La quotidienne

On pète les fonds

Chères toutes et chers tous,

Organisé par les Shifters, le festival Projection transition, se tiendra à Nantes, Toulouse, Paris et Bruxelles ce weekend. Ce festival, qui mêle écologie et cinéma, mettra cette année l’accent sur la justice climatique et sociale. Samedi 15 octobre à 14h, au cinéma des 7 Parnassiens (Paris 14), Vert y animera le débat « Transition écologique, atout ou péril pour l'emploi ? » après la projection du film En guerre de Stéphane Brizé. Toute la riche programmation est à découvrir ici.


L'extraction de ressources ne connaît pas de limites même si cela nous met sur une voie critique.


Exploitation marine : on touche le fond

L’amer monte. Pour la première fois, une entreprise minière s’apprête à exploiter les fonds marins pour y collecter des roches riches en métaux à destination des batteries de voitures électriques. Une pratique qui promet de détruire des écosystèmes encore inexplorés et qui pourrait constituer une « bombe climatique » à retardement.

Un engin à mi-chemin entre la moissonneuse batteuse et l’aspirateur géant s’apprête à plonger à 4 000 mètres de profondeur pour y collecter des nodules polymétalliques, en vue de fabriquer des batteries. Le 5 septembre, pour la première fois, l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) a autorisé The metals company (TMC), une compagnie minière qui fait de la prospection de ces gisements de métaux, à tester son système de collecte dans l’une des régions du monde les plus riches en nodules : la zone de Clarion-Clipperton, dans le Pacifique.

Riches en cobalt, nickel, cuivre et manganèse, ces roches de la taille d’une pomme de terre dorment au fond de l’océan depuis des millions d’années. © The metals company

« Ça ouvre encore un peu plus la voie à l’autorisation de l’exploitation à une échelle industrielle », regrette Anne-Sophie Roux, représentante française de l’ONG Sustainable ocean alliance. Car cette pratique pourrait se généraliser très bientôt. En juin 2021, l’État insulaire de Nauru, dans le Pacifique, a parrainé une demande de TMC pour ouvrir la voie à l’exploitation des fonds marins. Les premiers permis pourraient donc être délivrés dès juin 2023.

Or, les abysses sont l’écosystème le moins bien connu de la planète et l’on dispose de trop peu d’éléments pour modéliser les impacts d’une telle exploitation, qui détruirait l’habitat de nombreuses espèces à la base de la chaîne alimentaire. Mais pour TMC, c’est la seule manière de se libérer de la dépendance aux énergies fossiles et « la voie la plus propre vers les véhicules électriques ».

Exploiter les fonds marins pour sauver le climat est une fausse bonne idée, car les océans sont le premier puits de carbone du monde - ils absorbent 93 % de l’excès de chaleur induit par les activités humaines. « Retourner les fonds, c’est risquer d’altérer leur capacité de captage du CO2 tout en faisant remonter celui qui y est stocké », alerte Raphaël Seguin, chercheur en biologie marine à l’université de Montpellier. En somme, ça pourrait « créer une sorte de bombe climatique à retardement pour les générations futures ».

Pour lire ce décryptage en intégralité, rendez-vous sur vert.eco

· Le ministère de la transition écologique est le champion du recours aux cabinets de conseil privés, a révélé lundi un rapport publié dans le cadre de l’examen du budget 2023. 44 millions d’euros ont été dépensés par le ministère piloté par Christophe Béchu au cours du premier semestre 2022, loin devant le ministère de l’intérieur (23,5 millions). - Libération
 

· Mardi, le gouvernement a présenté son « budget vert », soit le classement des dépenses prévues pour 2023 en fonction de leur impact environnemental. D’après le ministère de l’économie, les dépenses favorables à l’environnement s’élèvent à 33,9 milliards d’euros, en hausse de 4,5 milliards par rapport à l’année dernière, contre 19, 6 milliards d’euros de dépenses défavorables (en hausse de 9,3 milliards). Cet ordre de grandeur exclut cependant les 45 milliards d’euros du bouclier tarifaire sur le gaz et l’électricité, qui devraient être classés parmi les dépenses défavorables, selon le Réseau action climat. - Le Monde
 

