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Emmanuel Macron et Marine Le Pen doivent cesser leur « blabla » ou ce sera peine perdue pour la grande cause du climat.

Sur l'écologie, les promesses du candidat Macron s'entrechoquent avec le bilan du président
Le Vert à moitié vide. Le candidat à sa propre succession veut donner des gages écologiques aux électeur·rices insoumis·es. Hélas, son bilan contredit largement un discours empreint d'une apparente bonne volonté.
Promis : « la politique que je mènerai dans les cinq ans à venir sera écologique ou ne sera pas », a lancé ce samedi Emmanuel Macron depuis le jardin du Pharo à Marseille, ville qui a placé Jean-Luc Mélenchon en tête du premier tour de l'élection présidentielle. En cas de second mandat, le président jure qu'il fera de la France une « grande nation écologique ».
Citant les récentes alertes des scientifiques du Giec, il s'engage à aller « deux fois plus vite » dans la lutte contre le changement climatique. Les spécialistes auront grincé des deux dents : seulement deux semaines auparavant, son gouvernement a opposé une fin de non-recevoir au Conseil d'État, qui lui demandait quelles mesures il comptait prendre pour respecter les objectifs actuels de la France – une baisse de 40 % des émissions de CO2 d'ici à 2030 (par rapport au niveau de 1990). Une injonction qui intervenait dans le cadre de l'affaire Grande-Synthe, du nom de cette commune du Nord qui s'estime menacée par la montée des eaux. À l'instar d'une autre affaire, celle dite « du siècle », cette action en justice a entraîné la condamnation du gouvernement pour son inaction dans la lutte contre le changement climatique.

Pour complaire à l'électorat insoumis, largement tenté de bouder son bulletin de vote dimanche prochain, Emmanuel Macron a repris à son compte l'idée d'une « planification écologique », chère à Jean-Luc Mélenchon. Cette planification serait assurée par le premier ministre lui-même, flanqué de deux autres ministres.
L'un s'occuperait de la « planification énergétique », dans le but de faire de la France « la première grande nation à sortir de la dépendance au gaz, au pétrole et au charbon ». Hélas, si la loi Hulot votée en 2017 prévoit la fin de l'exploitation des hydrocarbures au-delà de 2040, la France a récemment fait pression à Bruxelles pour que le gaz, à l'instar du nucléaire et des renouvelables, soit considéré par l'Union européenne comme une « énergie de transition » susceptible de recevoir des financements « verts ».
Un autre ministre se chargerait de « planification écologique territoriale ». Au menu : décentralisation « massive », réinvestissement dans le fret ferroviaire (largement délaissé par l'exécutif depuis cinq ans) et rénovation thermique de 700 000 logements par an. Avec seulement 33 000 rénovations par an aux normes Bâtiment basse-consommation (BBC), ce chantier a été abandonné lors du quinquennat qui s'achève (Vert).
En 2018, la démission de l'ancien ministre de l'écologie Nicolas Hulot avait révélé combien les arbitrages étaient systématiquement rendus en faveur des ministères de l'agriculture ou de l'économie, au profit du moins-disant écologique (Europe 1). La nomination de ministres dédiés à la planification peut-elle changer quelque chose à l'influence des lobbies dans l'appareil d'État (Le Monde) et à la philosophie pro-business d'Emmanuel Macron ?
Enfin, le candidat a plaidé pour la création d'une « fête de la nature », « un grand moment autour de nos jardins, de nos paysages, de l’environnement et de notre planète » sur le modèle de la fête de la musique, qui se tiendrait chaque année vers la fin mai. Omettant que celle-ci existe déjà et qu'elle est soutenue par l’État. Fête ce que je dis...

· La semaine dernière, le gouverneur de l’agglomération de Santiago, la capitale chilienne, a annoncé un plan inédit de rationnement de l’eau pour faire face à la sécheresse historique. Ce plan prévoit des niveaux graduels de restrictions, dont le plus élevé prévoit des coupures intermittentes pouvant durer jusqu’à 24 heures. Une « méga-sécheresse » liée au changement climatique touche le Chili depuis déjà douze ans. - Le Monde
· Ce mardi, la pétition citoyenne qui demande à Jean Castex de faire une procuration pour le second tour de l’élection présidentielle dépasse les 32 000 signatures. Au premier tour de scrutin, le premier ministre avait emprunté un jet de l’État pour aller voter devant les caméras de télévision dans sa commune de Prades (Pyrénées-Orientales). Un aller-retour controversé de quelques heures, qui a émis environ cinq tonnes de CO2, soit la moitié des émissions annuelles d’un·e Français·e moyen·ne. - Vert
· Neuf départements français sont déjà placés en alerte sécheresse après un hiver peu pluvieux. La semaine dernière, des restrictions d’usage de l’eau ont été mises en place dans plusieurs départements, dont la Drôme et les Bouches-du-Rhône. L’irrigation agricole est limitée, et il est interdit aux particuliers d’arroser leur jardin en journée ou de laver leur voiture à domicile. Des restrictions d’ordinaire plus courantes pendant l’été qu’au début du printemps. - Libération
· Plusieurs centaines de militant·es de l’organisation Extinction Rebellion (XR) ont occupé pendant trois jours les environs de la porte Saint-Denis, dans le 10e arrondissement de Paris. Cette large mobilisation, appelée « l’inévitable rébellion », a rassemblé jusqu’à 1 500 personnes au plus fort du week-end. « Un blocage de trois jours pour une action de désobéissance civile non déclarée en préfecture, à un point névralgique de Paris, c’était assez inespéré », s’enthousiasme auprès de Vert Kubra, activiste chez XR depuis 2019. Avec cette occupation, qui tranche avec les actions « coup de poing » (blocages ciblés et rapides) qui sont sa marque de fabrique, l’organisation souhaitait créer une agora démocratique à plus long terme. L’objectif : offrir un espace de discussion sur les enjeux climatiques et sociétaux, et sensibiliser les passant·es sur l’urgence de la situation. Récit à lire dans le Monde.



