Dans l'actu

Les centaines de fuites de méthane de l’industrie fossile, un espoir pour le climat ?

  • Par

Tu méthane. Une enquête du Guardian révèle l’énorme pol­lu­tion au méthane générée par des instal­la­tions pétrolières et gaz­ières en 2022. Bonne nou­velle : réduire les fuites de ce puis­sant gaz à effet de serre per­me­t­trait d’agir rapi­de­ment sur la crise cli­ma­tique.

En 2022, le quo­ti­di­en bri­tan­nique a recen­sé plus de 1 000 évène­ments «super-émet­teurs» de méthane dans le monde, dont la majorité sont liés à des fuites au sein d’infrastructures pétro-gaz­ières, grâce à l’aide de chercheur·ses spécialisé·es. La plus large fuite a eu lieu en août dernier au Turk­ménistan, générant une pol­lu­tion équiv­a­lente à celle de 67 mil­lions de voitures. Avec les États-Unis et la Russie, ce pays est respon­s­able du plus grand nom­bre d’incidents de méthane dus aux éner­gies fos­siles. 35% des émis­sions de méthane sont liées à ce secteur, et la plu­part de ces fuites sont évita­bles grâce à la main­te­nance des infra­struc­tures. Le reste provient de l’agriculture (env­i­ron 40% — notam­ment les rots des vach­es) et aux décharges à ciel ouvert (à peu près 20%).

Le Turk­ménistan, les États-Unis et la Russie sont respon­s­ables (et de loin) du plus grand nom­bre d’incidents de méthane dus aux éner­gies fos­siles (en orange). © The Guardian

Le Guardian note aus­si l’existence de 55 nou­velles «bombes de méthane» à tra­vers le monde : des sites d’extraction d’énergies fos­siles dont les fuites con­tin­ues équiv­audraient à au moins un mil­liard de tonnes de CO2. Ces sites sont majori­taire­ment situés en Russie, aux États-Unis ou au Qatar. En mai, The Guardian avait déjà évo­qué 195 «bombes cli­ma­tiques» liées à des pro­jets fos­siles (notre arti­cle). D’ici à leur tarisse­ment, ces 55 sites pour­raient rejeter l’équivalent de 30 années d’émissions de gaz à effet de serre des États-Unis, estime le quo­ti­di­en bri­tan­nique.

Le méthane est sou­vent dans l’angle mort des poli­tiques cli­ma­tiques, qui se con­cen­trent davan­tage sur les émis­sions de CO2. Or, le méthane a un pou­voir de réchauf­fe­ment plus de 80 fois supérieur à celui du CO2 au cours des 20 pre­mières années passées dans l’atmosphère, et près de 28 fois à l’échelle d’un siè­cle. Il est respon­s­able d’un quart du réchauf­fe­ment actuel.

«La hausse actuelle du méthane est très effrayante», recon­naît le pro­fesseur Euan Nis­bet, de l’Université de Lon­dres, auprès du Guardian. «L’accélération du méthane est peut-être le plus gros fac­teur qui défie les objec­tifs de l’Accord de Paris [main­tenir le réchauf­fe­ment sous 2°C, voire à 1,5°C, d’ici la fin du siè­cle par rap­port aux niveaux pré-indus­triels, NDLR].»

Puisqu’il pro­duit l’essentiel de ses effets à court terme, fer­mer le robi­net du méthane en lut­tant effi­cace­ment con­tre les fuites de l’industrie fos­sile per­me­t­trait d’enrayer rapi­de­ment l’élévation des tem­péra­tures. Selon l’ONU, réduire les émis­sions de 45% d’ici à 2030 évit­erait jusqu’à 0,3°C de réchauf­fe­ment.