Sur Instagram et TikTok, les vidéos de ces unboxing – ouvertures de colis – fracassants se multiplient depuis quelques jours : lunettes de protection sur le nez et marteau en main, plusieurs personnalités très suivies, dont l’ancienne Miss France Eve Gilles, se filment en train de briser un bloc de glace à l’intérieur duquel se trouvent des produits de beauté.

Plus précisément : trois minuscules flacons, issus de la gamme de produits antirides Revitalift de L’Oréal. «C’est le meilleur colis de toute ma vie», s’enthousiasme l’influenceuse beauté @carxmakeup, suivie par plus de 400 000 abonné·es sur TikTok, dans une vidéo publiée jeudi dernier. Une expérience hors du commun, certes, mais à quel prix écologique ?

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Contacté par Vert, L’Oréal a annoncé avoir réalisé cette opération «auprès de 30 influenceuses dans Paris et sa proche banlieue pour mettre en avant les bénéfices “effet glass”» de sa gamme. Le groupe n’a pas détaillé davantage, mais le bilan environnemental de cette campagne laisse peu de place au doute : pour chaque envoi, il a fallu mobiliser des litres d’eau, consommer de l’énergie pour congeler ces glaçons géants, utiliser du polystyrène pour l’emballage, et acheminer le tout dans des camions frigorifiques. À cela s’ajoute la fabrication des marteaux et lunettes, fournis spécialement pour l’opération – du jetable conçu pour être utilisé le temps d’une vidéo.

Des antirides… pour des influenceuses de 25 ans

«Un bloc. De glace. Livré chez soi. En 2025. Tout ça pour une vidéo de 30 secondes. Et pour quoi ? Promouvoir une gamme anti-ride, envoyée à des influenceuses dont certaines n’ont pas même pas 25 ans», ironise sur Instagram le collectif Paye ton Influence, qui met en lumière les questions de transition écologique du milieu de l’influence. Amélie Deloche, co-créatrice du collectif, considère que c’est une campagne «profondément hors sol. Créer de la surprise ? Pourquoi pas. Créer de l’absurde, du jetable, de l’incohérence environnementale ? Non.»

En octobre dernier, Vert avait révélé que la gamme de produits Revitalift, promue par cette campagne, contenait des PFAS – ces polluants éternels dangereux pour la santé et l’environnement. À la suite de notre enquête, le groupe L’Oréal avait assuré que la liste des ingrédients, disponible en ligne, n’était pas à jour – et que l’ensemble des références de la gamme avaient été reformulées sans PFAS. Pourtant, ces produits n’avaient pas été rappelés et les stocks s’écoulaient toujours. Nous en avions par exemple retrouvé dans des commerces à Lyon (Rhône).

D’après Amélie Deloche, ce n’est pas la première fois que des marques réalisent de telles campagnes promotionnelles. Elle a déjà constaté cette «démesure» dans des colis destinés à la presse : des mini-écrans numériques intégrés dans des boîtes pour diffuser un message promotionnel. Ou encore des cartons géants utilisés pour emballer un seul flacon. «Plus le colis est incroyable, plus il aura de chances d’apparaître dans une vidéo», explique-t-elle à Vert.

Interrogée par Vert, l’Oréal se dit «à l’écoute des commentaires reçus et déterminé à poursuivre sa démarche d’amélioration continue.» Et tente de rassurer : «Cette campagne ciblée n’a pas vocation à être déployée plus largement ou renouvelée.»

Dans son manifeste «Parce que notre planète le vaut bien», diffusé sur YouTube il y a quatre ans, L’Oréal promettait déjà d’«ouvrir une nouvelle voie vers un avenir plus responsable, pour garantir une transition juste et durable dans l’industrie de la beauté.»