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«Trop souvent, la question du bruit des océans a été mise de côté» : à Nice, une grande coalition contre la pollution sonore sous-marine

Sonar de vivre. Dans le cadre de la conférence mondiale sur l’océan de Nice, 37 États ont lancé ce mardi matin une «coalition de haute ambition pour un océan plus silencieux». Ils s’engagent à prendre des mesures pour réduire le bruit sous-marin et ses impacts sur la biodiversité.
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C’est une grande première qui pourrait faire du bruit. Canada, Chili, Belgique… 37 pays ont annoncé ce lundi une grande alliance contre la pollution sonore sous-marine. Cette «coalition de haute ambition pour un océan plus silencieux» a été lancée depuis le port de Nice (Alpes-Maritimes), en parallèle du sommet mondial sur l’océan (notre article).

«Le bruit impacte l’ensemble de la vie sous-marine, notamment les mammifères», souligne Camille Vicet, porte-parole du Fonds international pour la protection des animaux. © Getty images/Unsplash

Les États signataires, dont le nombre est amené à évoluer ces prochains jours et qui devraient être rejoints par la France, se sont engagés à prendre des mesures pour limiter le bruit d’origine humaine (notamment celui des bateaux commerciaux) qui perturbe les espèces marines. Conception de navires plus silencieux, mesures de réduction de bruit dans les aires marines protégées, partage de technologies entre pays… plusieurs grands axes de coopération ont été définis.

«Le bruit impacte l’ensemble de la vie sous-marine»

«Trop souvent, la question du bruit des océans a été mise de côté dans le discours environnemental mondial», rappelle Juan Carlos Navarro, ministre de l’environnement du Panama, l’un des pays à l’initiative de la coalition. Si d’autres sources de pollution comme le plastique (notre article) sont au centre de l’agenda international, «la pollution sonore était très sous-estimée jusqu’à récemment», souligne Camille Vicet, porte-parole du Fonds international pour la protection des animaux (Ifaw).

Navigation commerciale, forages pétroliers, éolien en mer… «Le bruit impacte l’ensemble de la vie sous-marine, notamment les mammifères. Il leur cause du stress, les fait fuir leur habitat naturel, les éloigne de leurs proies, de leurs partenaires pour se reproduire», liste Camille Vicet.

Baleines, orques, bélugas… les cétacés sont en première ligne de cette menace invisible, qui s’ajoute à d’autres (surpêche, changement climatique, autres pollutions…). Mais c’est l’ensemble des écosystèmes marins qui peut être impacté, y compris certaines plantes aquatiques. «Dans l’océan, le son, c’est la vie : tous les habitants du milieu marin, faune et flore, en dépendent», rappelait en 2022 dans un article du Monde le bio-acousticien Michel André.

Une mesure phare : la réduction de la vitesse des navires commerciaux

Son association porte depuis plusieurs années une mesure «facile» à mettre en place, selon Camille Vicet : «Il suffit de diminuer la vitesse des navires pour réduire, voire arrêter, le bruit sous-marin». Selon un rapport publié en 2022, une réduction de la vitesse d’en moyenne 10% à l’échelle mondiale permettrait de diminuer le bruit sous-marin de 42%, mais également de limiter de moitié le risque de collision avec les cétacés et de contribuer à la baisse des émissions de gaz à effet de serre.

Si plusieurs compagnies de transport travaillent déjà sur le sujet, une obligation à l’échelle nationale, voire internationale, serait plus efficace, ajoute Camille Vicet : «Si quelques-unes les appliquent et pas les autres, les entreprises vont avoir une différence concurrentielle qui fait qu’elles n’auront pas intérêt à réduire les vitesses.»

Le soutien de nombreux États en faveur d’un «océan plus silencieux» devrait donc aider à accélérer les choses. L’Ifaw milite depuis plusieurs années pour mettre en place cette réduction de vitesse des navires dans tous les ports européens. Une pétition devrait être présentée cette année à la Commission européenne, qui a déjà apporté son soutien à la toute nouvelle coalition contre la pollution sous-marine.