L'hebdo

La pale du large

Chères toutes, chers tous,

Toute la rédaction de Vert est en séminaire depuis jeudi. L'occasion pour l'équipe de réfléchir à l'avenir de Vert et aux projets à développer dans les mois à venir. 


L’éolien offshore est à la traîne, mais où est passé le capitaine ?


Pourquoi la France est-elle tellement en retard dans le domaine de l’éolien en mer ?

Moulins avant. Un nouveau rapport de la Cour des comptes souligne les difficultés, notamment de gouvernance, que rencontre le secteur en France.

Avec ses 20 000 kilomètres de côtes, le littoral français est l’un des plus étendus au monde. Une situation favorable au développement des énergies marines renouvelables (EMR). Dans le panorama de ces technologies permettant de produire de l’électricité décarbonée à partir du milieu marin, l’éolien en mer (aussi appelé offshore) paraît particulièrement prometteur. Dans ce domaine, deux types d’installation sont possibles. Avec des éoliennes amarrées («éolien posé») sur les fonds marins et situées à proximité des côtes ; ou des éoliennes «flottantes» qui, plus au large, peuvent tirer parti de vents plus puissants.

Depuis 2012, la France a lancé le déploiement de sept parcs maritimes avec un horizon de mise en service en 2027. Pour l’instant, seul le parc de Saint-Nazaire a commencé à produire de l’électricité fin 2022.

Le parc éolien offshore de Saint-Nazaire en mars 2023. © Jibi44 / Wikipedia

L'ambition de la France est d’exploiter 20 parcs éoliens d'ici à 2030, puis pas moins de 50 d’ici à 2050, comme le promettait Emmanuel Macron en février 2022.

Reste que les difficultés s’accumulent pour le secteur de l’éolien en mer made in France. Aux défis de l’intermittence du vent, du stockage et de l’acceptabilité sociale des projets s’ajoute celui de la gouvernance, pointe un nouveau rapport de la Cour des comptes rendu public mardi 17 octobre. «La planification spatiale de l’éolien maritime n’est pas définie dans un plan stratégique à moyen et long terme de façon précise et échelonnée dans le temps», note ainsi le document, pour qui l’objectif de 50 parcs éoliens en 2050 paraît, à ce stade, inatteignable.

«La définition par l’État des espaces destinés à l’éolien maritime est soumise à des délais excessifs», précise également le rapport. Pour que l’éolien français ne boive pas la tasse, les sages recommandent notamment la mise en place d’une «gouvernance et d’une organisation opérationnelle efficaces, sous la forme d’une structure de projet disposant à la fois d’autorité et d’autonomie», comme c’est notamment le cas pour le projet du Grand Paris.

· L’année 2023 a 99% de chances de devenir la plus chaude jamais enregistrée, selon un rapport de l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA) publié vendredi. Cette annonce arrive à la suite du mois de septembre le plus chaud jamais enregistré, à quelques semaines de la 28ème conférence mondiale des Nations unies (COP28) sur le climat, où les pays tenteront de s’accorder sur des politiques visant à limiter le réchauffement et à s’adapter à ses impacts. - 20 Minutes (AFP)

· Lundi, le gouvernement a réaffirmé sa volonté de mener le projet de l’autoroute A69 jusqu’au bout et le redémarrage des travaux, provoquant certaines tensions avec des militant·es accroché·es aux arbres le long du tracé. Les collectifs anti-A69 se préparent à une vaste mobilisation contre l’autoroute ce samedi. - Vert

· Mardi, la Commission européenne a remis aux calendes grecques son plan d’interdiction des produits chimiques dangereux. Pilier du Pacte vert européen, la révision du règlement Reach devait permettre d’interdire l’usage d’une multitude de produits chimiques néfaste à l’horizon 2030. Elle est absente du programme de travail de la Commission qui court jusqu’en juin 2024, et qui doit être rendu public aujourd'hui. Les ONG dénoncent «une trahison» de l’UE, qui «favoriserait les intérêts à court terme des industries toxiques, au détriment des citoyens». - Le Monde

· Mercredi, une nouvelle étude de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a établi un lien entre le risque de développement d’une leucémie chez les enfants et la surface couverte par les vignes autour de leur maison. 3 711 enfants de moins de 15 ans atteints de leucémie, comparé·es à un groupe témoin de 40 196 autres enfants ont été étudiés sur la période 2006-2013. Quand la densité de cultures viticoles augmente de 10% dans un rayon d’un kilomètre, le risque de développer une leucémie augmente, lui aussi, de 10%. En cause, l’usage intensif des pesticides dans les vignes.

