On court-circuite les débats. Mercredi, le projet de loi sur l’accélération des renouvelables est arrivé au Sénat au même moment où le texte sur le nucléaire a été présenté en conseil des ministres. Deux lois dont le calendrier et l’ambition font encore débat.
Pour rattraper son retard dans les renouvelables – elle est le cancre européen, la France a annoncé cet été un texte de loi pour accélérer leur développement, dont beaucoup d’expert·es, d’élu·es et d’associations ont dénoncé le manque d’ambition (notre article). Examiné depuis ce mercredi en séance publique au Palais du Luxembourg, le texte risque d’être vidé de sa substance par les sénateur·rices.
La semaine dernière, déjà, ces dernier·es avaient commencé à détricoter le texte en commission à travers plusieurs amendements. Ceux-ci prévoyaient notamment de permettre aux maires des communes environnantes de s’opposer à un projet d’énergies renouvelables, ou interdisait l’implantation d’éoliennes en mer à moins de 40 kilomètres des côtes. « Tout ce qui va à l’encontre de l’accélération, notamment le fait de rendre des droits de véto plus accessibles, sera un mauvais signal envoyé sur la crédibilité du texte », estime auprès de Vert Zélie Victor, responsable de la transition énergétique au Réseau action climat (RAC), qui rassemble une trentaine d’associations écologistes.
En parallèle, le projet de loi sur l’accélération du nucléaire, qui vise à simplifier l’installation de nouvelles infrastructures, a été présenté en conseil des ministres ce mercredi. Une précipitation surprenante, alors que plusieurs concertations publiques ont à peine commencé pour récolter l’avis des citoyen·nes sur la part du nucléaire dans la transition énergétique. La concertation nationale sur le mix énergétique doit s’achever le 31 décembre tandis que la consultation organisée par la Commission nationale du débat public (CNDP) sur la construction de nouveaux réacteurs nucléaires court jusqu’au 27 février prochain.
Le gouvernement s’est défendu de vouloir court-circuiter les débats : « Le projet de loi porte sur les procédures administratives, pas sur les décisions sur les réacteurs », a précisé la ministre Agnès Pannier-Runacher dans les Échos.
Les associations ne sont pas convaincues. Ce calendrier est « un très mauvais signal envoyé, car on discute du projet de loi comme s’il était déjà acté, et cette politique du fait accompli nous soucie beaucoup », juge Zélie Victor du RAC. « Il est nécessaire que le débat public ait lieu de manière démocratique et surtout que les citoyens sentent que leur apport va vraiment compter dans la prise de décision. »
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