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Ces athlètes «climatosportifs» lancent une charte pour faire du sport l’allié de la lutte climatique

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La jouer col­lec­tif. Math­éo Gabon, Amélie Clerc et Younès Nezar du col­lec­tif Cli­matosportif ont ini­tié en févri­er une charte pour un sportif respon­s­able. Leur objec­tif : utilis­er les valeurs fédéra­tri­ces du sport pour sen­si­bilis­er aux enjeux cli­ma­tiques.

«Le sport con­tribue, mais est aus­si vic­time du change­ment cli­ma­tique, rap­pelle à Vert, Math­éo Gabon, ingénieur dans la con­struc­tion durable et sprinteur semi-pro­fes­sion­nel sur 100 et 200 mètres. Il fal­lait qu’on trou­ve un moyen d’insérer l’écologie dans notre pas­sion.»

Avec Amélie Clerc, escrimeuse semi-pro­fes­sion­nelle et salariée dans la tran­si­tion écologique de la fil­ière auto­mo­bile, et Younès Nezar, sprinteur semi-pro­fes­sion­nel sur 100 mètres et ingénieur dans la tran­si­tion écologique du secteur de la san­té, ils ont d’abord pen­sé à une manchette de sport aux couleurs des Warm­ing Stripes.

Les trois ath­lètes engagé·es veu­lent utilis­er les ban­des bleues et rouges, qui illus­trent les années qui se réchauf­fent, pour inter­peller les gens et les utilis­er comme «cheval de Troie» de l’écologie dans les com­péti­tions.

De gauche à droite, Younès Nezar, Amélie Clerc et Math­éo Gabon. © Les Cli­matosportifs

«L’idée de la charte nous est venue ensuite, en nous inspi­rant de celle de Vert [écrite avec une trentaine de jour­nal­istes de tous hori­zons, ndlr] pour un jour­nal­isme à la hau­teur de l’urgence écologique, détaille le sprinteur. Les leviers d’actions sont nom­breux et nous voulions guider les sportifs pro­fes­sion­nels et ama­teurs dans leur tran­si­tion écologique».

Pour le col­lec­tif, il s’agit de clar­i­fi­er les démarch­es à suiv­re pour s’engager dans une pra­tique sportive écologique, mais aus­si plus juste.

Pour soutenir leur pro­jet, le col­lec­tif a lancé le 21 mars un crowd­fund­ing. Et les manchettes aux couleurs du cli­mat seront disponibles sur leur site. «Dans les semaines à venir, on va aus­si organ­is­er une course où tous nos sou­tiens pour­ront courir, annonce Math­éo Gabon. Le but est de mar­quer le coup avec une course très visuelle pour faire du sport ensem­ble, pour le vivant.»

Une charte en sept points clés

La charte se décline en sept points : mobil­ité, ali­men­ta­tion, spon­sors, équipements, com­mu­ni­ca­tion et évo­lu­tion du sport. «Mais on ne voulait pas hiérar­chis­er les engage­ments, explique Math­éo. Comme dis­ait Chico Mendes [grand mil­i­tant brésilien con­tre la déforesta­tion, assas­s­iné en 1988, ndlr] : “On ne fait pas d’écologie sans lutte des class­es” ! Dans le sport, c’est pareil».

L’un des points clés de la charte con­cerne le trans­port, l’une des prin­ci­pales caus­es de l’empreinte car­bone du sportif. «Se priv­er d’avion, pour un sportif de haut niveau, c’est dif­fi­cile, regrette l’athlète. On est oblig­és de se pli­er aux choix des instances sportives pour pou­voir rester com­péti­tif».

En revanche, on peut agir sur les entraine­ments et les tra­jets du quo­ti­di­en. La charte con­seille ain­si d’emprunter les trans­ports en com­mun ou le vélo dès que c’est pos­si­ble. Un con­seil val­able pour les spectateur·ices.

Younès Nezar © Les Cli­matosportifs

Elle encour­age aus­si les ath­lètes à réalis­er leurs stages en France ou en Europe. «Sou­vent les fédéra­tions envoient leurs équipes à l’autre bout du monde pour leur pré­pa­ra­tion physique avant une com­péti­tion, indique Math­éo Gabon. Il existe pour­tant plein d’alternatives en France et en Europe pour s’entrainer.»

Végétarisme et compétition

Côté ali­men­ta­tion, la charte des Cli­matosportifs con­seille d’adopter un régime moins carné, tout en gar­dant une dose de pro­téines adap­tée aux besoins de l’athlète.

«Il y a une croy­ance très forte dans le sport qui dit que la viande est égale à la per­for­mance, explique le sprinteur. On sait main­tenant que des régimes végé­tariens peu­vent large­ment sub­venir aux besoins nutri­tion­nels et pro­téique d’un sportif.»

Math­éo Gabon est lui-même devenu végé­tarien il y a peu de temps. Il n’observe pas d’impact sur ses per­for­mances. «Si mes adver­saires voient que je per­forme alors que j’ai un régime ali­men­taire sans viande, ils vont peut-être com­mencer à se pos­er des ques­tions. C’est la preuve par l’exemple».

La charte met d’ailleurs en valeur des sportif·ves végétarien·nes connu·es : la ten­nis­woman Ser­e­na Williams, le bas­ket­teur Kyrie Irv­ing, le foot­balleur Ser­gio Aguero ou encore le ten­nis­man Novak Djokovic.

Même si leur mode de vie s’avère sou­vent très car­boné, la charte encour­age les ath­lètes à met­tre en avant chaque effort pour le cli­mat. «Com­mu­ni­quer sur le fait d’essayer et assumer le reste est déjà immense pour un sportif, con­clut Math­éo. Générale­ment, ils ne se sen­tent pas légitimes d’en par­ler, parce qu’ils ont honte de pren­dre l’avion ou d’être équipés avec du neuf. Mais ils devraient, car leur choix ont un fort écho après de leurs fans et du grand pub­lic.»