On n’en peut pluie. Sur le point de se terminer, 2024 a été une des dix années les plus pluvieuses en France depuis 1900, selon le bilan de Météo-France. C’est également l’une des cinq plus chaudes en raison du changement climatique.
Il n’a jamais autant plu à Paris qu’en 2024. Météo France y a relevé un peu plus de 900 millimètres d’eau tombés en un an, un record depuis que la capitale mesure ses précipitations, en 1873. En 2024, les Parisien·nes ont connu 700 heures de moins d’ensoleillement qu’en 2022.
Sur le territoire national, c’est également une des dix années les plus pluvieuses depuis 1900 selon le dernier bilan de Météo France publié le 19 décembre, avec plus de 15% de précipitations supplémentaires par rapport à la normale. Et le pays a connu un déficit d’ensoleillement, 10% en moins par rapport aux moyennes habituelles.
Malgré ce manque de lumière, 2024 a aussi été la cinquième année la plus chaude en France, derrière 2022 et 2023. La température moyenne à l’échelle du pays s’est élevée à environ 14°C, soit un degré de plus que la normale (moyenne calculée sur les trente dernières années). D’ici à 2050, elle continuera d’augmenter jusqu’à +2,7°C en raison du changement climatique global.
Des sols saturés en eau
Ce cocktail de tiédeur et de précipitations que nous avons connu en 2024 provient «des flux océaniques qui nous ont apporté plutôt de la douceur à des périodes hivernales ainsi que de la pluie», explique à Vert Sébastien Léas, prévisionniste à Météo France. «L’atmosphère plus chaude favorise la formation de rivières atmosphériques : ces couloirs de vapeur d’eau ininterrompus depuis les Antilles viennent jusqu’au territoire métropolitain», précise-t-il.
Résultat : des épisodes pluvieux à répétition ont saturé les sols en eau. Ceux-ci sont restés largement plus humides que la normale pendant huit mois, du jamais vu depuis trente ans. Les précipitations sur des terres déjà gorgées ont alors provoqué des inondations et des crues tout au long de l’année.
Dans les Hauts-de-France, en janvier, la pluie s’est accumulée «dans des zones où l’évacuation de l’eau était empêchée par un flux venant de l’ouest, sans oublier que certains secteurs du Pas-de-Calais sont sous le niveau de la mer et retiennent donc l’eau», décrypte Sébastien Léas.
Les conditions météorologiques ont aussi été favorables à des remontées d’air chargé d’humidité en provenance de la Méditerranée qui se sont bloquées sur les Alpes ou les Cévennes et ont généré des ruissellements sur les plaines. Cela explique les évènements extrêmes survenus à l’automne, avec des inondations dans le Var ou sur la Côte-d’Azur, comme à Cannes par exemple (notre article).
Le rapport de Météo France note qu’en Ardèche, «l’épisode du 15 au 18 octobre a généré des cumuls d’environ 500 millimètres en une journée, épisode le plus intense jamais observé sur ce département» (notre article).
Des records de températures pour les nuits estivales
Outre la pluie, cette année a aussi été une des cinq les plus chaudes. Alors pourquoi sommes-nous si peu à nous en être rendu compte ? Par rapport à 2022 ou 2023, «les anomalies ont davantage concerné les records de températures minimales que maximales», précise Sébastien Léas. Les températures les plus basses sont restées bien au-dessus des normales.
Météo France parle d’une «raréfaction du froid» sur le pays, avec une température qui n’est pas descendue sous -15°C en plaine. 2024 a été davantage caractérisée par des hivers très doux que par un été sec et chaud. Le Pic du Midi (Hautes-Pyrénées), à 2 880m d’altitude, a connu six nuits consécutives sans gel entre le 24 et le 29 janvier, par exemple.
A partir de juillet, les anomalies se sont caractérisées par des températures trop élevées la nuit pour que l’organisme se repose. Le pourtour méditerranéen a connu des pics comme à Aigues-Mortes (Gard) où il a fait 26,8 °C dans la nuit du 1er au 2 août. C’est la température minimale la plus élevée jamais enregistrée dans cette ville. A Nice, durant soixante jours consécutifs, le thermomètre n’est pas descendu sous 20°C après le coucher du soleil.
Les Français·es ont tout de même aussi connu deux vagues de chaleur durant l’été et certains pics des températures maximales à plus de 40°C en août, comme à Cazaux, en Gironde.
2024 «dans la trajectoire des années de plus en plus chaudes»
Sébastien Léas rappelle que 2024 s’inscrit «dans la trajectoire des années de plus en plus chaudes», induite par le changement climatique global. Il y a bien une variabilité de la météo selon les années mais désormais, «pour un record de froid battu, on bat dix records de chaleur», indique-t-il. Le rapport de Météo France montre à quel point le dérèglement du climat est visible à l’échelle du pays, avec neuf des dix années les plus chaudes postérieures à 2010.
Au niveau mondial, 2024 a dépassé les records de température selon l’observatoire européen Copernicus. Elle a été la première à franchir le seuil de 1,5°C de réchauffement par rapport à la période préindustrielle (notre article).
Si l’évolution des précipitations est, elle, très variable et difficile à anticiper, «des années encore plus humides que 2024 sont assez probables, en particulier dans une France à +2,7°C», souligne le rapport de Météo France. Le prévisionniste précise qu’avec le changement climatique, «la fréquence des épisodes les plus pluvieux est amenée à augmenter mais pas forcément sur les mêmes secteur ni de manière linéaire. Dans tous les cas, il faudra que les villes s’adaptent.»