Le drame s’est produit le 15 novembre 2024 à Paris. Dans le 17ème arrondissement, boulevard Malesherbe, un automobiliste a écrasé Paul Varry, un cycliste qui s’était positionné devant lui pour l’empêcher d’emprunter une piste cyclable avec son véhicule. Paul est décédé sur le coup. Deux jours plus tard, le 17 novembre, une foule s’est massée sur la place de la Madeleine, à Paris, en soutien à sa famille. Dans une ambiance qui a oscillé entre recueillement, colère et incompréhension, plusieurs représentant·es d’associations de cyclistes ont dénoncé une situation de violences généralisées dans l’espace public.
En réponse, un rapport sur «la prévention des violences routières et le partage de la voie publique», piloté par Emmanuel Barbe, inspecteur général de l’administration et ancien délégué à la sécurité routière, a été remis au ministre des transports, lundi. Il se fonde sur des centaines d’heures d’auditions et de concertations et sur l’examen de plusieurs dizaines d’études sur les mobilités. En tout, il compte 122 pages, qui comprennent 40 recommandations, dont 18 jugées «prioritaires».

Parmi elles : obliger les voitures à franchir entièrement la ligne médiane pour dépasser un cycliste, ou former les conducteur·ices à l’empathie en intégrant le ressenti des cyclistes à l’examen du permis. «Cette mesure est très importante, a réagi auprès de Vert Céline Scornavacca, coprésidente de la Fédération des usagers et usagers de la bicyclette (FUB). C’est au moment de la formation que s’implantent les idées de respect. Les automobilistes ne doivent pas seulement savoir réagir en cas de problème.»
À ces mesures s’ajoute la création de normes – par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le Cerema – en matière d’infrastructures. L’objectif est par exemple que toutes les pistes cyclables soient construites à l’identique. «Normer, ça permet d’éviter de faire du bricolage. On n’aurait jamais l’idée de faire ce que l’on veut avec des routes pour voitures !», a réagi auprès de Vert Stein Van Oosteren, militant-cycliste et auteur de plusieurs livres de référence sur le vélo.
Création de zones 30, vidéoverbalisation, encadrement des publicités automobiles…
Dans ce rapport, on note aussi la volonté de mettre en place de la vidéoverbalisation – un système qui permet de sanctionner automatiquement certaines infractions grâce à la vidéosurveillance – ou encore l’encadrement des publicités automobiles. «Dans les publicités, les voitures évoluent dans un monde presque dépourvu de piétons, et sans cyclistes», note le rapport. Par ailleurs, ces publicités «incitent à la virilité et au culte de la vitesse et de la domination, analyse Stein Van Oosteren. Elles modifient la perception des risques, surtout chez les hommes».
Création de zones 30 dans chaque agglomération, apprentissage de la sécurité routière dès la maternelle, mise en place d’études pour évaluer le niveau réel de violence sur la voirie… La publication de ce rapport «va faire date», estime Céline Scornavacca. Elle se réjouit : «C’est la première fois que l’on voit apparaître des termes comme “partage de la voirie”, “empathie”, “biais de genre”, “courtoisie”, “respect” !». Stein Van Oosteren se satisfait aussi de ce travail et espère «qu’il ne retournera pas dans un tiroir».
Après avoir été remis aux ministères des transports et de l’intérieur lundi, le rapport fera l’objet d’une étude interministérielle. Philippe Tabarot, ministre des transports, souhaite «que ces recommandations soient examinées avec le plus grand soin». Il assure qu’il «veiller[a], en tant que ministre, à ce que ce travail permette de faire cohabiter tous les modes de transport, sans les opposer».
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