la Colombie le jour d’ouverture de la COP28 à Dubaï. © COP28 / Mark Field

L’an dernier, à la surprise générale (déjà) lors de la COP27 de Charm el-Cheikh (Égypte), les pays du monde avaient acté le principe de créer ce fonds. Un an plus tard, à Dubaï, les Émirats arabes unis et l’Allemagne ont promis de débloquer chacun 100 millions de dollars (92M€), assez pour donner vie à ce fonds. Dans la foulée, l’Union européenne a annoncé 125 millions d’euros. Des sommes plus symboliques viendront des États-Unis, du Japon ou du Royaume-Uni. Pour l’instant, c’est une paille au regard des besoins, estimés entre 290 et 580 milliards de dollars (entre 265 et 531M€) par an pour les pays du Sud d’ici à 2030.

Il ne s’agit pas d’une victoire totale, la faute à plusieurs «lacunes», des mots de Fanny Petitbon : selon toute vraisemblance, ce nouveau mécanisme devrait être placé sous l’égide de la Banque mondiale, dont «les pratiques ont été largement remises en question, notamment parce qu’elle continue d’investir massivement dans les énergies fossiles et d’aggraver le changement climatique». Autre limite : aucune obligation pour les pays riches de contribuer. Autant de points qu’il reste à éclaircir avant la COP29.

· Lundi, la Première ministre Élisabeth Borne a présenté la nouvelle «stratégie nationale biodiversité» (SNB) du gouvernement. Planter un milliard d’arbres et 50 000 kilomètres de haies, placer 10% du territoire en «protection forte» (contre 4% aujourd’hui), restaurer 30% des surfaces terrestres et marines dégradées : ces 40 mesures visent à protéger les écosystèmes à horizon 2030 afin d’enrayer le déclin rapide du vivant. - Vert

· Mercredi, le Comité international olympique a retenu la candidature des Alpes françaises pour l’organisation des Jeux olympiques d'hiver en 2030, écartant la Suède et la Suisse. La validation finale aura lieu en juillet prochain, quelques semaines avant les JO d’été de Paris 2024. Les associations de défense de l’environnement, qui dénoncent l’impact climatique de l’évènement, ont appelé à des mobilisations ce week-end. - Le Dauphiné libéré

· Jeudi, le gouvernement français a annoncé une rallonge de presque 34 millions d’euros pour aider les agriculteur·ices bio en grande difficulté. Cette somme, qui vient épaissir une enveloppe de 60 millions promise au mois de mai, sera débloquée après l’accord de la Commission européenne. - Sud Ouest (AFP)

· Jeudi encore, l’Allemagne et la Belgique ont toutes les deux été condamnées pour leur inaction et le non-respect de leurs engagements dans la lutte contre le changement climatique. Pour la première, la justice a estimé en première instance que le gouvernement devait mettre en œuvre des programmes d'urgence dans les transports et le bâtiment. Pour la seconde, l’État fédéral et les Régions bruxelloise et flamande ont été condamnés en appel à prendre des mesures pour réduire le volume global de leurs émissions de gaz à effet de serre «d’au moins 55 % en 2030 par rapport à 1990». - Arte et Le Soir

Savez-vous quelle COP il est ? On vous propose de télécharger ce superbe dessin de Sanaga avec un curseur à découper, pour que vous puissiez l'afficher partout et le mettre à jour ! Pour mettre la main dessus, cliquez ici.

· Engrais mal gré. Les activités humaines - agriculture en tête - répandent de l’azote en trop grandes quantités dans la nature. De quoi polluer les eaux, réchauffer le climat et dégrader les écosystèmes. Pour lutter contre cette pollution, les grands groupes agro-industriels doivent en faire davantage, soulignent dans cette tribune à Vert des expert·es de la protection de l’environnement, des député·es et des collectifs écologistes.

· Fossile à dire. Alors que s’ouvre la 28ème conférence mondiale (COP28) sur le climat à Dubaï, la question de la sortie des énergies fossiles est au cœur des débats. Peut-on vraiment envisager la fin des hydrocarbures à un horizon proche ? La COP apparaît en tout cas comme l'occasion idéale pour avancer sur ce dossier. Décryptage à lire sur vert.eco

· 68% des Français·es et des Européen·nes estiment que la transition écologique ne peut se faire «que si l’on s’attaque en même temps aux inégalités», a révélé la dernière édition d’une étude sur le climat réalisée par la société de conseil BVA pour la Banque européenne d’investissement et la Fondation Jean Jaurès, publiée mardi. Les sondé·es plaident notamment pour la mise en place de mesures fiscales assurant une transition juste, comme une taxe carbone progressive. - Vert

