Chères toutes et chers tous,
À l'instar de leurs collègues du monde entier, les journalistes de Vert ont passé leur dimanche à attendre fiévreusement que les scientifiques et représentant·es des Etats du globe ne publient le tome 3 du dernier rapport du Giec. Hélas, pour les raisons que vous verrez plus bas, celui-ci n'est toujours pas paru, mais cela ne devrait plus tarder. Si tout se passe bien, vous pourrez lire demain une édition spéciale sur les principaux enseignements de ce rapport crucial pour notre avenir.
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Le Giec s'apprête à mettre le point final de son imposant rapport, le temps de régler les derniers désaccords.

Le dernier volet du rapport du Giec retardé par les pays les moins ambitieux
Habemus pas l’time. L’approbation du dernier tome du nouveau rapport du Giec, consacré à l’atténuation de la crise climatique, a été retardée par certains désaccords au sujet, notamment, de l’indispensable sortie des énergies fossiles.
Après avoir publié un premier volet dédié aux données physiques des changements climatiques, puis un deuxième consacré à l’impact de ces changements sur les sociétés humaines et les écosystèmes, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec) s’apprête à faire paraître le troisième et dernier tome de son sixième rapport. Celui-ci se penche sur les pistes qui permettront l’« atténuation » de la crise climatique.
Tout au long du week-end, scientifiques et représentant·es de l’ensemble des pays du globe ont bûché en ligne sur les termes du « Résumé pour les décideurs », courte synthèse des milliers de pages de chaque volet du rapport, qui attribuent à ceux-ci un ton, des messages-clés et une portée politique. Chaque phrase fait l’objet d’une relecture scrupuleuse et peut donner lieu à des désaccords entre nations.
C’est précisément ce qui semble avoir retardé la sortie, prévue pour ce dimanche, du document. Selon le Guardian, l’Arabie Saoudite aurait notamment tenté d’amoindrir le discours sur la sortie des énergies fossiles en dernière minute. L’Inde aurait aussi demandé des concessions importantes en matière de finance. Pour l’heure, peu d’informations ont filtré quant à la teneur des échanges.
Pour espérer contenir le réchauffement à 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle, le Giec avait prévenu en 2018 que les États du globe devraient réduire leurs émissions de 45 % d’ici 2030, puis atteindre la neutralité carbone en 2050 – à cette date, il ne faudra plus émettre davantage de CO2 que ce que la planète est capable d’absorber. Un chemin semé d’embûches et dont personne ne connaît précisément le tracé.
Mais il est une voie que certaines nations refusent d’entrevoir : celle de la fin des hydrocarbures. Pourtant, l’Agence internationale de l’énergie l’a redit récemment : plus aucun nouveau projet fossile ne doit voir le jour, sous peine de dépasser cette limite de 1,5 °C, synonyme de bouleversements toujours plus amples et dangereux. L’électrification du mix énergétique mondial devrait être au cœur de ce tome 3.
« Tout retard dans la mise en œuvre d’une action concertée, globale et anticipée en faveur de l’adaptation et de l’atténuation nous fera rater la courte fenêtre d’opportunité, qui se referme rapidement, pour garantir un avenir vivable et durable pour tous », avaient alerté les auteur·rices du second volet, paru en février dernier. Hélas, d’aucuns préfèrent tout miser sur la technologie, dont certaines (capture et séquestration de carbone, avion à hydrogène, etc.) ne sont pas encore matures, plutôt que d’agir à la source sur les principales causes du bouleversement. Nous verrons dans quelques heures quelles leçons de ce rapport les « grands » de ce monde auront choisi de retenir.

· Vendredi dernier, le décret qui interdit le chauffage des terrasses de café est entré en vigueur. Repoussée depuis le printemps dernier au motif de la pandémie, cette mesure devrait permettre d’économiser 500 000 tonnes de CO2 par an, selon le ministère de la Transition écologique. Autres changements au 1er avril : une remise de 18 centimes par litre de carburant a été instaurée pour une durée de quatre mois ; des “chèques énergie”, d’un montant de 48 à 277 € seront distribués aux ménages les plus modestes ; enfin, ce jour a aussi signé la fin de la trêve hivernale, permettant l’expulsion des locataires pour loyers impayés. - Le Monde
· Samedi, des militant·es d’Alternatiba Paris, d’ANV-COP 21 et des Amis de la Terre ont perturbé le meeting d’Emmanuel Macron, qui se tenait à la Défense (Hauts-de-Seine). Elles et ils ont fait retentir des alarmes pour symboliser l’urgence climatique, et ont déployé une banderole « Criminel climatik » avant d’être escortés hors de la salle. « Emmanuel Macron fait partie des candidats dangereux pour le climat et la justice sociale », a déclaré l’activiste Marie Cohuet, sur Twitter.
· Dans une tribune publiée dans Vert ce dimanche, Théo Rougier, porte-parole du collectif Maintenant ou jamais, a invité les associations du mouvement pour le climat à appeler au vote malgré leurs réticences historiques à le faire, alors que l'abstention au premier tour de l’élection présidentielle promet d'atteindre des sommets. Par ailleurs, une « marche pour le futur » est organisée par ces mêmes ONG ce samedi 9 avril, pour tenter de placer enfin le climat au cœur de l’élection, à la veille du premier tour de la présidentielle.
· Depuis plusieurs jours, les agriculteur·rices français·es font face à un épisode de gel intense. Cette nuit, les températures sont descendues à -4 °C sur de larges zones, et même jusqu’à -6 °C localement. « Ces niveaux correspondent à une brûlure totale des bourgeons », a commenté Serge Zaka, docteur en agroclimatologie, sur Twitter. Des pertes sont à craindre dans les vignes et parmi les arbres fruitiers alors que l’éclosion précoce des fleurs due aux récentes chaleurs rend le gel tardif bien plus ravageur. L’an passé, un épisode du même type avait entraîné de lourdes pertes et déclenché l’activation du régime de calamité agricole (Vert).


