L’amer à boire. La Fondation de la mer a passé au crible les programmes des candidat·es à l’élection présidentielle pour comparer leurs projets pour le grand bleu. Le résultat n’est visiblement pas à la hauteur du pays qui dispose du deuxième plus grand espace maritime au monde.
Un coup d’épée dans l’eau ? Seuls Yannick Jadot (EELV), Emmanuel Macron (EM), Marine Le Pen (RN) et Nicolas Dupont-Aignan (DLF) ont répondu à l’organisme qui les interrogeait, par exemple, sur leurs trois principales mesures en faveur de l’environnement marin, ou leurs efforts pour une « croissance bleue qui réconcilie économie et écologie ».
Après analyse de ces réponses et des programmes des autres candidat·es, la fondation conclut que « la dimension maritime de la France [y] est quasi inexistante » et souligne « la faiblesse de la réflexion sur la mise en œuvre des projets : calendrier, financements et arbitrages budgétaires », etc. « Comme en 2017, la plupart [des candidat·es] n’[ont] pas pris conscience de l’urgence à agir et de la responsabilité singulière de notre pays, dans un contexte où les enjeux maritimes sont pourtant omniprésents », regrette Sabine Roux de Bézieux, présidente de la fondation. Parmi les raisons de s’inquiéter : le déclin de la biodiversité marine, l’exploration des grands fonds marins, la surpêche, mais aussi la navigation problématique en mer d’Azov, sous contrôle russe.
Yannick Jadot se distingue par sa volonté de multiplier par cinq les zones faisant l’objet d’une protection plus élevée, dite « forte », au sein des Aires marines protégées (AMP) et de donner plus de moyens au ministère de la mer. Celui qui promet d’interdire l’exploration minière dans toute la Zone économique exclusive française (JDD), souhaite également créer une police de l’environnement et renforcer la pêche durable.

Jean-Luc Mélenchon, qui consacre un livret thématique de son programme à la mer, souhaite créer un droit international contraignant pour préserver et dépolluer l’océan et regrette l’absence d’une police de l’eau. L’insoumis fait le pari d’une économie de la mer respectant la « règle verte » (ne pas prendre davantage à la nature que ce qu’elle peut reconstituer), misant sur la pêche durable et un tourisme maritime respectueux de l’environnement. Plus anecdotique, il aimerait créer la « première station sous-marine permanente » sur le modèle de la Station spatiale internationale. Jean-Luc Mélenchon se prononce aussi pour « un fort développement » des énergies marines et en faveur d’un moratoire sur l’exploitation minière dans les grands fonds et sur les forages en Méditerranée. Une idée soutenue aussi par le communiste Fabien Roussel. Ce dernier veut proposer un traité mondial pour protéger les fonds marins et une conférence « pour l’économie et l’écologie bleues ». Il fait le pari de la culture des algues pour remplacer certains matériaux issus des industries carbonées, comme le plastique, et propose de construire des bateaux écologiques et de soutenir la pêche artisanale.
Anne Hidalgo (PS) associe la mer à son programme pour l’environnement (Vert) : elle souhaite créer un droit de la nature, un poste de Défenseur de l’environnement et mettre en place un prélèvement « 1 % océans » sur les budgets publicitaires des entreprises, qui permettrait d’investir dans la recherche.

Emmanuel Macron se fait le chantre d’une « diplomatie bleue » et entend renforcer les contrôles, la dépollution et le recyclage des plastiques. Il a aussi annoncé vouloir développer 50 parcs éoliens en mer (Vert). À droite, Valérie Pécresse (LR) propose de créer une banque des Outre-mer pour financer les énergies renouvelables et l’économie de la mer. Elle prévoit un accord entre pays riverains de la Méditerranée pour fixer un objectif « zéro plastique en mer ». La candidate lance l’idée d’une « réserve écologique citoyenne », des volontaires qui pourraient nettoyer les espaces naturels souillés.
À sa droite, Marine Le Pen (RN) insiste sur la nécessité de moderniser les ports et développer la pêche en haute mer, mais « dans le respect de l’environnement ». Éric Zemmour (Reconquête) souhaite renforcer la filière de recyclage des plastiques, mettre fin à l’éolien en mer et voudrait « exploiter et défendre tout le potentiel de nos eaux et de nos fonds marins ». Des visions difficilement compatibles avec la sauvegarde du vivant.
Du côté de l’extrême-gauche, Nathalie Arthaud (LO) dénonce « les grands groupes capitalistes » qui freinent « la sauvegarde de la mer » et Philippe Poutou (NPA) veut « mettre en place des aires protégées ».
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