À la Conférence des Nations unies sur l’océan (Unoc), qui se tient cette semaine à Nice (Alpes-Maritimes), on croise des diplomates, des représentant·es d’entreprises, des lobbyistes… et des activistes de la société civile. C’est le cas de Titouan Pilliard, 19 ans. Navigateur, activiste écolo, étudiant, créateur de contenus sur les réseaux sociaux : il n’a pas peur de jongler entre de nombreuses casquettes. Depuis des années, il fait de son combat pour la protection de l’océan sa priorité.

Né en Bretagne, il a été sensibilisé aux enjeux environnementaux dès son plus jeune âge, notamment lors de voyages qui l’ont confronté à des enjeux tels que la pollution de l’air à Shanghai (Chine) – où il a vécu –, ou la montée des eaux en Polynésie française. Mais c’est surtout lors de ses sorties à la voile, sport pratiqué à plus ou moins haut niveau par toute sa famille, qu’il a pris conscience de la fragilité de l’océan et de la nécessité de le préserver. Son père, Romain Pilliard, est un navigateur professionnel – il a participé deux fois à la Route du Rhum, course transatlantique en solitaire qui relie la Bretagne à la Guadeloupe tous les quatre ans.
Entre ses 14 et ses 18 ans, Titouan Pilliard s’est impliqué auprès de l’association Children for the oceans, qui propose à des adolescent·es de faire de la sensibilisation dans les écoles. Un engagement qu’il poursuit désormais au sein du projet Use it again for youth, une communauté d’une quarantaine de jeunes engagé·es autour de la préservation de l’océan, formée début 2025.
Chaque membre a pour mission de donner des conférences, de réaliser des missions de sensibilisation et de recruter d’autres ambassadeur·ices pour faire grandir le réseau. «L’impact est bien plus fort quand des jeunes parlent aux jeunes, car on peut s’identifier les uns aux autres et se dire qu’on peut tous agir», considère Titouan Pilliard. Ce réseau est une déclinaison du projet de son père, Use it again, lancé en 2018 pour promouvoir l’économie circulaire et l’éducation aux enjeux marins. À cette fin, Romain Pilliard avait racheté et retapé un trimaran usagé pour participer à sa première Route du Rhum.
Les réseaux sociaux, une arme de choix pour militer
Titouan Pilliard a un sujet de prédilection : la question des aires marines protégées, un enjeu majeur de la conférence de l’ONU sur l’océan, à Nice. Il y a fait quelques allers-retours depuis Marseille pour animer une conférence, participer à une régate et parler de ses engagements. «C’est LE sujet en France où il faut vraiment obtenir des avancées, car seulement 1,6% des aires sont fortement protégées», détaille Titouan Pilliard.

En avril 2024, pour sensibiliser sur ce sujet, il s’est rendu à Athènes (Grèce) pour la conférence internationale Notre océan, auprès de la Sustainable ocean alliance – une coalition de jeunes ambassadeur·ices qui militent pour le grand bleu. Quelques mois plus tard, il a mené une campagne sur les réseaux sociaux auprès de la chanteuse islandaise engagée Björk : il a pris le contrôle du compte Instagram de l’artiste pendant une journée pour alerter sur la politique d’Emmanuel Macron en matière d’aires marines protégées. Une opération pilotée par Titouan, mais réalisée avec deux autres activistes, Camille Étienne et Claire Nouvian, afin d’alerter sur le sujet au-delà des frontières francophones.
Les réseaux sociaux font partie intégrante du quotidien de Titouan Pilliard, qui partage ses expériences de voile, interpelle des décideur·ses politiques et raconte ses missions de sensibilisation. «C’est un excellent moyen de donner la parole aux gens pour mettre la pression sur les dirigeants et qu’ils prennent enfin des décisions concrètes», explique le jeune activiste. C’est aussi une façon de s’adresser à un public varié et d’amplifier la diffusion de ses messages. «La plupart des gens me suivent pour mes aventures de voile, alors quand je parle de la protection des océans, ça me permet de toucher une autre communauté que les personnes déjà engagées», souligne-t-il.
Direction la Route du Rhum
En parallèle, Titouan Pilliard est aussi étudiant en première année de bachelor dans une école de commerce de La Rochelle (Charente-Maritime) – une ville qu’il n’a pas choisie au hasard, puisqu’elle lui permet d’être au bord de la mer au quotidien. Il n’est pas toujours facile pour lui de combiner ses activités extrascolaires avec ses études, mais son école est «compréhensive» et le laisse mener de front tous ses projets.

Car si ses engagements militants n’étaient pas suffisants, le jeune navigateur se prépare aussi à partir au large en 2026. Il aura alors 20 ans et sera le plus jeune skipper au départ de la Route du Rhum, à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine). Il y participera aux côtés de son père, qui prendra également le départ de cette course en solitaire direction la Guadeloupe. Pour Titouan, un rêve de longue date se réalise : «Quand mon père a fait la Route du Rhum en 2018, j’étais épaté par le fait qu’il soit seul en mer avec l’objectif de traverser l’océan en bateau.»
Lors de cette transatlantique 2026, le jeune skipper compte porter ses engagements haut et fort. «Participer à cette course mythique à deux est une belle aventure humaine et sportive, mais c’est avant tout un moyen fédérateur de sensibiliser à l’importance d’une urgente protection de l’océan», explique son père, Romain Pilliard.
Titouan participera à la Route du Rhum sous la bannière de Use it again for youth dans un monocoque rénové, acquis grâce au mécénat de son partenaire, Forvis Mazars. En ce moment, il répare son bateau pour le préparer à la course. Son objectif : pousser la démarche engagée jusqu’au bout en retaillant d’anciennes voiles de bateaux pour les adapter au sien, en réutilisant des panneaux solaires usagés et en intégrant une dimension scientifique au projet à travers des mesures de la pollution sonore sous-marine prévues lors de la transatlantique.
«Je veux montrer qu’il est possible de vivre une aventure exceptionnelle tout en faisant bien les choses», souligne Titouan Pilliard. Pas de doute : son jeune âge, cette participation père-fils et ses multiples engagements en faveur de l’océan feront beaucoup parler de lui lors de la prochaine Route du Rhum.