Il a beau promettre que sa France, «c’est celle qui réussit la transition écologique», le Premier ministre Gabriel Attal est loin de le démontrer avec le programme de son camp. Malgré une baisse importante des émissions de gaz à effet de serre en 2023 (notre article) difficile de faire oublier le bilan du gouvernement et les deux condamnations de l’État pour inaction climatique en 2021.
Après le RN (à lire ici) et le NFP (à lire là), Vert décrypte les propositions sur l’écologie d’«Ensemble pour la République», composé de Renaissance (ER) et ses alliés : le Modem, Horizons, l’UDI, et le Parti radical.
Énergie
Nucléaire, en avant toute
Le camp macroniste mise toujours plus sur le nouveau nucléaire, sans doute influencé par la surenchère du Rassemblement National en la matière. En 2022, Emmanuel Macron avait promis la construction de six réacteurs EPR de nouvelle génération et des études de faisabilité pour huit autres. Finalement, et sans attendre les études de faisabilité, la mise en chantier des 14 réacteurs est désormais actée dans le programme d’ER.
Mardi 25 juin, sur TF1, le Premier ministre a indiqué que les travaux avaient déjà commencé et il a promis que les 14 nouveaux réacteurs seraient prêts en 2035, soit dans seulement 11 ans. En réalité, les travaux préparatoires viennent tout juste d’être autorisés pour les deux premiers réacteurs à Penly (Seine-Maritime).

Pas un mot sur les renouvelables
Pas un mot, en revanche, sur les énergies renouvelables. Elles sont pourtant les seules à même de décarboner le mix énergétique à court terme, car elles sont bien plus rapides à déployer que l’énergie nucléaire.
Ces derniers mois, le gouvernement n’a cessé de reculer sur le sujet. Il a notamment renoncé à présenter son projet de loi sur l’énergie et le climat censé organiser la production énergétique des prochaines années (notre article). En attendant, la France n’a toujours pas atteint les objectifs de production d’énergies renouvelables qui lui étaient fixés par l’Europe pour… 2020.
Logement
Une taxe sur le rachat d’action pour financer la rénovation des logements
Toujours en vue de contenter les classes moyennes, ER annonce la création d’un fonds de rénovation énergétique des logements qui sera «financé par une taxe sur les rachats d’actions». Il s’agit d’un impôt sur les entreprises qui rachètent leurs propres actions ; cette taxe devait initialement être intégrée au budget 2025. De quoi rattraper la coupe d’un milliard d’euros dont a fait l’objet le dispositif MaPrimRénov’ en février dernier ?
Selon les calculs du camp présidentiel, 300 000 logements «supplémentaires» pourraient ainsi être rénovés d’ici à 2027. Pour rappel, le gouvernement a lui-même mis en péril son objectif de rénover 200 000 logements par an dès 2024 (contre 71 000 en 2023) en réduisant le budget alloué à MaPrimeRénov’ d’un milliard d’euros.
Climat
On garde le rythme
Renaissance et ses alliés veulent réduire de 55% les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport à 1990, soit ce que prévoit déjà la loi européenne sur le climat. Le programme présenté par Gabriel Attal mise sur le maintien du «rythme inédit atteint l’an passé». Comme Vert l’expliquait, au moins un tiers de cette baisse annuelle de 5,8% est due à des facteurs conjoncturels, notamment la reprise de la production nucléaire et la réduction du cheptel bovin.
Environnement
La suppression des plastiques jetables
Les député·es ER «continueron[t] à lutter contre le gaspillage et la pollution de l’environnement en supprimant progressivement le plastique jetable». Difficile ici de savoir ce que le camp présidentiel compte faire de plus que ce que contient déjà la loi antigaspillage de 2020, qui prévoit la fin des plastiques à usage unique pour 2040.
Transports
Les voitures électriques, et c’est tout
Point ici de mobilités douces ou de transports en commun : le programme d’Ensemble mise tout sur les véhicules électriques et la réouverture du leasing social – l’accès en location longue durée à une voiture pour 100 euros par mois. Objectif : 100 000 locations par an, alors que 50 000 ménages ont bénéficié d’une mesure similaire entre janvier et février 2024. Le gouvernement avait alors rapidement mis fin au dispositif, «victime de son succès», car les objectifs initiaux avaient été dépassés.
Agriculture
Des prix planchers… contre lesquels Renaissance a pourtant voté
À peine quelques mois après la crise du monde agricole, calmée par les promesses de celui qui était alors le nouveau chef de file du gouvernement, Gabriel Attal (notre article), le programme se contente de promettre «des prix rémunérateurs» grâce à des prix planchers garantis aux agriculteurs à partir de 2025.
L’idée n’est pas nouvelle : une loi «visant à garantir un revenu digne aux agriculteurs et à accompagner la transition agricole» a même été récemment adoptée en première lecture à l’Assemblée à l’initiative du groupe Écologiste. Les député·es Renaissance s’y étaient alors opposé·es.
Rien ne change sur les retraites
Les retraites des agriculteurs doivent être revalorisées «comme nous nous y étions engagés», précise le programme, promettant une prise en compte des 25 meilleures années de revenus à partir de 2026. Un calcul déjà adopté dans une loi de 2023.
Un bilan qui contredit les propositions
À en croire la feuille de route d’Ensemble, les pesticides devraient diminuer de 50% d’ici à 2030. Un objectif déjà contenu dans la nouvelle mouture du plan Ecophyto, dont les versions précédentes ont systématiquement échoué à diviser par deux le recours aux produits «phytosanitaires». En mai, le gouvernement avait décidé d’adopter un nouvel indicateur de mesure de l’usage des pesticides qui avait fait scandale parmi les associations écologistes car il permet d’afficher une baisse artificielle alors que les quantités épandues restent constantes.
Territoires
C’est déjà coupé
ER a beau jeu de poursuivre «le soutien à l’investissement local pour la transition écologique à travers le Fonds vert mis en place en 2023»… après que le gouvernement l’a raboté de 400 millions cette année. Cette enveloppe est destinée à accélérer la transition écologique dans les territoires.
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