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Mort de Rémi Fraisse : la France condamnée pour atteinte au «droit à la vie»

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La France est coupable d’avoir violé le «droit à la vie» du militant écologiste Rémi Fraisse, tué par la police en 2014 lors d’une manifestation dans le Tarn, a jugé la Cour européenne des droits de l’homme ce jeudi.

Voilà plus de dix ans que la famille de Rémi Fraisse attendait une décision dans cette affaire emblématique de l’histoire des luttes écologistes. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a tranché dans un arrêt rendu ce jeudi : la France est condamnée pour avoir violé le «droit à la vie» du jeune activiste.

Une photo de Rémi Fraisse, lors d’un hommage au militant rendu en 2014 à Paris. © Kenzo Tribouillard/AFP

Botaniste alors âgé de 21 ans, Rémi Fraisse est décédé en octobre 2014 sur le chantier du barrage de Sivens à Lisle-sur-Tarn (Tarn). Le militant écologiste et opposant au projet a été tué en pleine nuit par une grenade offensive lancée par un gendarme, qui s’était coincée entre son sac à dos et sa capuche. En 2015, le projet de barrage avait finalement été suspendu.

«Défaillances»

Après sa mort, une information judiciaire avait été ouverte pour «violence par une personne dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné la mort sans intention de la donner», requalifiée ensuite en «homicide involontaire». En 2018, la justice française avait conclu à un non-lieu. Une décision confirmée en appel puis en cassation, ce qui fait qu’aucun procès n’a eu lieu au pénal.

Après ces échecs devant la justice pénale, sa famille s’était tournée vers la justice administrative pour faire reconnaître la faute de l’État. L’État avait été jugé «civilement responsable des dégâts» commis lors de rassemblements et condamné en 2021, puis en 2023 en appel. La justice avait toutefois écarté toute faute de la part des autorités.

En parallèle, la famille avait saisi la CEDH pour faire reconnaître une violation du «droit à la vie» et les manquements de l’enquête. Cette instance juridique internationale, basée à Strasbourg (Bas-Rhin), est chargée de veiller au respect de la Convention européenne des droits de l’homme.

L’intervention des forces de l’ordre était-elle nécessaire et proportionnée ? D’après la Cour, «le niveau de protection requis dans le cas d’un recours à une force potentiellement meurtrière» n’a pas été «garanti» lors de l’opération de maintien de l’ordre menée par les gendarmes. La décision souligne également «les défaillances de l’encadrement dans la préparation et la conduite des opérations». La CEDH n’a cependant relevé aucun manquement lors de l’enquête. La condamnation est essentiellement symbolique, mais la France doit indemniser la famille de Rémi Fraisse à hauteur de 37 600 euros et leur verser 13 100 euros de frais juridiques.

«Les membres du gouvernement de l’époque qui ont donné les ordres ont la responsabilité de la mort de Rémi, a réagi le père du militant, Jean-Pierre Fraisse. Malheureusement, une fois de plus, la France ne sort pas grandie de cette affaire. Elle le serait si elle mettait tout en œuvre pour que de tels faits ne se reproduisent pas.»

«C’est une victoire et une condamnation particulièrement symboliques pour sa famille, puisqu’une juridiction valide ce qu’elle a toujours dit, à savoir que ce n’est pas normal que leur fils soit mort alors qu’il venait à une manifestation», amorce Maître Claire Dujardin, avocate de la mère, la sœur et la grand-mère de Rémi Fraisse, auprès de Vert. L’arrêt est particulièrement notable sur le plan juridique car c’est la première fois que la France est condamnée par la CEDH sur une opération de maintien de l’ordre. «Et enfin, il y a évidemment une forte répercussion car la mort de Rémi est devenue un symbole de la répression des militants écologistes, estime l’avocate. C’est important de dire que ce qui a eu lieu à Sivens n’est pas normal et qu’on ne devrait pas en arriver là.»

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