Dans l'actu

Gabriel Attal passe à côté de l’écologie dans son discours de politique générale

  • Par

Attal est la ques­tion. Mar­di 30 jan­vi­er, le Pre­mier min­istre a présen­té sa feuille de route pen­dant près d’une heure et demie devant les député·es, sans con­va­in­cre les agricul­teurs, ni engager son gou­verne­ment sur le volet écologique.

Il était cen­sé présen­ter la vision du gou­verne­ment jusqu’à la fin du quin­quen­nat. Lors de son dis­cours de poli­tique générale, mar­di 30 jan­vi­er, Gabriel Attal a mul­ti­plié les appels du pied à la droite, sans briller par les annonces en matière d’écologie et d’agriculture, pour­tant au cœur de l’actualité. S’il con­state que «le dérè­gle­ment cli­ma­tique nous frappe, plus dur, plus fort, plus sou­vent», c’est pour se réjouir aus­sitôt de la baisse des émis­sions de gaz à effet de serre en 2023. Une baisse réelle, 4,6 % par rap­port à 2022 selon le Citepa, mais large­ment imputable à la hausse des prix de l’énergie, la baisse du chauffage et à un hiv­er clé­ment. Pour le reste, bien peu d’annonces con­crètes ont été faites.

  • Pas de quoi démo­bilis­er les agricul­teurs

La gronde des agriculteur·ices tient bon partout en France, ce mer­cre­di. Gabriel Attal n’a pas plus réus­si à désamorcer la sit­u­a­tion que lors de ses précé­dentes pris­es de parole, la semaine passée (Vert). Avec la promesse d’«une excep­tion agri­cole française» et d’un «réarme­ment agri­cole», le Pre­mier min­istre s’est dit «lucide, face à l’empilement des normes, face aux déci­sions qui tombent d’en haut». Au delà de sa volon­té de «débu­reau­cra­tis­er» ‑com­pren­dre: réduire le nom­bre de normes-, il s’est engagé à un verse­ment d’ici mi-mars des aides de la Poli­tique agri­cole com­mune (PAC), à un dia­logue avec les régions pour accélér­er le paiement des sub­ven­tions à l’in­stal­la­tion des jeunes agricul­teurs, et à la mise en place d’aides fis­cales pour les éleveur·ses. Un fonds d’urgence pour la viti­cul­ture, dont le mon­tant s’élèverait à 80 mil­lions d’euros selon les pré­ci­sions apportées par le min­istre de l’Agriculture Marc Fes­neau, a aus­si été évo­qué. Gabriel Attal a promis qu’un objec­tif de sou­veraineté ali­men­taire serait inscrit dans la loi et qu’un plan de con­trôle sur la traça­bil­ité des pro­duits ver­rait le jour. La France, a‑t-il assuré, défendra à Brux­elles une déro­ga­tion sur l’oblig­a­tion de laiss­er cer­tains ter­rains en jachère, une règle­men­ta­tion plus stricte sur les impor­ta­tions ukraini­ennes de volailles et s’opposera à la sig­na­ture du traité de libre-échange avec l’Amérique du sud, le Mer­co­sur.

La FNSEA, le syn­di­cat agri­cole majori­taire, déjà reçue longue­ment par Matignon lun­di, devait à nou­veau obtenir une audi­ence mar­di soir, et la Con­fédéra­tion paysanne et la Coor­di­na­tion rurale ce mer­cre­di matin.

  • Deux mesures, pas de poids

En charge de la «plan­i­fi­ca­tion écologique et énergé­tique», le chef du gou­verne­ment s’est pronon­cé «pour un envi­ron­nement plus res­pirable, partout et pour tous»… mais n’a pas jugé bon de citer les éner­gies fos­siles. Seules annonces : le lance­ment encore très impré­cis d’un ser­vice civique écologique pour 50 000 jeunes «prêts à s’engager con­crète­ment pour le cli­mat» d’ici la fin du quin­quen­nat en 2027, et la mise en place d’un plan de réduc­tion des plas­tiques pour les 50 sites indus­triels qui pro­duisent le plus de ces embal­lages. Anne Bringault, direc­trice des pro­grammes du Réseau action cli­mat (RAC), n’a pas caché ses doutes auprès de l’AFP sur la façon dont ces jeunes gens «pour­raient engager la trans­for­ma­tion de pans entiers de notre économie?».

  • Faire «rimer cli­mat avec crois­sance»

Dans la droite ligne d’un prési­dent de la République qui «adore la bag­nole» (Vert), voilà un Pre­mier min­istre pour qui «la voiture est un gage (…) de lib­erté». Gabriel Attal, dont la généra­tion est en proie au «doute sur l’avenir de sa planète», s’est pronon­cé con­tre une «écolo­gie de la bru­tal­ité» à la faveur d’une «écolo­gie pop­u­laire», sans qu’on en sai­sisse la déf­i­ni­tion. Son but : faire «rimer cli­mat avec crois­sance», car la décrois­sance ne serait rien de moins que «la pau­vreté de masse». Sur le fond, Gabriel Attal n’a pas prévu de revoir à la hausse les objec­tifs sur les éner­gies renou­ve­lables et s’est félic­ité d’être «à la tête d’un gou­verne­ment pro énergie nucléaire». Un «plan d’adaptation au change­ment cli­ma­tique» doit être dévoilé au prochain trimestre. La bio­di­ver­sité, com­plète­ment passée à la trappe, n’a fait l’objet d’aucune nou­velle annonce.

Les ONG envi­ron­nemen­tales n’ont en tout cas pas été con­va­in­cues du tout. Les Amis de la terre par­lent d’annonces «à con­tre-sens d’une tran­si­tion juste et de l’urgence cli­ma­tique» et le RAC estime qu’Attal «est passé com­plète­ment à côté du sujet de la plan­i­fi­ca­tion écologique».

Pho­to d’il­lus­tra­tion : Gabriel Attal lors de son dis­cours de poli­tique générale devant l’Assemblée nationale le 30 jan­vi­er 2024 © gouvernement.fr