Plus fossile à dire qu’à faire. Vivement critiquée pour son financement de l’industrie fossile, la banque BNP Paribas multiplie ses engagements « verts »… qui ne convainquent toujours pas.
L’émission Cash investigation de France 2 a consacré sa dernière enquête, diffusée jeudi, aux superprofits réalisés par les multinationales. Les journalistes ont notamment investigué sur les fonds verts de la première banque française, la BNP Paribas, qui vante ses investissements responsables. Or, l’enquête a relevé la présence d’entreprises aux pratiques discutables dans ces financements « verts », comme le champion de la pollution plastique Coca-Cola, une compagnie belge à l’origine de pollutions aux métaux lourds, Umicore, ou encore le pétrolier TotalEnergies.
C’est en partie en raison de ses liens avec la compagnie française que la BNP Paribas est dans le viseur du mouvement climat depuis plusieurs mois. Vendredi 20 janvier, une quarantaine d’activistes d’Extinction rebellion, Attac et Fridays for future ont aspergé de peinture les façades d’un établissement parisien de la banque pour dénoncer son partenariat historique avec TotalEnergies. Fin octobre 2022, les ONG Oxfam, les Amis de la Terre et Notre affaire à tous avaient mis en demeure la BNP Paribas de se mettre en conformité avec la loi sur le devoir de vigilance. Votée en 2017, cette dernière engage les grandes entreprises à prévenir les atteintes aux droits humains et aux libertés fondamentales, à la santé et à la sécurité des personnes, et à l’environnement, qui seraient liées à leurs activités. Les ONG reprochent à la banque sa « responsabilité historique » dans la crise climatique en tant que premier financeur européen — et cinquième mondial — des énergies fossiles (notre article).
La BNP avait jusqu’à jeudi pour répondre à cette mise en demeure. Mardi, la banque a annoncé de nouveaux engagements climatiques, dont le fait de réduire de 80% ses financements pour l’extraction et la production de pétrole d’ici à 2030 en abaissant ses encours de crédits (les montants des crédits émis) à moins d’un milliard d’euros. La BNP promet également de réduire ses financements du secteur gazier à horizon 2030. Pour rappel, l’Agence internationale de l’énergie a indiqué qu’il faudrait stopper tout nouveau projet fossile dès maintenant pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré par rapport à l’ère préindustrielle (soit l’objectif de l’accord de Paris).
Une réponse « insuffisante » qui n’a pas convaincu les ONG. « Un prêt accordé aujourd’hui et permettant le développement d’un nouveau projet d’énergies fossiles ne figurera pas obligatoirement dans les encours de la banque en 2030, même si cette infrastructure continuera à polluer bien au-delà de 2030 », avance Alexandre Poidatz, responsable de plaidoyer à Oxfam France. Pour Lucie Pinson, directrice de l’ONG Reclaim finance, spécialisée dans la finance durable, BNP Paribas « échoue à prendre une position ferme contre l’expansion pétrolière et gazière et continuera de jeter de l’huile sur le feu en finançant directement et indirectement de nouveaux projets dans le secteur ».
Les ONG à l’origine de la mise en demeure de BNP Paribas doivent désormais décider si elles souhaitent assigner la banque en justice.
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