Il y a les bons élèves… et ceux qui peinent à suivre en matière de décarbonation. Lundi, l’organisation non gouvernementale Les Ateliers du Futur – qui réunit des décideur·ses engagé·es pour la décarbonation du monde l’entreprise – a dévoilé son palmarès 2025 des trajectoires climat des entreprises du CAC40. L’objectif de ce classement annuel, basé sur les documents extra-financiers fournis par les sociétés cotées en bourse, est d’évaluer la crédibilité de leurs stratégies de décarbonation. C’est-à-dire leurs feuilles de route pour sortir progressivement du recours aux énergies fossiles, émettrices de gaz à effet de serre (GES).
Plusieurs critères sont passés au crible. La clarté des objectifs de réduction des émissions de GES à horizon 2030 et 2050. Leur conformité avec l’Accord de Paris de 2015, ce traité qui engage les États du monde à contenir la hausse des températures bien en dessous de +2 degrés (°C) d’ici à la fin du siècle, par rapport à l’ère préindustrielle (milieu du 19ème siècle). Les moyens concrets mis en œuvre pour parvenir à ces objectifs. Et, pour finir, la stabilité de la gouvernance de l’entreprise.
Les entreprises disposent de plusieurs leviers d’action pour réduire leurs émissions : remplacer tous les appareils de chauffage à base de combustible fossile (gaz, fioul) par des équipements électriques ; privilégier des matières moins carbonées dans la production ; ou limiter les déplacements en avion des salarié·es.
Verdict : la firme pharmaceutique Sanofi s’impose en tête du classement avec un score parfait de 10/10, suivie de Schneider Electric (spécialiste de la gestion de l’énergie) et du géant automobile Stellantis, tous deux ex æquo avec 9,5/10. Thierry Langrenay, président de l’ONG Ateliers du futur et ancien assureur, souligne la progression «assez spectaculaire» des constructeurs automobiles – Renault et Stellantis, notamment – par rapport aux années précédentes. Mais aussi celle du groupe Bouygues, qui obtient la note de 7,5/10.
Concrètement, les bonnes notes, supérieures à 7/10, ne signifient pas que les entreprises sont neutres en carbone. Ces résultats témoignent seulement «d’investissements importants pour clarifier leur trajectoire de décarbonation», explique Thierry Langrenay.
TotalEnergies, ArcelorMittal ou STMicroelectronics parmi les mauvais élèves
Si Sanofi n’est pas étranger aux scandales d’ordre environnemental (notre article sur ses rejets illégaux de polluants dans le sud-ouest), la société a effectivement «défini des objectifs 2030 de baisse des émissions sur tous les domaines générateurs d’émissions. Des objectifs alignés avec les exigences dessinées par l’Agence internationale de l’énergie», précise le président des Ateliers du futur.
À l’autre bout du classement, certaines entreprises peinent encore à changer de trajectoire. À l’image de TotalEnergies (2/10) ou d’ArcelorMittal (1,5/10). Une performance d’autant plus préoccupante que – comme Vert le rappelait récemment – les deux sites industriels les plus polluants de France appartiennent au sidérurgiste : ceux de Dunkerque (Nord) et Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône).
Pour Thierry Langrenay, les mauvaises notes – celles qui sont inférieures à 7/10 – traduisent généralement trois types de blocages. il y a les entreprises qui refusent de publier leur stratégie, celles qui considèrent qu’il leur est impossible de réduire leurs émissions et celles qui «ne prennent pas encore la mesure de l’enjeu climatique».
Les banques et assureurs entrent dans le classement… avec de mauvais résultats
Fait notable cette année : pour la première fois, les banques et assureurs du CAC40 figurent dans le classement. Jusqu’à présent, leur absence était justifiée par le manque d’informations disponibles sur les trajectoires de leurs clients. Mais la nouvelle directive européenne sur la transparence, la CSRD, les oblige depuis 2025 à publier leurs objectifs climatiques.
Les résultats sont loin d’être brillants : les banques BNP Paribas, Société Générale et Crédit Agricole obtiennent toutes 6/10, tandis que l’assureur Axa affiche un score encore plus faible : 4/10. Thierry Langrenay constate une «absence de plan d’actions cohérent et complet en matière de décarbonation».
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