Un bilan bilant. À quelques jours de l’ouverture de la 28ème conférence de l’ONU (COP28) sur le climat, plusieurs récentes études dressent un bilan catastrophique de l’état de la planète et de la lutte contre le dérèglement climatique. On fait le point sur la situation.
Le monde se dirige vers un réchauffement de près de 3 degrés
Si les États respectent leurs engagements climatiques actuels (ce qui n’est pas toujours le cas), le monde se réchauffera tout de même de 2,5°C à 2,9°C d’ici à la fin du siècle, a révélé la dernière édition de l’Emissions gap report, publié chaque année par l’ONU. Sous-titré «Disque rayé – les températures atteignent de nouveaux records tandis que le monde échoue à réduire les émissions (encore)», ce rapport a montré que les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont augmenté de 1,2% entre 2021 et 2022, atteignant un nouveau record de 57,4 gigatonnes de CO2-équivalent. Entre janvier et début octobre, on a compté 86 jours au-dessus de 1,5°C de réchauffement par rapport à l’ère préindustrielle, l’objectif de l’Accord de Paris. Le mois de septembre a été le plus chaud jamais enregistré à l’échelle mondiale.
Toujours trop de gaz à effet de serre dans l’atmosphère
Pour la première fois, en 2022, la concentration de dioxyde de carbone (CO2, le principal gaz à effet de serre) a dépassé de 50% le niveau de l’ère préindustrielle (417,9 parties par million – l’unité de mesure du CO2 dans l’atmosphère – en 2022 contre 278,3 en 1750), a dévoilé l’Organisation météorologique mondiale dans son bulletin annuel sur les GES. La concentration de méthane (au pouvoir de réchauffement 25 fois plus élevé que le CO2) s’est encore élevée, tandis que les niveaux de protoxyde d’azote n’ont jamais autant augmenté qu’entre 2021 et 2022. «La dernière fois que la Terre a connu une teneur comparable en CO2, il y a 3 à 5 millions d’années, la température était alors de 2 à 3°C plus élevée qu’aujourd’hui et le niveau de la mer excédait de 10 à 20 mètres le niveau actuel», a rappelé l’OMM.
On continue de produire bien trop de fossiles
Les États prévoient de produire deux fois trop de combustibles fossiles en 2030 (pétrole, gaz et charbon) pour contenir le réchauffement sous 1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle, a conclu le Production gap report, publié par les Nations unies et plusieurs instituts de recherche début novembre. «Les projets des gouvernements visant à accroître la production de combustibles fossiles compromettent la transition énergétique nécessaire pour parvenir à des émissions nettes nulles, ce qui remet en question l’avenir de l’humanité», a regretté Inger Andersen, directrice exécutive du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE).
(Presque) tous les voyants de la transition sont au rouge
Sur 42 indicateurs de la transition écologique, 41 révèlent des tendances insuffisantes, très insuffisantes, voire carrément à contresens, ont averti plusieurs organisations environnementales dans un rapport intitulé State of climate action 2023 (notre article). Seule la part de l’électrique dans les ventes de voitures est satisfaisante puisqu’elle a plus que triplé depuis 2020. Vingt-quatre indicateurs sont «totalement hors des clous», tandis que six d’entre eux vont même à contresens, dont le financement public des énergies fossiles.
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Les engagements des pays ne tiennent pas du tout la route
L’ONU a réalisé la synthèse des engagements de chacun des États (les Contributions déterminées au niveau national – CDN, ou NDC en anglais) des 195 parties de l’Accord de Paris. Le constat est cinglant : si les États appliquent l’ensemble de leurs promesses d’ici à 2030, les émissions de gaz à effet de serre mondiales ne baisseront que de 2% par rapport à 2019. Or, une diminution de 43% est nécessaire pour limiter le réchauffement à +1,5°C d’ici à la fin du siècle et ainsi éviter les pires conséquences du dérèglement climatique. «Les gouvernements font des petits pas», a fustigé Simon Stiell, secrétaire exécutif de l’ONU Climat, appelant à un sursaut international (notre article).
Les financements sont encore très largement insuffisants
Les besoins économiques pour financer l’adaptation au changement climatique des pays en développement sont dix à dix-huit fois supérieurs aux flux financiers actuels, a alerté l’ONU dans son Adaptation gap report, paru début novembre. Ils atteignent 215 à 387 milliards de dollars (environ 196 à 353 milliards d’euros) chaque année cette décennie, et devraient augmenter de manière significative d’ici à 2050. Ces vingt dernières années, les 55 pays les plus vulnérables ont déjà subi des pertes évaluées à plus de 500 milliards de dollars (456 milliards d’euros) en raison du changement climatique, rappelle le rapport.
Photo d’illustration : Adam Sébire / Climate Visuals
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