Tempéra dure. Pour la première fois, tous mois confondus, la température moyenne de juillet 2023 a atteint les 17°C à la surface de la planète. Un rappel inédit de notre vulnérabilité, selon le climatologue Christophe Cassou, qui met en avant les conséquences des fortes chaleurs sur les écosystèmes.
Jamais «depuis des centaines, voire des milliers d’années», la Terre n’avait connu un mois aussi chaud, selon le climatologue Karsten Haustein, de l’université de Leipzig (Allemagne). Pour lui, pas de doute, juillet 2023 a pulvérisé le record mondial de température. Un constat corroboré par les premières données satellitaires de l’observatoire européen Copernicus et de l’Organisation météorologique mondiale. Celles-ci font état d’un dépassement symbolique de 1,5°C de la température moyenne de la période préindustrielle (milieu du 19ème siècle), lors de la première et troisième semaine du mois. «Ce n’est pas la première fois qu’un mois dépasse de 1,5°C la moyenne préindustrielle : cela s’était déjà produit en 2016 et en 2020, mais c’est la première fois que cela intervient pendant l’été de l’hémisphère nord, lorsque la planète est la plus chaude», a commenté Karsten Haustein, en appui de son étude.
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Dès le début du mois, le thermomètre s’est affolé dans de nombreux pays de l’hémisphère nord. 53°C aux États-Unis, 52°C en Chine, 48°C en Sardaigne… Selon Copernicus, le 6 juillet a été la journée la plus chaude jamais enregistrée, avec une température moyenne de 17,08°C mesurée à la surface du globe. Les canicules se sont multipliées, les océans n’ont jamais été aussi chauds et de graves incendies ont ravagé des hectares de forêts, de la Grèce au Canada – où un millier de feux sont toujours actifs. Retour du phénomène climatique El Niño, canicules marines dans l’Atlantique, réchauffement sans précédent de l’Antarctique ; les fluctuations naturelles de l’océan ont renforcé le réchauffement déjà chronique, engendré par nos émissions de gaz à effet de serre.
Un scénario prévu par les projections scientifiques
«L’ère du réchauffement climatique est terminée, place à l’ère de l’ébullition mondiale», a réagi, jeudi dernier, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, exhortant les États à agir. «C’est décourageant, mais en fait on est train de vivre la trajectoire prévue», nuance Christophe Cassou, climatologue au Centre national de recherche scientifique (CNRS) et co-auteur du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). «La fausse perception d’un emballement climatique provient du fait qu’on se prend en pleine figure notre vulnérabilité», estime-t-il auprès de Vert. Pour lui, si la réalité du changement climatique est désormais acceptée, les conséquences concrètes du réchauffement global restent encore largement ignorées.
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Outre les records, les fortes températures entraînent un pic de mortalité dans les pays touchés par des vagues de chaleur. Elles détruisent les écosystèmes confrontés aux canicules marines et bouleversent la biodiversité concernée par les incendies. D’innombrables conséquences qu’il est encore difficile de mesurer. «En tant qu’humains, nous pouvons mettre des patchs, nous pouvons nous adapter aux crises, mais les écosystèmes, non, ce n’est pas le cas», s’alarme Christophe Cassou. Pour éviter d’alimenter les «discours populistes et anxiogènes», le climatologue propose de mettre davantage en avant la dimension sociale et les inégalités de ces évènements du climat. Et de s’interroger : «Est-ce qu’on va accumuler les nouveaux records à chaque degré supplémentaire ?»
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