«Cette décision m’a coûté mon travail, mais je pense que c’était la bonne chose à faire»

 

Décollage militant. La semaine dernière, un scientifique italien et militant du mouvement Scientist rebellion a été licencié pour avoir refusé de prendre l’avion. Chercheur en psychologie sociale, Gianluca Grimalda a raconté sa mésaventure dans le Guardian. Il s’était établi six mois plus tôt en Papouasie-Nouvelle-Guinée pour y étudier les effets sociaux du changement climatique. Touché par l’éco-anxiété, il s’était mis d’accord avec son employeur, l’Institut pour l’économie mondiale (IfW) basé à Kiel, en Allemagne, pour faire un aller-retour le plus décarboné possible. En février, le chercheur avait détaillé sur les réseaux sociaux son parcours de 16 000 km en train, bateau et bus sur les 22 000 km qui le séparaient de l’île. Soit une économie de 2,4 tonnes de CO2 par rapport à un trajet en avion. En retard dans ses recherches, il a dû décaler son retour en Allemagne. L’Institut lui a alors imposé de «rentrer en avion». Il a refusé, ce qui lui a valu d’être licencié. Sans regrets.

· Avis de déchets. Le Conseil constitutionnel a été saisi par soixantes réquérant·es, dont de nombreuses associations, qui estiment que le sort des prochaines générations n’est pas suffisamment pris en compte dans le projet d’enfouissement des déchets radioactifs prévu à Bure (Meuse) – une grande première. Récit de cette audience inédite, qui s’est tenue ce mardi, à lire sur vert.eco

· Si traiter les lieux infestés avec des insecticides reste le moyen le plus répandu d’éradiquer les punaises de lit, la congélation constitue un autre recours, moins connu mais très énergivore. Visite dans les frigos de la sociéte Freez’it, à Romainville, en banlieue parisienne, à lire sur vert.eco

Une religieuse plaque un militant écologiste au sol. © Capture d'écran de France 3

Plaquage aux folles. Lundi, en plein cœur de l’Ardèche, des écologistes du collectif Les Amis de la Bourges ont été vivement chahuté·es par des religieux - dont des sœurs - de la Famille missionnaire de Notre-Dame. Les militant·es étaient venu·es s’opposer au redémarrage des travaux du centre spirituel Notre-Dame des neiges, vaste site qui prévoit d’accueillir 3 500 pèlerins à terme à Saint-Pierre-de-Colombier. Les opposant·es ont récemment découvert une plante protégée sur le lieu des travaux, justifiant à leurs yeux la mise en pause du chantier, le temps que les autorités se prononcent sur le sujet. Les membres de la communauté ont également défendu de leur corps et de leurs chants une tractopelle pour tenter de relancer les travaux. Mouvement proche des milieux catholiques ultraconservateurs, né à Saint-Pierre-de-Colombier en 1946, la Famille missionnaire a été pointée du doigt par la Miviludes en 2021, qui fait état d’«inquiétudes sérieuses» concernant de potentielles dérives sectaires. - Récit et images de France 3

· En mode slow. Inauguré mardi soir, le Fashion green hub est un nouveau tiers-lieu du 13ème arrondissement de Paris qui se donne pour objectif d’aider la mode à faire sa transition. Ateliers d’upcycling, formations destinées à des personnes éloignées de l’emploi ou en situation de handicap, boutique éphémère de vêtements locaux : ce vaste projet entend emmener la mode vers davantage de durabilité et d’inclusivité. En 2015, un premier «Fashion green hub» s’est installé à Roubaix (Nord), centre historique du textile français. - Vert

· C’est joli. Le concours Wildlife photographer of the year, organisé par le Muséum d’histoire naturelle de Londres, vient de dévoiler son palmarès pour l’année 2023. Le photographe français Laurent Ballesta a reçu le grand prix pour la deuxième fois. Environ 50 000 photographies étaient présentées cette année. Notre sélection est à retrouversur vert.eco

«Tourner de cette manière permet une vraie connexion aux éléments, car tout notre être est concentré sur le vent, la mer, les voiles, et c’est vachement beau.»

Ne plus se voilier la face. Cet été, les musicien·nes Yann Tiersen et Emilie Quinquis se sont lancé un défi : réaliser une tournée de trois mois en terres celtiques à la voile entre la Bretagne et les îles Féroé à bord de leur bateau «Ninnog». De quoi concilier tournées internationales et valeurs écologistes. Entretien avec le pianiste et compositeur breton, à lire sur vert.eco

L’amour et les forêts

Bottes à nique. Tourné à l’automne 2022 dans le pays de Caux en Normandie, territoire de travail et de création que le cinéaste et jardinier Pierre Creton explore dans ses films, Un Prince suit Pierre-Joseph, jeune adulte à la découverte de la sexualité et de la botanique. Accompagné dans ses explorations par des personnages énigmatiques et fraternels, humains et non-humains (mention spéciale à l’ânesse Gilberte et à la chienne Ordet), ce long métrage récompensé à la Quinzaine des cinéastes au dernier Festival de Cannes, qui est sorti en salles mercredi, s’expérimente à la manière d’un rêve plein de brume, d’odeurs forestières et de rencontres inoubliables. Vert vous le recommande chaudement.

© JHR Films

+ Alexandre Carré, Loup Espargilière, Jennifer Gallé, Juliette Mullineaux, Juliette Quef et Sanaga ont contribué à ce numéro