Décryptage

Loi sur l’énergie et le climat encore remise à plus tard : le gouvernement cherche-t-il à perdre du temps ?

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Écoute que coûte. Le gou­verne­ment vient d’annoncer une énième con­sul­ta­tion au sujet de la stratégie de décar­bon­a­tion du pays. Atten­due depuis neuf mois, la loi cen­sée déter­min­er quelles éner­gies nous utilis­erons en 2030 n’est tou­jours pas en vue.

Sor­tie du cha­peau du pre­mier min­istre Gabriel Attal ven­dre­di dernier, une «grande con­sul­ta­tion» doit être bien­tôt organ­isée par la Com­mis­sion nationale du débat pub­lic pour son­der les citoyen·es sur le pro­jet de stratégie française énergie-cli­mat (SFEC). Cette feuille de route est cen­sée per­me­t­tre d’accélérer encore la baisse de nos émis­sions de gaz à effet de serre dans les prochaines décen­nies. Ni le cal­en­dri­er, ni les modal­ités ne sont encore con­nues mais, selon le média Con­texte, l’idée d’un sim­u­la­teur en ligne serait à l’étude pour que les citoyen·nes visu­alisent et pren­nent con­science des choix de tran­si­tion qu’il reste à faire, d’ici à 2030 et 2050.

Louable à pre­mière vue, l’idée fait un flop. Pourquoi ? «Parce qu’on n’en finit plus des con­sul­ta­tions et des con­cer­ta­tions !», résume un fin con­nais­seur du secteur. Pour lui, «à force, on va démo­bilis­er tout le monde». De fait, les exer­ci­ces de co-con­struc­tion asso­ciant toutes les strates de la société n’ont pas man­qué : en 2023, sept groupes de tra­vail asso­ciant par­lemen­taires, asso­ci­a­tions et pro­fes­sion­nels ont gam­bergé pen­dant six mois ; une con­sul­ta­tion publique a même déjà eu lieu à l’automne, par­al­lèle­ment à une con­cer­ta­tion dédiée au mix énergé­tique, avant que le relais ne soit trans­mis à un «forum des jeuness­es» en début d’année. Sans compter l’organisation d’un Tour de France des régions puis de «COP régionales» sur le cli­mat, tou­jours en cours, pour per­me­t­tre l’appropriation de ces enjeux à l’échelle locale.

«La seule chose qui doit nous préoc­cu­per est de savoir à quoi cela abouti­ra», résume l’expert en énergie Nico­las Gold­berg. Or, jusqu’ici, «on ne sait tou­jours pas ce qui a été retenu» de la plu­part des exer­ci­ces déjà menés, tance un autre spé­cial­iste. Celui-ci ajoute : «Au final, on se dit que ça ressem­ble plus à une manœu­vre dila­toire», au moment où la loi de pro­gram­ma­tion sur l’énergie vient juste­ment de dis­paraître des radars. Alors qu’elle aurait dû être adop­tée en juil­let 2023, elle a été présen­tée en Con­seil des min­istres en févri­er 2024 et caviardée dans la foulée. Et elle ne fig­ure tou­jours pas dans l’agenda par­lemen­taire qui court jusqu’à l’été.

Comme vous le racon­tait Vert, le gou­verne­ment craint l’enlisement à l’Assemblée nationale où il n’a plus la majorité absolue. Mais pen­dant qu’il joue la mon­tre, le cli­mat, lui, con­tin­ue de se réchauf­fer.