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La dissolution des Soulèvements de la Terre est définitivement annulée par le Conseil d’État, mais «ce n’est pas un chèque en blanc»

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Faire Terre ? Les Soulève­ments de la Terre se félici­tent du juge­ment du Con­seil d’État qui vient annuler leur dis­so­lu­tion, mais cette déci­sion reste un aver­tisse­ment pour le mou­ve­ment.

Mal­gré la pluie bat­tante, ce sont des sourires et des vis­ages enjoués qui illu­mi­nent la place du Palais Roy­al, face au Con­seil d’É­tat, en plein cœur de Paris, ce jeu­di après-midi. Plusieurs dizaines de per­son­nes ont bravé la météo pour célébr­er la dernière déci­sion de la plus haute juri­dic­tion française : l’annulation défini­tive du décret de dis­so­lu­tion pronon­cé en juin par Gérald Dar­manin à l’encontre des Soulève­ments de la Terre.

Ce décret avait été tem­po­raire­ment sus­pendu par le Con­seil d’État en août. Puis, une audi­ence pour étudi­er le fond de l’affaire s’était tenue le 27 octo­bre dernier (Vert y était). À cette occa­sion, le rap­por­teur pub­lic, mag­is­trat chargé de pro­pos­er ses con­clu­sions après avoir étudié le dossier, avait plaidé pour la dis­so­lu­tion du mou­ve­ment écol­o­giste.

«La jus­tice a ren­du son ver­dict : nous ne sommes pas des écoter­ror­istes !», s’enthousiasme l’activiste Camille Éti­enne. «C’est de notre pul­sion de vie dont ils ont fait le procès, au seul motif qu’elle con­trarie leur plan, qu’elle fait désor­dre. Mais avons-nous seule­ment le choix ?», inter­roge-t-elle. «Les Soulève­ments ne cesseront pas», affirme-t-elle sous les applaud­isse­ments nour­ris.

Camille Eti­enne et d’autres sou­tiens des Soulève­ments de la Terre devant le Con­seil d’E­tat, jeu­di. © Jus­tine Prados/Vert

Dans sa déci­sion, le Con­seil d’État a écarté l’accusation de «provo­ca­tion à la vio­lence envers les per­son­nes», qui était notam­ment reprochée au mou­ve­ment depuis la mobil­i­sa­tion con­tre les méga-bassines à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) en mars dernier — qui avait don­né lieu à de vio­lents affron­te­ments entre manifestant·es et forces de l’ordre.

En revanche, il con­sid­ère que les Soulève­ments de la Terre ont incité «à des agisse­ments vio­lents à l’encontre des biens», en ayant relayé et légitimé des dégra­da­tions matérielles ou des actions de sab­o­tages — ce que les Soulève­ments con­tes­tent. Cepen­dant, la dis­so­lu­tion ne con­sti­tu­ait pas une réponse «adap­tée, néces­saire et pro­por­tion­née […] à la date à laque­lle a été pris le décret attaqué», estime le Con­seil d’État. Un élé­ment impor­tant, qui sous-entend que le juge­ment pour­rait très bien être dif­férent si jamais la dis­so­lu­tion du mou­ve­ment était un jour remise sur le tapis.

«Cette déci­sion n’est pas un chèque en blanc pour l’avenir, c’est même un aver­tisse­ment», souligne auprès de Vert Arnaud Gosse­ment, avo­cat spé­cial­isé en droit de l’environnement. «Par ailleurs, la demande d’annulation des mesures de col­lecte de don­nées et de sur­veil­lance du groupe­ment [réclamée par les Soulève­ments de la Terre dans le cadre de leur recours, NDLR] a été rejetée. Cela recon­naît qu’il n’y a pas — encore — lieu à dis­soudre, mais qu’il y a lieu à sur­veiller», pointe l’avocat.

Les Soulève­ments, pour qui la déci­sion con­stitue «un sérieux revers» pour le gou­verne­ment, appel­lent d’ores et déjà à ampli­fi­er la lutte pour défendre «la terre, l’eau et les com­muns». Une vaste mobil­i­sa­tion con­tre l’entreprise Lafarge et «le monde du béton» est déjà annon­cée du 9 au 12 décem­bre.