« Un certain nombre de supporteurs, notamment français, se posent la question simplement de faire l'aller-retour pour chaque match »
- Ronan Evain, directeur de l'association Football Supporters Europe
À ce stade... Alors que les prix des hôtels montent en flèche à l’approche de la Coupe du monde de football, qui débutera à la fin novembre au Qatar, certains supporteurs se demandent s’ils ne vont pas rentrer chez eux en avion entre chaque match de leur équipe. Pas tout à fait dégoûtés par les milliers d’ouvriers morts sur les chantiers des stades qataris, ni par le fait que ceux-ci seront climatisés pour rendre la compétition supportable, il se trouve des Européen·nes fanas de ballon rond pour geindre du tarif excessif des billets et des chambres d’hôtel. Résultats, celles et ceux qui n’auront pas tout à fait les moyens de rester au Qatar pour y vivre la dolce vita pourraient se résoudre à faire la navette depuis leur domicile, à bord des coucous de Qatar airways. « Je crois que pour de nombreux supporteurs, s'ils souhaitent vraiment assister à la Coupe du monde, ce sera la meilleure option », se résigne, auprès de France info, Ronan Evain, directeur de l'association Football Supporters Europe.

« Nous avons de moins en moins de temps et les contraintes sont de plus en plus fortes »
Julien Lefèvre est chercheur au Centre international de recherche sur l’environnement et le développement (Cired) d’AgroParisTech et contributeur du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), dont les travaux portant sur l’atténuation du bouleversement climatique seront publiés ce lundi. Dans un entretien à Vert, il explique l’approche scientifique utilisée dans ce troisième volet, dédié aux scénarios de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
En quoi consistent les travaux menés par le groupe 3 du Giec, dont vous êtes l’un des auteurs ?
Là où le premier groupe se penche sur les sciences du climat et l’étude des changements climatiques passés et à venir, le groupe 2 se concentre sur les effets de ces changements et sur les manières de s’y adapter. Le groupe 3, quant à lui, s’intéresse à l’atténuation – la façon dont on peut baisser les émissions de gaz à effet de serre à venir pour limiter le changement climatique. Nous utilisons la littérature existante [c’est-à-dire l’ensemble des recherches publiées sur ces sujets, NDLR] pour explorer les enjeux humains, techniques et sociaux associés à cette réduction et pour élaborer différents scénarios d’atténuation des changements climatiques.

À quoi correspondent ces différents scénarios ?
Ils sont conditionnés à l’atteinte de différentes cibles climatiques : nous estimons ce qu’il faut faire pour rester dans la limite des 1,5 °C de réchauffement [objectif contenu dans l’Accord de Paris sur le climat, qui sera très probablement dépassé dans les toutes prochaines années selon l’ONU, NDLR], sachant que si nous ne faisons pas plus, nous risquons d’atteindre les 3 ou 4 °C degrés de réchauffement. Le message général est simple : nous avons de moins en moins de temps, c’est de plus en plus difficile et les contraintes induites sont de plus en plus fortes.
Retrouvez la suite de cet entretien sur le site de Vert.

Pénuries, montée des eaux, canicules : comment s’adapter ?
Il faut se magner. Chercheur à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri), Alexandre Magnan revient sur les principaux enseignements du deuxième volet du rapport du Giec consacré aux impacts climatiques et à l’adaptation dont il est co-auteur, dans un riche entretien mené par la journaliste Paloma Moritz pour Blast. Il y évoque les multiples risques, actuels et futurs, liés aux bouleversements du climat et les réponses, bonnes ou mauvaises, que la société peut apporter.

+ Anne-Sophie Novel et Juliette Quef ont contribué à ce numéro