La quotidienne

Un temps à JT

Chères toutes et chers tous,

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Il serait de bon ton que les médias mettent enfin le climat à la Une, avant que notre Terre ne se transforme en lune.


Sur le climat, les candidats doivent beaucoup mieux faire

Shit projects ? Le think tank The Shift Project vient de publier son analyse au sujet des ambitions des aspirant·es à l’Elysée en matière de climat. Il apparaît que toutes et tous proposent des mesures largement imprécises et insuffisantes ; Yannick Jadot (EELV) et Jean-Luc Mélenchon (FI) s’en sortent un peu mieux que leurs adversaires.

« Il y a du boulot » ; voilà le titre, en forme de soupir, qu’ont choisi les ingénieur·es du « Shift » pour leur rapport paru ce lundi. Plutôt que d’analyser les programmes des candidat·es, ils ont demandé à ceux-ci de récapituler dans une lettre leur projet pour placer la France sur la trajectoire de la neutralité carbone en 2050 ‒ à cette date, les dernières émissions de CO2 devront être compensées, notamment en plantant des arbres, pour se mettre en conformité avec la Stratégie nationale bas-carbone, la feuille de route qui fixe les étapes pour y parvenir.

Avec Jean Lassalle (Résistons !) Emmanuel Macron (LREM) est le seul à n'avoir pas joué le jeu. © Ludovic Marin / AFP

Hélas, il apparaît qu’aucun des candidat·es ne semble proposer une approche systémique et dûment chiffrée qui permette de répondre aux défis à venir. « Si tous ou presque veulent « réindustrialiser » la France, les principes qui permettraient de construire une industrie décarbonée ne sont exposés au mieux que très partiellement », note, par exemple, le document. Idem sur l’épineuse question de l’emploi, de la formation et des reconversions, « évoquée superficiellement, quand elle n’est pas ignorée ». Si toutes et tous conviennent désormais que la sobriété est nécessaire, notamment pour se libérer du gaz russe, celle-ci n’est jamais traduite en objectifs et en mesures précises, indique encore le rapport.

Parmi les nombreuses difficultés relevées par les auteur·rices : les discussions sur la transition énergétique se limitent à une opposition « nucléaire versus renouvelables » ; la sortie du pétrole est réduite à un débat sur la voiture électrique ou les transports en commun. Or, « le problème est bien plus vaste et délicat. Il réclame de la part du pouvoir exécutif une vision lucide, articulée et précise. »

Si Yannick Jadot, Jean-Luc Mélenchon et, dans une moindre mesure, Valérie Pécresse, proposent des mesures plus complètes que les autres, « on reste largement dans l’incantation, la pensée magique », a déploré Matthieu Auzanneau, directeur du Shift Project, dans les colonnes du Monde.

Pour tenter d’y voir plus clair, France info s’est associé aux « Shifteurs » ‒ des bénévoles proche du think tank ‒ pour passer au crible les programmes des candidat·es et vérifier leur conformité aux objectifs climatiques de la France.

· Mardi, dans une tribune au Monde, 17 député·es issu·es de sept groupes parlementaires ont réclamé que TotalEnergies mette un terme à ses projets EACOP et Tilenga, qui visent à pomper puis à livrer au travers d’un gigantesque pipeline des centaines de milliers de barils chaque jour entre l’Ouganda et la Tanzanie (notre article). « En Afrique, de la même manière qu’en Russie, TotalEnergies persiste à favoriser l’exploitation des énergies fossiles au détriment des droits humains et de l’environnement », jugent les élu·es, qui demandent à Emmanuel Macron de « stopper tout soutien diplomatique à ces projets climaticides, qui vont à l’encontre de l’ambition climatique prônée par la France sur la scène internationale. » - Le Monde (abonnés)

· Pour réduire la dépendance au gaz russe, le gouvernement envisage de créer un nouveau terminal de stockage de gaz naturel liquéfié (GNL) dans le port du Havre (Seine-Maritime), ont révélé les Echos ce weekend. S’il voit le jour, celui-ci permettra de recevoir des livraisons de méthane en provenance d’outre-Atlantique d’ici à 12 ou 18 mois, selon Vincent Demoury, délégué général du Groupe international des importateurs de gaz naturel liquéfié. Pour l’heure, le projet est étudié par le ministère de la transition écologique, TotalEnergies ou GRTgaz, l’un des gestionnaires du réseau de gaz français. - Les Echos (abonnés)