« Entre 2 °C et 2,5 °C de réchauffement climatique, les littoraux se remodèleront pendant des siècles et des millénaires, menaçant de submersions des zones littorales dans lesquelles vit entre 0,6 et 1,3 milliard de personnes aujourd’hui. »
- Gonéri Le Cozannet, chercheur en géosciences
Contrairement à d’autres variables climatiques, le niveau de la mer continuera à s’élever bien après la stabilisation des températures globales, explique Gonéri Le Cozannet, chercheur en géosciences au Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Mais il existe de nombreuses solutions pour adapter nos littoraux à ce phénomène sans (trop) nuire au vivant. Retrouvez cet article, initialement publié par nos camarades de The Conversation France, sur vert.eco

Pour un débat télévisé d’entre-deux-tours à la hauteur des enjeux climatiques
Parler vrai. À l’occasion du débat de l’entre-deux-tours organisé ce mercredi à 21 h, plusieurs associations demandent aux journalistes chargés de sa modération, Léa Salamé (France 2) et Gilles Bouleau (TF1), de consacrer au moins 20 % de leurs questions à la crise écologique.
De semaine en semaine, le climat n’a représenté qu’entre 1,5 % et 5,5 % du temps médiatique de cette campagne selon le baromètre des quatre ONG de « L’Affaire du siècle » – Oxfam, Notre affaire à tous, la Fondation pour la nature et l’Homme et Greenpeace. C’est bien trop peu pour les signataires de l’action #DernierDébat lancée jeudi dernier : « les scientifiques nous alertent sur le fait que l'humanité ne dispose plus que de trois ans pour inverser la courbe des émissions de gaz à effet de serre si nous voulons contenir le réchauffement planétaire à 1,5 °C », rappellent-elles et ils, considérant que la causerie de demain sera peut-être le « dernier débat présidentiel avant que les effets du réchauffement climatique soient irréversibles (le prochain étant prévu pour 2027) ».

À l’origine de cette mobilisation, les collectifs Quota Climat et Plus de climat dans les médias sont motivés par le succès mondial du film Don’t Look Up, qui illustre les irresponsabilités politique et médiatique face à l’imminence d’une catastrophe planétaire (une gigantesque comète). Depuis janvier, ils s’organisent pour interpeller les médias sur leur manque de traitement du climat et du vivant (voir notre article). Plusieurs ONG se sont associées à l’opération #DernierDébat, telles Citoyens pour le climat, On est prêt, Alternatiba, le Shift project, France nature environnement, Extinction rebellion ou Attac.
Dans une lettre ouverte, les 25 structures rappellent les animateur·ices à leur devoir d’informer le grand public sur l’urgence climatique : « Nous vous demandons, avec une ferveur issue de notre anxiété collective grandissante, de dédier au minimum 20 % de vos questions à la crise écologique. De questionner les candidats, sans relâche, sur leur programme en la matière. Nous voulons des réponses articulées, chiffrées, cohérentes et surtout à la hauteur des enjeux ».

Toxic Tour
Beauté fatale. Apparus aux États-Unis dans les années 1990, les Toxic Tours (balades toxiques) proposent des visites guidées de lieux pollués. Répandu désormais partout dans le monde, ce genre de promenade est au cœur de la série Toxic Tour, diffusée sur Arte. Du « Colorado provençal », où la couleur ocre des paysages est liée aux boues rouges provoquées par l’exploitation d’alumine, à l’Andalousie, où l’acidité du fleuve Rio Tinto devient un argument marketing pour qui veut avoir la sensation de visiter la planète Mars, la réalisatrice Anne-Lise Carlo nous embarque vers six sites européens aux apparences trompeuses. « Je cherchais des lieux dont la pollution se verrait immédiatement à l'œil nu ; [où je serais] accompagnée par des gens qui vivent dans ces lieux pollués, en mesure de nous raconter leurs liens personnels à ces zones abîmées par l'industrie, leurs sentiments face à une telle transformation, et la perte de mémoire qu'elle provoque », détaille-t-elle à Vert. Une série de courts documentaires à retrouver sur le site d’Arte.

+ Loup Espargilière, Anne-Sophie Novel et Barbara Pagel ont contribué à ce numéro