· Mardi encore, la première ministre Élisabeth Borne a annoncé la réquisition des personnels indispensables dans les dépôts pétroliers du groupe Esso-ExxonMobil, afin d’enrayer la grève pour une revalorisation des salaires qui dure depuis deux semaines. Le gouvernement menace de faire de même pour « débloquer la situation » chez TotalEnergies si les négociations n’aboutissent pas, alors qu’un tiers des stations services sont affectées par des pénuries. - Le Monde
 

· Ce matin, au tribunal judiciaire de Paris, le recours porté par les Amis de la Terre et Survie contre le projet de méga-pipeline de TotalEnergies en Ouganda et en Tanzanie a été renvoyé, à la demande des ONG, au 7 décembre. Celles-ci estimaient ne pas avoir eu assez de temps pour étudier les derniers arguments du pétrolier, envoyés moins de 36 heures avant l’audience. Relisez notre article pour tout savoir du projet Eacop et Tilenga.

Cliquez sur le dessin pour le voir en grand. © Sanaga pour Vert

Pompe à retardement. L’angoisse des salarié·es pour faire le plein et aller au boulot s’affiche en continu sur les chaînes d’info alors que de plus en plus de stations service sont à sec. Et si le blocage des raffineries et les pénuries d’essence nous permettaient de réfléchir à nos façons de nous déplacer ? s’interroge Sanaga. Ou pas…

Comment les fonctionnaires seront formés à la transition écologique

Fonctionerfs de la guerre. Mardi, le gouvernement a présenté le contenu et le calendrier de cette formation d'une vingtaine d'heures qui doit permettre de sensibiliser plus de 40 000 cadres de la fonction publique aux enjeux environnementaux.

La formation commencera dès la semaine prochaine pour 220 directeur·rices d'administration centrale ainsi que les membres de cabinets ministériels. Viendront ensuite quelque 300 préfet·es et ambassadeur·rices, à partir de janvier 2023. Elles et ils recevront la visite de personnalités de haut niveau, comme la paléoclimatologue Valérie Masson-Delmotte ou la présidente du Haut conseil pour le climat Corinne Le Quéré. La formation sera ensuite étendue afin que 25 000 cadres de la fonction publique d’État, 12 000 cadres de la fonction publique territoriale et 4 000 cadres de la fonction publique hospitalière soient formé·es d'ici 2023. 

L'objectif est d'acculturer les fonctionnaires aux trois crises écologiques : réchauffement climatique, perte de biodiversité et épuisement des ressources naturelles. Les ateliers seront divisés en trois modules théoriques et pratiques : la présentation des enjeux, des rencontres de terrains avec des acteurs impliqués, puis la mise en pratique via l'élaboration de plans d'actions. L'objectif est en effet que les cadres formé·es puissent à leur tour mettre leurs services en mouvement. Quant aux futur·es fonctionnaires, elles et ils seront sensibilisé·es dès la formation initiale.

Une autrice du Giec en garde à vue

Au rapport ! Julia Steinberg est économiste et co-autrice du dernier rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec). Hier, elle a été arrêtée alors qu'elle participait au blocage d'un axe routier en Suisse avec d'autres membres du collectif Renovate Switzerland. « L'action civile non violente, c'est très important, parce que notre gouvernement n'agit pas et qu'il nous reste très peu de temps », glisse-t-elle dans la vidéo tournée par l'association. « Je ne fais pas cela par plaisir, mais par pur désespoir et terreur », a-t-elle ajouté sur Twitter à sa sortie de garde à vue. Alors que le discours des scientifiques du climat reste largement ignoré par la classe politique, nombre d'entre elles et eux s'engagent dans des mouvements de désobéissance civile (relisez notre article).

© Renovate Switerland

+ Alban Leduc, Justine Prados, Sanaga et Gabrielle Trottmann ont contribué à ce numéro.