« Quand une vague de chaleur survient, on ne peut pas se contenter de filmer les Français en maillot de bain » 

- Sophie Roland, journaliste et formatrice

Ancienne de Cash investigation, Sophie Roland a travaillé pendant près de vingt ans pour les journaux télévisés et les magazines d’enquête de France Télévision. En 2016, après avoir enquêté sur les perturbateurs endocriniens, elle prend la mesure des liens entre santé et environnement. Elle réalise aussi à quel point le traitement médiatique de ces questions ne suffit pas. Après plusieurs formations sur les enjeux climatiques, elle embrasse le journalisme « de solution », qui veut traiter les problématiques autant que les réponses qui peuvent leur être apportées. Elle passe aujourd’hui la majeure partie de son temps à former étudiant·es et rédactions, comme elle le raconte dans un riche entretien à lire sur le site de Vert.

Couverture climatique : les citoyens demandent des comptes aux médias

Crise médiatique. Alors que les alertes des scientifiques passent toujours à la trappe des télévisions, radios et autres titres de presse écrite, des centaines de citoyen·es se mobilisent pour interpeller les médias sur leur manque de traitement du climat et du vivant. Voici un panorama de leurs revendications.

Motivé par le succès mondial du film « Don’t Look Up », qui illustre les irresponsabilités politique et médiatique quant à l’imminence d’une catastrophe planétaire (ici une gigantesque comète), le collectif Pour plus de climat dans les médias (ou Climat Médias) a lancé en janvier une pétition à l’attention des journaux télévisés (JT) et chaînes d’actualités en continu : « Trop souvent, les sujets climat et environnement sont relégués au second plan (voir plus loin!) alors que d’autres prennent une place démesurée », note le texte, qui rappelle que le transfert de Lionel Messi au club du Paris-Saint-Germain avait éclipsé la sortie du premier volume du dernier rapport du Giec en août dernier.

Avec près de 5 000 signataires et plus d’une centaine de membres actifs sur toute la France, Climat médias cible surtout les JT de France 2 et TF1 dont les audiences cumulées atteignent dix millions de personnes). Le collectif a développé son propre outil de suivi pour mettre les rédactions en chef face à leurs responsabilités, imploré·es de « parler plus et mieux du climat ».

Nombre de reportages consacrés au climat dans les JT, chaque mois, entre décembre 2013 et décembre 2021. Cliquez sur l'image pour afficher les détails de l'étude de Paul Leclercq.

Pour Eva et Anne-Lise, cofondatrice de QuotaClimat, c’est la sortie du dernier rapport du Giec qui a fait « tilt » : « tant en août 2021 avec le premier volet ou fin février avec le second volet, les médias n’ont pas assez alerté le public sur le sujet ». Elles ont initié une tribune, publiée dans le JDD le 12 mars, afin de réclamer un quota minimum de 20% de temps médiatique dédié au climat et à la biodiversité. « Actuellement, leur rôle doit être d’amener les candidats à la présidentielle à nous exposer, dans des programmes comportant objectifs chiffrés, ressources humaines, matérielles comme financières, échéances et modes de gouvernance, leurs solutions pour parvenir à respecter la stratégie fixée », plaident les deux jeunes femmes. Elles ont déjà reçu plus de 2 000 soutiens de la part de scientifiques, expert·es, journalistes, associations, entreprises, citoyen·nes et politiques de tous bords.

Pour découvrir d’autres initiatives portées à l’échelle nationale ou locale par des citoyens et activistes, lisez la version longue de cet article sur le site de Vert.

Le futur impossible de René Dumont

Dumont côté de l’histoire. Nous sommes en 1973. Premier candidat écologiste à l’élection présidentielle française, l’agronome René Dumont est l’invité de Jean-Pierre Elkabbach (déjà) dans l’émission Actuel 2. Très en avance sur son époque, il alerte au sujet du « futur impossible », des dangers de la chimie, de la pollution des sols, des défis agricoles, de l’accès aux ressources ou encore, des entraves au développement des pays pauvres. Si certains échanges paraissent tout à fait surannés, il est frappant de voir combien ses alertes sont actuelles et à quel point les voix écologistes ont été ignorées pendant des décennies. Une archive déterrée par l’Ina (Institut national de l’audiovisuel).

© LCP

+ Anne-Sophie Novel, Barbara Pagel et Juliette Quef ont contribué à ce numéro