Les industriels qui fabriquent des alternatives végétales aux produits carnés étaient sur le grill. Ce mercredi, le Parlement européen a voté (à 355 voix contre 247) pour leur interdire l’usage de termes comme «steak», «saucisse» ou «hamburger» pour des produits sans viande. Toutefois, la mesure doit encore être négociée avec les États européens.
«Il s’agit de transparence et de clarté pour le consommateur et de reconnaissance pour le travail de nos éleveurs», a martelé Céline Imart, la députée (Parti populaire européen) à l’origine du texte. Numéro 2 de la liste Les Républicains aux élections européennes de 2024, Céline Imart est agricultrice, ancienne porte-parole du lobby Intercéréales et ex-membre de la FNSEA, le syndicat agricole majoritaire en France, partisan d’une agriculture productiviste. Il n’est «aucunement question d’interdire les alternatives végétales, mais je suis attachée à la valorisation des termes, à leur sens véritable», avait-elle plaidé mardi lors d’un débat animé dans l’hémicycle.
Les produits végétariens imitant la viande ont connu un essor ces dernières années, porté par le souci des consommateur·ices de manger sainement, de défendre le bien-être animal ou de réduire leur empreinte environnementale, alors que les élevages sont de gros émetteurs de dioxyde de carbone (CO2).
Diabète de type 2, cancers de la prostate, de l’estomac et du sang ou encore maladies gastro-intestinales : le régime végétarien permet de réduire le risque de développer de nombreuses pathologies, avait montré une analyse de l’Agence nationale de la sécurité sanitaire (Anses) parue le 13 mars dernier (notre article).
Les alternatives végétales accusées de «brouiller les repères»
Cette loi visant à interdire les dénominations comme «steak de soja» a divisé la droite. L’élu allemand Peter Liese trouve par exemple «dommage» que le Parlement européen consacre du temps à «une telle bêtise». «Nous ne devons pas prendre les consommateurs pour des imbéciles», si «un emballage indique “burger végétarien” ou “saucisse végétarienne”, chacun peut décider s’il veut l’acheter ou non», a-t-il réagi.
Les élu·es écologistes étaient vent debout contre le texte. La Néerlandaise Anna Strolenberg a tancé le «lobby de la viande» qui «tente d’affaiblir ses concurrents innovants dans le domaine alimentaire».
Mais, aux yeux de la filière Élevage et Viande française (Interbev), en «s’appropriant les dénominations de la viande à des fins marketing», les alternatives végétales «brouillent les repères et affaiblissent la reconnaissance d’un produit brut et 100% naturel».
En France, une tentative d’interdiction avortée
En 2020, les eurodéputé·es avaient rejeté une loi sur le même sujet. Les élections européennes de 2024 ont cependant changé l’équilibre des partis, accordant plus de place aux parlementaires de droite et d’extrême droite, qui revendiquent leur proximité avec le secteur agricole – en particulier avec les tenants de l’agriculture intensive.
En France, dans l’espoir de répondre à la colère agricole, le gouvernement Attal avait tenté d’interdire aux industriels de nommer des produits végétaux par des noms de produits carnés, par le biais d’un décret publié le 27 février 2024. Mais, le 28 janvier 2025, le Conseil d’État avait annulé cette interdiction.
Comme le rappelle Libération, le Conseil d’État s’était appuyé sur une décision de la Cour de justice de l’Union européenne en date du 4 octobre 2024, estimant qu’un «État membre ne saurait empêcher, par une interdiction générale et abstraite, les producteurs de denrées alimentaires à base de protéines végétales» d’utiliser des «noms usuels ou [des] noms descriptifs».
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