«Il ne s’agit pas de dire que les COP ne servent à rien, mais elles ne suffisent pas»

- Romain Grard, de Scientifiques en rébellion

Changer de COP. Rassemblé·es à Bordeaux dans l’immense bunker de la Base sous-marine, ancien lieu militaire désormais dédié à la création, les membres du collectif Scientifiques en rébellion présentent au public, depuis jeudi, rencontres, projections, performances et conférences pour aborder différemment les questions climatiques. «Avec cette alter COP, nous proposons d’autres narratifs, d’autres façons de partager les connaissances scientifiques et d’autres leviers d’action», explique à Vert Romain Grard, l’un des coordinateurs de l’événement. Vendredi, la journée se concentrait sur le rôle «climaticide» de TotalEnergies, avec un procès fictif pour écocide, qui a projeté le public en 2035. Pour tout comprendre à cette COP alternative qui se déroule à Bordeaux jusqu’à dimanche, rendez-vous sur vert.eco

COPulence. Avec plus de 97 000 personnes accréditées (délégations, médias, ONG, lobbies, organisateur·rices, technicien·nes…), la COP28 marque un premier record : celui de l’affluence. La précédente édition n’a rassemblé «que» 49 000 personnes à Charm el-Cheikh (Egypte). Les présidents américains et chinois brillent par leur absence alors que leurs pays sont les deux plus gros pollueurs de la planète. - France 24 (AFP)
 

COP d’habitude. Plus de 180 chefs d’États et de gouvernements sont arrivés vendredi à Dubaï pour se pencher au chevet du climat, le temps d’une photo de famille et d’une litanie de discours plus ou moins poignants. Une fois encore, on comptera beaucoup - beaucoup - plus de jets privés que de femmes. Pour l’anecdote, le roi Charles III, le premier ministre britannique Rishi Sunak et l’ex chef de gouvernement David Cameron ont chacun fait le déplacement depuis le Royaume-Uni à bord de leur propre jet privé. Boys, boys, boys.

Les dirigeants du monde réunis à la COP28 sur le climat à Dubaï, ce vendredi. © COP28 / Anthony Fleyhan

ONU bilan. Un premier brouillon du texte de décision concernant le Bilan mondial (voir notre abécédaire), qui fait l’inventaire de l’action climatique des huit dernières années et doit tracer la voie à suivre pour les prochaines, a été publié ce vendredi. Signal plutôt positif : le document évoque d’ores et déjà la question des énergies fossiles. Plusieurs points de vocabulaire sont en suspens : faut-il parler de «phasedown» (réduction progressive) ou de «phaseout» (abandon progressif) des fossiles ? Le texte, qui mentionne également le triplement des capacités des renouvelables, demeure provisoire et va évoluer dans les jours à venir.

© Carbon brief / Traduction par Vert

Histoire de dire. Organiser un sommet sur le climat dans une capitale du luxe et du pétrole est un scandale pour beaucoup. Mais il ne faut pas oublier la responsabilité historique de chacun des pays dans la crise climatique pour autant. Dans une infographie originale retraçant les émissions des plus gros pollueurs depuis 1850, le média Carbon brief a attribué aux anciens pays colonisateurs les émissions des territoires qu’ils ont occupés à l’époque. L’Europe arrive très haut dans ce classement et la France frôle le top 10 tandis que l’Inde et l’Indonésie voient leurs émissions reculer. Les Émirats arabes unis, eux, n’apparaissent pas.

· Flexion immersion. À Paris, l’Atelier des lumières et le Muséum national d’Histoire naturelle de Paris (MNHN) proposent deux nouvelles expositions immersives qui mettent en valeur la richesse et la fragilité des espèces qui foulent ou qui ont foulé notre planète. Reportage à lire sur vert.eco

· Pas de quoi se miner. Mardi, la Cour suprême de justice du Panama a donné raison aux opposant·es à l’exploitation d’une immense mine de cuivre à ciel ouvert, située à l’ouest du pays dans une région très riche en biodiversité. En déclarant inconstitutionnelle l’extension de la concession accordée à la compagnie canadienne First Quantum Minerals, l’institution a écouté la mobilisation populaire historique qui agite le pays depuis des semaines. - Le Monde

Au cœur du lobby pétrolier

Déni à problèmes. Comment les géants du pétrole ont-ils œuvré à la fois à la connaissance du réchauffement climatique et à l’organisation globale de son déni ? C’est ce que nous aide à comprendre ce documentaire très fouillé «Pétrole, un lobby tout puissant», diffusé en deux parties sur Arte.

© Arte 

+ Alexandre Carré, Aurélie Delmas, Jennifer Gallé, Anne-Claire Poirier, Justine Prados, Juliette Quef et Sanaga ont contribué à ce numéro