Privé de jet. Le 10 avril dernier, Jean Castex avait utilisé l’un des jets de l’État pour se rendre dans sa ville de Prades (Pyrénées-Orientales) afin de voter devant les caméras de télévision, provoquant une large indignation et une pétition lui enjoignant de faire autrement au second tour. S’il ne s’est pas résolu à faire une procuration ce dimanche, le premier ministre ne devrait pas utiliser de jet privé non plus, a-t-on appris hier.
Il y a deux semaines, pour assouvir son caprice médiatique, Jean Castex était parti de l’aéroport de Vélizy-Villacoublay au petit matin à bord d’un Falcon 900, pour arriver à Perpignan quelques dizaines de minutes plus tard. Avant de repartir en direction de Paris une fois son vote immortalisé par les chaînes d’information en continu. Selon nos calculs, un tel déplacement avait généré 4,46 tonnes de CO2. Soit l’équivalent de ce que rejette un·e Français·e en six mois, et plus du double de ce qu’un humain devrait émettre en une année dans un monde neutre en carbone (environ deux tonnes).
En plus d’être une inconséquence écologique, ce type de déplacement a aussi un coût de location (5 000 euros de l’heure), comme l’ont rappelé nos confrères de Mediapart dans une enquête publiée en février 2022 au sujet de la « passion immodérée [du premier ministre] pour les jets de la République » lors de trajets parfois réalisables en moins de deux heures de train.
Surpris·es que l’urgence climatique n’incite pas le premier ministre à faire plus d’efforts, des citoyen·nes ont lancé une pétition le 13 avril pour inviter Jean Castex à effectuer ses prochains trajets en train ou en avion de ligne (10 à 20 fois moins émetteur qu’un avion privé), voire à « faire une procuration […] ce qui vous épargnerait également du temps, et épargnerait de l’argent au contribuable ».
Signé par plus de 35 000 personnes, le texte a été transmis à Matignon avant que l’on apprenne, dans une interview exclusive accordée au journal L’Indépendant, que Jean Castex a décidé d’optimiser ses déplacements programmés dans le Sud de la France en cette fin de semaine. Après plusieurs déplacements en Occitanie, il devrait arriver à Prades dès samedi. Après son passage dans l’isoloir, ce dimanche, il devrait rentrer à Paris au moyen d’un avion de ligne. Cela « n’avait pas pu être possible la dernière fois », a-t-il justifié après la polémique provoquée par son déplacement en jet privé lors du premier tour.
Pour Charlène Fleury, spécialiste du transport aérien pour le mouvement Alternatiba, à l’origine de cette pétition, « on attend de voir s’il va vraiment le faire. Mais en l’état, cette décision est plutôt une bonne nouvelle : il a décidé de grouper ses trajets, ce qui est normal et raisonnable quand on parle de sobriété. On peut déplorer que le retour se fasse en avion, mais sur le symbole et l’effort, nous sommes satisfaits qu’il renonce au jet privé », a-t-elle déclaré à Vert.
Pour la militante, ce genre d’interpellation relève d’une « bataille culturelle » pour inciter le premier ministre à « une mobilité exemplaire, à la hauteur de ses fonctions et de l’urgence climatique ». Ce d’autant que plus que Jean Castex est à l’origine de la circulaire du 13 novembre 2020 relative à la nouvelle gestion des mobilités pour l’État, « avec une ligne qui préconise de prendre le train quand c’est possible ».
L’histoire ne dit pas si c’est la mobilisation citoyenne ou le verdissement du discours d’Emmanuel Macron dans l’entre-deux-tours présidentiel qui auront fait abdiquer Jean Castex, ou s’il avait programmé ces trajets de longue date. Contactés par Vert, les services du premier ministre n’ont, pour l’heure, pas donné suite à notre demande.
À lire aussi
-
Jean Castex fait un aller-retour en jet privé pour voter devant les caméras
Dimanche, le premier ministre Jean Castex s'est payé un aller-retour express en jet privé pour aller voter à Prades, commune des Pyrénées-Orientales dont il a longtemps été maire, à l'occasion du premier tour de la présidentielle. -
Au mépris du climat, Jean Castex multiplie les vols en jets privés pour des trajets courts
Une enquête de Mediapart révèle la passion du premier ministre pour les jets privés, qu'il utilise au-delà de ce que permet une circulaire… qui porte son nom.