Seitan mieux. Depuis quelques années, les acteurs de l’alimentation végétale défendent le «Veganuary», un mouvement qui encourage à tester un régime végétalien au mois de janvier.
Passer un mois sans manger d’aliments d’origine animale, c’est le défi du «Veganuary» (contraction de «vegan» et «january», soit janvier en anglais). L’initiative vient du Royaume-Uni et tente de se faire une place en France : 220 actrices et acteurs de l’alimentation végétale, restaurants et géants de la grande distribution participent cette année à une campagne qui rassemblait à peine 30 entreprises à ses débuts, il y a quatre ans.
Cette mobilisation fait écho au «Dry January», le mois sans alcool plébiscité par un nombre croissant de Français·es. Elle est pilotée en France par l’association de protection animale L214, qui s’appuie sur des «chasses au trésor vegan», des dégustations et des promos dans les magasins. L’objectif est de «sortir l’alimentation végétale d’un segment de niche» et de sensibiliser le grand public, raconte Alexandra Coché, responsable de la campagne Veganuary pour L214.
«Sortir de l’exploitation des animaux non humains»
En anglais, le mot «vegan» est souvent utilisé en référence à un régime dit «végétalien», qui exclut les aliments d’origine animale comme la viande, le poisson, les produits laitiers, les œufs et le miel. Le véganisme, au sens français du terme, dépasse la simple alimentation. «C’est un mode de vie qui implique de sortir de l’exploitation des animaux non humains. Au niveau de l’habillement, par exemple, on ne porte pas de cuir, de laine. Et puis aussi au niveau des pratiques, on va notamment questionner l’équitation, les zoos, même remettre en cause les animaux de compagnie», explique Lucie Wiart, chercheuse à l’école de commerce Neoma, spécialisée dans la perception sociale des produits simili-carnés.
Mais c’est sur l’assiette que les organisateurs de Veganuary ont surtout mis l’accent. «On a fait le choix de rester sur l’alimentation, car 95% des animaux exploités le sont dans le cadre de la consommation de viande», motive Alexandra Coché de L214. «Les autres causes sont importantes aussi, mais l’impact le plus direct découle de ne pas manger les animaux.»
Au-delà des motivations éthiques, le Veganuary peut aussi être l’occasion de «questionner son alimentation» pour manger mieux, et augmenter par exemple son apport en fibres, avance la nutritionniste Anne-Laure Laratte. Du point de vue de «la santé, c’est vraiment intéressant, ne serait-ce que pour développer la créativité», poursuit la spécialiste de l’alimentation.
«On sent que ça prend»
Pour le «Veganuary», des entreprises spécialisées dans les alternatives végétales à la viande, comme La Vie, mobilisent leurs ressources pour cibler un maximum de consommateur·ices, tout en assurant des commandes qui bondissent. Cette star-up française, qui a réalisé 19 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024, est présente de part et d’autre de la Manche.
«En Angleterre, c’est un évènement significatif, qui est très relayé et suivi. On double nos ventes en janvier. En France, on sent que ça prend. On prévoit +30% à +40% de chiffre d’affaires par rapport à un mois normal», relève son cofondateur et président-directeur général, Nicolas Schweitzer.
En plus d’augmenter les capacités de production pour suivre la demande, La Vie a financé une campagne de communication d’ampleur pour accompagner le coup de projecteur du Veganuary.
De nombreux freins au passage au véganisme
De quels freins parle-t-on ? «Ils sont innombrables», observe Karine Vernette, responsable éditoriale de l’Association végétarienne de France (AVF). «En dehors des questions de santé et de nutrition, il y a beaucoup de difficultés qui tiennent à l’accessibilité financière des alternatives et aux connaissances pratiques que l’on doit acquérir pour cuisiner végé de façon satisfaisante et saine», étaye-t-elle. Karine Vernette soutient que nos goûts sont «formés» à apprécier le poulet ou le porc, et «pas forcément quelque chose qui est fait à base de céréales ou de légumineuses».
Pour contourner cet obstacle, Accro, une autre jeune pousse française du végétal, a un plan. Jusqu’au 31 janvier, elle prévoit de publier quotidiennement sur ses réseaux sociaux des recettes et astuces pour aider les participant·es à «tenir le challenge jusqu’au bout», fait valoir Louise Ribereau, sa directrice stratégie et marketing. «On a souvent l’image du végétal comme quelque chose de chiant, reconnaît-elle, mais en réalité c’est quelque chose de simple et surtout gourmand.»